Chapitre 5

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 Lorsque la voiture de police qui transportait Karoline arriva devant le commissariat, la jeune femme fit emmener dans une salle d'interrogatoire. Tout se passa très rapidement. Karoline se contentait de répondre aux questions comme elle le pouvait, le regard vide. C'est à cette occasion qu'elle appris que Maximilien s'en était sortie et qu'il souhaitait la poursuivre en justice pour coups et blessures.

Il ne fallut que très peu de temps avant que Karoline ne se mette à raconter qu'elle avait été agressé et qu'elle ne faisait que se défendre. Néanmoins, les policiers ne semblaient que peu convaincus. Car Maximilien avait d'importantes fractures et des traces qui témoignaient d'un acharnement de son agrésseuse ainsi que de l'utilisation d'une arme contondante. Cela tranchait malheureusement beaucoup trop avec un cas de légitime défense. À la suite de cet interrogatoire, les policiers partirent de la salle en apprenant à Karoline que son procès allait avoir lieu le soir-même.

Ce genre de situations était pour le moins courante dans l'Amérique poste crise. Car les instabilités politiques des années 2030 et leur intensification ont grandement multipliés le nombre de procès qui devaient être traités chaque année. À tel point que le gouvernement étasunien pris la décision en 2038 de réformer sa justice. Depuis cela, toute affaire considéré comme mineure n'avait plus droit qu'à des "procès éclaire" pouvant parfois déterminer le sort d'un accusé dans la journée même de son arrestation.

Les frontières d'un tel système étaient volontairement floues et manipulables. Cela permettaient aux pouvoirs en place de lutter plus rapidement et efficacement contre les insubordinations civiles et la montée des groupes anarchistes. C'est également depuis cette période que les organisations internationales se sont dissoutes pour la plupart.

Peu de temps après, Karoline reçut la visite de son avocat commis d'office dans la salle d'interrogatoire. Ce dernier expliqua longuement à Karoline pourquoi l'affaire semblait mal commencée. Tout d'abord, le discours de Karoline manquait de cohérence : comment aurait-elle fait pour blesser à mains nues Miller de la sorte ? S'il s'avérait qu'elle avait utilisé une arme et qu'elle avait de surcroit mentis, cela lui serait préjudiciable. Karoline préféra ne rien dire à propos de ses pouvoirs et acquiesça les paroles de son avocat, le cœur rempli de peur et d'inquiétude.

Quand l'heure du jugement fut arrivée, Karoline fut transférée au tribunal. Elle n'eut même pas le temps de revoir sa famille. Tout se passa très vite, cela la dégoûtait au plus haut point. Le procès se dévoila être complètement en faveur de Miller. Il fallait dire que cet homme ne semblait rien craindre face à la justice. Car, grâce à son père et à son influence incroyable, il pouvait être sûre d'avoir n'importe quelle juge dans sa poche. Les meilleurs avocats de Californie étaient même à sa disposition. Assurer d'en ressortir vainqueur, ce dernier avait hâte de se venger de la femme qui avait osé défier son autorité et l'avait dévisagé.

Au fil des minutes, on pouvait voir les visages de Karoline, de sa sœur et de ses parents se décomposer petit à petit. À la fin du procès, le juge déclara sa sentence.

- Karoline McBlue, vous êtes reconnue coupable d'agression préméditer avec circonstances aggravantes. Pour cela, vous êtes condamné à trois années de prison ferme dans l'un des établissements pénitentiaires pour criminels mineurs de l'Etat de Californie.

En attendant cela, le père de Karoline se leva et cria :

- Mais c'est quoi ce bordel !? Que faites-vous à mon enfant ? Elle s'est simplement défendu !

Après ce mots, des policiers firent sortir Jérôme et sa famille de la salle. D'autres s'avancèrent ensuite vers Karoline afin de la menotté. Néanmoins, à ce moment-là, le désespoir avait transformé les inquiétudes de la jeune femme en colère. Karoline se leva alors et s'exclama, à la manière de son père juste avant :

- Je refuse cela !

Le juge, surpris de cette réaction, lui répondit sur un ton sec :

- Vous n'avez pas à refusez quoi que ce soit. Vous ne pouvez rien y faire. Vous réfléchirez à vos actes en prison. Emmenez-la, je vous prie.

Les yeux et les paupières de Karoline se mirent à s'injecter de sang. En réponse, elle tapa du poing sur la table devant-elle, la brisant en deux sans aucune difficulté.

- Mes actes !? Arrêtez de parler de moi comme ça ! Arrêtez de traiter cet enfoiré de Miller comme une victime !

La tension monta d'un cran. Le juge, qui regardait Karoline à ce moment-là, était figer de peur. Mais cela n'était visiblement pas dut à l'accès de colère de la jeune femme. Car son teint était livide, digne de celui d'un cadavre. Ses yeux, quant à eux, étaient écartillé, laissant échapper des flots de larmes dépourvus de sanglots. Le pauvre homme semblait paralysé, incapable de prononcer le moindre mot. En réflexe à cette scène, les policiers sortirent tous leur armes de poing et braquèrent Karoline.

- Ne bouger plus, vous êtes en état d'arrestation !

Instinctivement, Karoline se retourna vers ces derniers. C'est alors qu'il leur arriva la même chose qu'au juge. Leur muscles se mettaient à trembler et à se crisper tandis que leur peau devenait de plus en plus pâle et froide. Karoline, tout aussi confuse que les autres personnes dans la salle, se retourna à nouveau, cette fois-ci vers l'audience apeurée. Le résultat fut terrible. À chaque fois que Karoline posait son regard sur quelqu'un, la personne en question se faisait paralyser par une étrange et foudroyante terreur.

- Mais qui c'est celle-là !? S'écria le juge qui venait tout juste de reprendre ses esprits.

L'un des jury se leva ensuite, tenant son crâne entre ses mains, tout en hurlant :

- C'est… C'est le diable ! C'est pas possible !

- Je vous en prie ! Que quelqu'un fasse quelque chose ! Ordonna l'une des spectatrice, terriblement paniquée.

Karoline, perdue, s'exclama d'une voix tremblante :

- Qu… Qu'est-ce qu'il y a ? Qu'est-ce que j'ai ? Pourquoi vous me regardez tous comme ça !?

À peine Karoline avait-elle fini de prononcer cette phrase qu'un groupe de policier armé entra dans la pièce pour la confronter. Par réflexe, elle défonça la fenêtre juste derrière elle et sauta afin de s'enfuir le plus loin possible de cet enfer. Quelques policiers téméraires suivirent la fuyarde jusqu'à l'extérieur. Néanmoins, ils se firent vite distancer par cette dernière dont la condition physique et l'endurance semblaient extraordinaires.

Karoline courut encore et encore avec un goût de peur amer dans la bouche. Elle ne ralentissait pas un seul instant, comme pour sauver sa propre vie. Au fil de sa fuite effrénée, lorsqu'elle eut été sûre d'avoir semé la police, elle décida de continuer en prenant la direction de l'ancienne décharge. Une fois arrivée à destination, la jeune femme calma son rythme et marcha le long des épaves, le regard vide et la tête baissée.

Aucune pensée ne traversait l'esprit de Karoline. Cette dernière finit par simplement s'asseoir contre l'épave de bus qu'elle avait plié en deux la veille. Au bout d'une dizaine de minutes, elle se leva, s'avança de quelques pas avant de s'écroulé au sol.

Soudainement, elle entendit quelqu'un l'appeler au loin :

- Karoliiine !

Cette voix lui était familière, c'était celle de sa sœur. Karoline se retourna alors et vit Emma qui courait dans sa direction. Elle se leva à nouveau et courut instinctivement vers cette dernière. C'est ainsi que les deux femmes s'enlacèrent

- Karoline… J'ai été tellement inquiète ! Lui murmura Emma d'un ton soulagé.

- T'en fais pas sœurette, je vais bien… Enfin, je pense.

En entendant cela, Emma recula sa tête et regarda sa sœur dans les yeux.

- Comment ça ?

Karoline baissa les yeux d'un air triste, ne pouvant confronter le regard remplis d'inquiétude d'Emma :

- Je… Je ne sais pas ce qu'il m'arrive. Je ressens à nouveau cette rage, comme si elle avait bouillonnée en moi depuis toujours et qu'elle voulait ressortir d'un coup. Et ma force n'a pas l'air d'être la seule chose…

- Dis-moi sœurette ! Tu me fais peur là !

Karoline serra le poing, toujours le regard fuyant, en repensant à ce qu'il venait de se passer au tribunal. Après un court silence elle répondit :

- Quand je m'énerve, les gens autour de moi ont l'air d'être comme paralysés. Ils restent là, à me regarder avec effroi sans qu'ils ne puissent rein faire. C'est très étrange comme sensation… J'ai l'impression d'être… une sorte de monstre.

- Mais non ! Dis pas ça Karo ! Je ne sais pas ce que tu as, mais tu n'es pas un monstre. En tout cas, quoi qu'il arrive, tu resteras ma sœur et je t'aimerais.

- Oui, moi aussi… Merci…

Karoline fondit en larme. Emma l'enlaça à nouveau. Après un petit moment de réconfort, cette dernière repris la parole :

- Ça va aller, on va rentrer à la maison. D'accord ?

- Non… Je suis recherché. Répondit Karoline en séchant ses larmes.

- Justement, ça ne sert à rien de continuer comme ça. Tu devrais limiter le casse et te rendre. Tu ne vas pas être en cavale toute ta vie non plus, voyons.

- D'accord, je vois… tu as raison.

- Allez ! On rentre à la maison ! Comme ça, tu pourras dire au revoir à papa et maman. Après, tu iras voir la police et tu leur expliqueras tout à-propos de tes pouvoirs, je serais avec toi si tu veux. Ça finira par bien aller, tu verras.

- Attends… On peut rester ici encore un peu avant de partir, s'il te plaît.

Emma acquiesça. Les deux femmes s'essayèrent donc au bord d'un muret pour contempler la ville. Le tableau qui se présentait à elles était identique à celui de la veille. Cela redonnait un peu le sourire à Karoline. Tandis qu'Emma, toujours inspirée par ce paysage, pointa du doigt le grand building au centre de la ville avant de dire à sa sœur :

- N'oublie pas ! On doit se rejoindre là-bas un jour.

- Je sais, je tiendrais ma promesse. T'en fait pas !

à suivre...

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