Pouce

Une minute de lecture

Enfin, ils se sont arrêtés.

Je ne sens plus les coups

Sur ma peau craquelée,

Ne subis plus le joug

De leurs fusils braqués,

Je ne sens plus le goût

Des épaisses fumées

Qu'ils me crachaient absous

De toute vanité.

Enfin, ils se sont arrêtés.

Et je sens dans mes veines

Se répandre l'effet

De poisons plus obscènes

Que leur impunité.

Je sens mes bronches pleines,

Mes poumons écrasés,

Je ne suis pas certaine

De pouvoir respirer.

Enfin, ils se sont arrêtés.

Et en ouvrant les yeux

Sur mon corps molesté

Je constate les bleus

Et les trous des forets

Que tous les envieux

Sont venus enfoncer,

Assoiffés, convoiteux,

Prêts à tous les forfaits.

Enfin, ils se sont arrêtés.

Je ne les entends plus,

S'agiter, s'échauffer,

Ils semblent disparus,

Et, à proximité,

Le chahut de la rue

Semble s'être muté

En un silence nu.

Serais-je ainsi sauvée ?

Enfin, ils se sont arrêtés.

De quoi ont-ils eu peur ?

M'ont-ils abandonnée ?

Ont-ils fait une erreur ?

Reviendront-ils armés ?

De mes plus violents agresseurs

Chaque minute, libérée,

Me laisse le plaisant bonheur

De réapprendre à exister.

MH.

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