L'arrivée fracassante d'un glaciologue à Cancún - Chapitre 24

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Julien, 28 ans, alpiniste chevronné depuis 15 ans. Il a accompagné son père dès l'adolescence sur les sommets des Alpes aux portes de sa ville, Grenoble.

Grand et mince, sa passion lui a sculpté un corps d'athlète. Son visage, buriné par le froid et les UV de la haute montagne, laisse percer deux yeux vifs, transperçants, bleu glacier.

Ce beau brun, conciliant passion de la montagne et les études, est devenu chercheur glaciologue. Depuis 5 ans, il parcourt les plus grands glaciers du nord au sud du globe.

— Alors Julien ! Comme ça, tu as été retenu pour une expédition en raquettes dans les Caraïbes, étouffe de rire, Charles, son directeur de recherche au Laboratoire de glaciologie et géophysique de Grenoble.

— Moque-toi ! Je soupçonnerai un brin de jalousie si je ne te connaissais pas ! Répond Julien.

— Je dois bien t’avouer, Julien, qu'un petit voyage au Mexique ne m’aurait pas déplu. Cancún ce n'est pas la pire des destinations !

— Qui se gelait les doigts et les pieds sur les glaciers du Groenland, au printemps dernier pour mesurer les écoulements d'eau sous-glaciaires, pendant que l'équipe prenait, tranquille, le café au soleil sur le campus ?

— Ça va ! Ça va ! Julien ! On peut plaisanter quand même ! Plus sérieusement, je sais bien que ce sont la qualité de tes travaux et ton expertise sur la fonte accélérée des glaciers, que tu as su brillamment confirmer, qui te valent d'accompagner, comme expert patenté, le ministre de l'Écologie de notre pays, à la Conférence mondiale sur le réchauffement climatique organisé, à Cancún en novembre.

Charles sur un ton plus badin.

— Tu vas pouvoir enfin alléger tes valises, en troquant les vestes en duvet, gants et bottes contre maillots de bain et tongs.

— Tu as raison Charles ! Je crois bien que je vais même me contenter d'un seul bagage en cabine.

— De toute façon, Julien, tes rapports et power-point tiennent très bien sur une clé USB, tu pourrais partir les mains dans les poches !

— Si tu me laisses la carte bleue du centre de recherche, je ne dis pas non ! Je dois pouvoir trouver maillot de bain et planche de surf sur place ! Embraye Julien, sur le même ton.

— Hé, doucement ! Tu es en mission, pas en vacances ! De toute façon, les frais de voyage, hôtels, restaurants, sont pris en charge par le ministère. Pour payer les boissons et cours privé de plongée aux charmantes chercheuses nordiques, qui ne manqueront d'être présentes sur le circuit de la Conférence, je te fais confiance ! Continue, Charles, amusé.

— Charles, pour quel jour est prévu le départ ? Julien a en tête les dates de la Conférence Mondiale.

— Après-demain ! Julien. Ton passeport est à jour cela suffit ! Toutes les formalités ont été prises en charge par les services de l'Ambassade de France au Mexique. Tu retrouveras le Ministre et son attaché de direction directement à l'aéroport.

— Ouf ! S'exclame Julien. Au moins, ce n'est pas comme la préparation d'une expédition. J'ai quand même un peu l'impression de jouer au "James Bond”. Il y a 8 jours seulement, j'étais encore au Groenland !

Julien, le lendemain, prend le premier TGV pour Paris. Sa sœur l'hébergera la veille de son départ. En étant sur place, il est certain de ne pas rater l'avion et surtout, le plus important, sûr de rencontrer l'attaché du Ministre, pour valider avec lui les éléments dont il aura besoin pour sa participation aux commissions de la Conférence.

Le surlendemain, à l'Aéroport de Roissy, dans la salle d'attente réservée aux officiels et aux VIP, Félix Hubert, l'attaché du Ministre est déjà à pied d’œuvre.

— Bonjour, M. Julien Saval ! Merci d'être arrivé en avance. Cela va me permettre de vous donner les dernières informations sur votre emploi du temps à notre arrivée à Cancún ainsi que les détails pour l’hébergement.

— Merci beaucoup, M. Hubert. D'habitude c'est mon rôle d'assurer l'intendance et la préparation des expéditions. Sachez que j'apprécie votre aide à la juste mesure.

— À notre arrivée, pour l'hébergement, nous allons devoir nous séparer. En effet, comme vous le savez, la Conférence accueille 192 pays. Les capacités d'accueil de Cancún ne sont pas extensibles à l'infini.

— Vous serez logé un peu à l'extérieur de la Ville, au nord, sur la côte caraïbe à l'hôtel The Beloved Playa Mujeres. J'espère que cela ne vous perturbera pas trop M. Saval. Sachez que vous serez prioritaire pour les Taxis. L'organisation de la Conférence a négocié les transports avec la Ville de Cancún.

— Merci, c’est parfait. Je préfère de beaucoup être au bord de la mer.

Arrivé au Mexique, la chaleur prévue par le commandant de bord est déjà bien installée. Plus 30 degrés, Julien a l'impression d'entrer dans un sauna et de manquer d'air.

Moins 30 au Groenland, il y a 10 jours, 5 degrés à Grenoble et 10 à Paris au départ, son corps est plus adapté aux frimas qu'aux tropiques.

— Nous nous retrouverons dans deux jours au centre de la Conférence Mondiale, lui précise l'attaché de Direction.

— Je vous accompagne aux voitures taxis, nous avons un véhicule chacun pour notre hôtel.

— Reposez-vous bien, il faudra vous adapter au climat, lui dit Félix Hubert en claquant la portière du taxi.

Julien ne s'attendait absolument pas au luxe de l'hôtel : 5 étoiles, piscine à débordement sur la mer des Caraïbes, chambre climatisée avec grand balcon et vue imprenable sur l'océan.

— Buenos Dias, Mister Saval. Entend-il à peine franchi le portique tournant de l'entrée de l'Hôtel.

— ”How know you my name ? L'Espagnol n'est pas le fort de Julien !

— Tous les conférenciers nous sont annoncés par l'Organisation et nous ferons tout pour vous faciliter au maximum votre séjour à Cancùn, Senior Saval !

— Désirez-vous profiter de la piscine avant de retourner au Centre de Conférence ? Suggère le maître d'hôtel.

— Dés que j'aurai enfilé un maillot, ce sera avec plaisir. Je ne retourne pas au centre avant deux jours.

— Parfait ! Vous avez un peu de temps devant vous. Que diriez-vous d'admirer dauphins et baleines qui viennent se reproduire sur nos côtes ? C’est la pleine saison.

— Magnifique ! C'est une super proposition. D’habitude je ne peux les voir que du haut d'un cargo dans des mers gelées, enchaine Julien.

— Chez nous vous pourrez même plonger et les toucher. L’eau est à 25°.

— Si vous êtes intéressé, rendez-vous demain matin, 9h à l'embarcadère de l'hôtel, des canots prendront les clients de l'hôtel.

— Parfait, j'y serai répond Julien, mais d'abord piscine et dîner car ce vol m’a donné la fringale, je n'ai rien pu manger, mal de l'air…

Julien a dormi 12 heures d'une seule trait, petit-déjeuner avalé en vitesse, il ne veux pas rater sa journée avec les baleines et les dauphins des Caraïbes. Comble du luxe, la réception lui remet un téléphone portable spécialement dédié à l’hôtel. Il trouve l’idée excellente, car le sien ne fonctionne pas dans ce pays. II le glisse dans une pochette étanche et ensuite dans une poche zippée de son sac.

Il se dépêche et se dirige vers un ponton qui lui semble appartenir à l'hôtel. Un homme sur un canot l'interpelle en anglais

— "Whale, Dolphin", crie-t-il.

— Yes, Yes, répond Julien.

— Bienvenue à bord senior !

Lui adresse l’homme, d'un type un peu indien, avec un large sombrero.

— Vous allez sur les baleines ? Demande Julien.

— Yes, yes ! Acquiesce le personnage.

Au fond du bateau, Julien dépose son sac de type marin refermé avec des cordelettes. Il contient appareils photo, caméscopes et son portefeuille avec quelques dollars. Il a laissé papiers et passeports au coffre de l'hôtel selon les recommandations de l'attaché de direction.

— En route, lui dit l’homme.

Le temps est magnifique, juste une petite brise, la mer turquoise, comme sur les cartes postales !

— Baleines après barrière corail ! Lui signale l'homme au sombrero.

Une fois la barrière franchie, l'homme crie Whale, Whale, en pointant du doigt l'horizon. Julien sort son appareil photo pour immortaliser sa rencontre avec les cétacés.

Soudain il plonge dans le noir. Un violent coup de clé à molette sur la nuque, il s’effondre sur le bord du canot. L'homme arrache l’appareil photo, vide le contenu du sac, s'empare des appareils et du portefeuille. Une fois vide, il l'utilise avec les cordelettes pour attacher les poignées de Julien, inconscient.

Julien est déjà affalé à moitié en dehors du canot, son agresseur le fait basculer dans les eaux chaudes des Caraïbes.

Après avoir vérifié que le corps coule vers les profondeurs, une fois sa besogne achevée, l'homme et son canot retournent vers la côte, abandonnant Julien dans les eaux infestées de requins.

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