1. Le Fils Moribond - Partie 2

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Dix années passèrent, Dorian avait grandi et au plus intense soulagement de son père, il n'affichait aucune aptitude magique. Il savait que la Tour Blanche allait les tester pour s'assurer que Thérésa et Dorian ne présentaient pas un potentiel. Le Grand Conseil des Mages exigeait que l'on forme des enfants, beaucoup d'enfants, il animait trois classes par jour, d'autres collègues en avaient bien plus. Le cours de ce matin-là portait sur la métamorphose. Il avait toujours jugé que cette pratique demandait beaucoup de temps et d'entrainement et qu'elle n'était pas adaptée à des enfants si jeunes... des enfants de l'âge de Dorian. Quand il pénétra dans la salle d'études, ses élèves bavardaient et chahutaient. Valérian le savait, une bonne entrée en matière permettait de garder ses ouailles attentives tout le restant de la leçon. Il se changea en un lion qui obtint le silence le plus complet grâce à un puissant rugissement. Il reprit sa forme humaine et commença son enseignement, plus personne ne lui poserait la moindre question sur ses aptitudes, à présent.

***

Le cours venait de s'achever, Valérian n'avait pas voulu continuer la pratique car il sentait bien le manque d'assiduité de sa classe et il craignait les accidents s'il allait plus loin. Les accidents, ses collègues et lui, y étaient confrontés quasiment chaque jour. La Tour Blanche en demandait trop, apprendre plus, pousser le pouvoir à son paroxysme. Ça révoltait Valérian de voir la mort d'un enfant ou sa fracture psychique être appelées accident. Il s'apprêtait à quitter la Tour afin de retrouver sa petite famille quand soudain, deux élèves apparurent. Le premier guidait le second hagard. Valérian les arrêta :

  • Que s'est-il passé ?
  • Un accident, Monsieur, répondit le plus conscient. Il s'entrainait sur la métamorphose et il a tué son familier.

Valérian ferma les yeux, dépité. Encore un accident. Un mage adulte qui perdait son familier éprouvait une peine comme jamais il ne pouvait en vivre ; un enfant n'en revenait pas. Encore un élève qu'il ne reverra jamais. Il soupira, se désintéressa de l'affaire et rentra chez lui retrouver épouse et famille.

***

  • Maman, Dorian il m'embête !!!

La voix de Thérésa s'éleva dans la maison. Sarah convergea alors vers le grand salon. Dorian s'amusait à faire léviter la poupée de sa sœur. Elle soupira, son fils commençait à maîtriser l'éther, il faudrait qu'elle en parle à son mari. Elle allait répliquer quand soudain la scène se figea. La porte s'ouvrit sur Valérian. Dorian l'observa comme un gibier dans la mire d'un chasseur. La poupée s'écrasa au sol dans un bruit mat. Le visage du mage se chargea alors d'une colère intense. Il s'avança vers son garçon.

  • Dans mon bureau immédiatement, ordonna-t-il.

Il ouvrit silencieusement la marche vers ce lieu où il aimait retrouver un peu de paix. Quand il fut entré dans son antre, il utilisa un sort basique pour refermer la porte derrière lui. Il savait que son fils se tenait là, le visage inquiet, les yeux fixant le sol.

  • Où as-tu appris ça ? tonna le père sans se retourner.

La réponse de Dorian se mut en un ramassis de murmures et de borborygmes incompréhensifs :

  • Tu quoi ? demanda son père en haussant le ton.
  • Dans un de tes livres, chuchota l'enfant en montrant du doigt la gigantesque bibliothèque qui ornait la totalité du mur.

Valérian se retourna alors vers son fils. Son regard froid et son visage fermé menaçaient d'exploser dans une colère magistrale. Les bras croisés devant lui, il demanda d'un ton neutre :

  • Montre-moi lequel.

Dorian hésita un petit moment puis se dirigea vers le mur et sortit à moitié un livre.

  • Celui-là, dit-il d'une toute petite voix.

Valérian s'empara du livre, c'était un ouvrage de magie classique qu'il aimait utiliser auprès de ses élèves.

  • C'est le tome trois, gronda le père.
  • J'ai déjà lu les deux autres, avoua Dorian en se décomposant.

Valérian se retourna vers son bureau et fit violemment claquer le livre dessus.

  • Sers-moi un verre de vin, commanda-t-il.

Dorian s'avança alors vers le petit bar qui trônait à la droite du bureau.

  • Non, le réprimanda son père. Si tu as lu les trois livres et que tu les as compris, tu peux me servir un verre de vin sans bouger de ta place.

Dorian se sentit encore plus impressionné qu'il ne l'avait jamais été en présence de son père. Il déglutit avec difficulté et déclara :

  • C'est de...

Le mot eau se coinça dans sa gorge quand son père le fusilla du regard. Dorian baissa les yeux et se concentra. Il projeta sa magie pour soulever la carafe d'eau et en remplir un verre puis il le transporta sur le bureau. Il transmuta ensuite le contenu et se recula silencieusement. Après un long silence, Valérian souffla :

  • Sors d'ici.

Dorian ne se fit pas prier et laissa son père seul à méditer sur ce qu'il venait d'apprendre. Il saisit violemment le verre de vin et le fracassa contre un mur. Il se laissa tomber sur sa chaise et contacta mentalement Elminster :

  • Mon ami, il faut qu'on se voie... et vite.

Le mage rouge surgit soudain dans le bureau, le visage grave, inquiet :

  • Que se passe-t-il ? s'empressa-t-il de demander.

Valérian prit le livre posé sur son bureau et le tendit à son ami :

  • C'est le dernier passe-temps de mon fils, déclara-t-il d'une voix dépitée.
  • C'est le tome trois, remarqua Elminster.
  • Il maîtrise déjà les deux autres, rétorqua le mage.
  • Fantastique, s'emballa le vieil homme, il faut immédiatement l'emmener à la Tour et...
  • Non, tonna Valérian ! J'ai vu trop de choses inacceptables là-bas, trop d'accidents.
  • Mon ami, tu ne pourras pas leur cacher ça longtemps.

Valérian soupira.

  • Je ferai tout pour qu'il rate le test.

Ils furent soudain interrompus par quelqu'un qui toquait à la porte. Cette dernière s'ouvrit doucement sur Sarah.

  • S'il te plaît mon chéri, demanda-t-elle d'une voix suppliante, ne sois pas trop dur avec ton fils, il... mais où est-il ?
  • Je l'ai renvoyé dans sa chambre, répondit Valérian inquiet.
  • Il n'y est pas, avoua Sarah, je pensais qu'il était encore avec toi.

La panique s'empara soudain du mage, il hurla après son familier, lui intimant de retrouver immédiatement l'aura de son fils.

  • Il est dans un autre plan, l'informa la petite hermine.

Valérian se décomposa. Il dut s'asseoir pour ne pas vaciller. Elminster posa une main amicale sur l'épaule de son acolyte. Soit son fils était parti de lui-même dans un plan qu'il ne possédait pas, soit il venait d'être enlevé.

  • Ami ou hostile ? peina-t-il à demander.

Le trouble se transforma en incrédulité quand le familier lui répondit :

  • Le sien.

Valérian secoua la tête :

  • C'est impossible ! Il lui faudrait le pouvoir, il lui faudrait la puissance, il lui faudrait des années d'études pour pouvoir créer ne serait-ce qu'un grain de sable d'un plan parallèle.

Syphilis se porta à la hauteur de son maître pour le regarder dans les yeux :

  • Dorian est dans un plan parallèle qu'il a créé lui-même.
  • Conduis-nous là-bas, ordonna alors Valérian.

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