Chapitre 24 - ASTRID

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- Je ne sais pas qui vous êtes, mais ne faites plus un geste, où je vous abats sur le champ.

Le soldat profère sa menace alors que je connais déjà la suite des évènements. Aujourd'hui, je ne suis plus tétanisée par la peur, alors que pourtant, j'aurais toutes les raisons de l'être. Voilà la véritable force d'Astrid : ce n'est ni le combat, ni le tir, mais bien ses réactions instantanées et l'adrénaline qui la réveille, cette adrénaline qu'elle est si prompte à produire. Ces capacités peu communes expliquent donc sûrement la surprise du soldat. Il n'a même pas le temps d'anticiper que déjà, j'extirpe une de mes grenades explosives, la dégoupille et la propulse en plein sur la ligne de soldats qui nous sépare de la surface. L'homme appuie sur la détente dès qu'il comprend ce qui est train de se passer, mais il est déjà trop tard : j'ai plongé à terre vers Mehdi et Diane, les entraînant dans ma chute vers le sol pour les protéger de l'explosion. Une fraction de seconde plus tard, la détonation retentit, faisant trembler toute la structure. Des hurlements de terreur se répercutent partout dans le couloir tandis que beaucoup nous imitent, conscients du danger. Mais certains, toujours debout, se prennent les débris de plein fouet.

Le sang gicle au-dessus de ma tête, et j'essaye, une fois de plus, de ne pas penser au passé. Ne pas penser à ces énièmes victimes innocentes. Même les soldats ne méritaient pas ça : ils croient se battre pour une juste cause, et quand bien même ils voudraient résister, pris de remords, ils ne le pourraient pas. Dès que nous estimons le danger écarté, Mehdi et moi relevons la tête et saisissons à nouveau chacun un bras de ma mère. Cette fois, cependant, tout aussi sonnée que les autres par l'explosion de la grenade, elle ne résiste pas. Je laisse Mehdi la supporter en grande partie tandis que, de ma main libre, je dégaîne une de mes armes pour abattre les derniers soldats encore debout. Si nous n'étions pas déjà repérés, à présent, toutes les unites sont au courant de notre présence ici, et le temps presse plus que jamais : les renforts ne vont pas tarder à arriver.

Premiers touchés par la grenade, les gardes qui nous barraient auparavant le passage ont presque tous été décimés. Déchiquetés, leurs corps s'étalent sur le sol dans une marre sanglante. Le rouge est partout, il envahit ma vision, et Alexy a quelques spasmes d'horreur, mais Astrid est encore suffisament au contrôle. Une fois la voie complètement dégagée, je reprends Diane à Mehdi et nous nous engouffrons dans le tunnel de sortie. Nous sommes seuls à présent, et le brouhaha de la foule, encore multiplié par la panique, disparaît peu à peu derrière nous. Quand je sens liquide poisseux couler de ma tempe, je délaisse brièvement ma mère pour l'essuyer et constate que, pour une fois, il s'agit du mien. Quelques débris de la grenade ont dû m'atteindre, mais rien de grave. Du moins, j'essaye de m'en convaincre tout en ignorant mon mal de tête persistant. Mon coeur bat si fort qu'il résonne à l'intérieur de mon crâne comme s'il s'y trouvait. Gémissant et grognant sous l'effort, Mehdi et moi portons ainsi une Diane à moitié évanouie sur une centaine de mètres avant d'atteindre enfin la porte de secours, que nous poussons en mettant tous nos espoirs dans ce minuscule geste. À notre grand étonnement nos prières silencieuses se retrouvent excaucées, et le battant s'écarte pour nous révéler une fin d'après-midi nuageuse. Au moment même où nous mettons le pied dehors, un éclair illumine le ciel et un grondement nous parvient.

Puis un gigantesque poids s'ôte de mes épaules, et je me rends compte que je ne supporte plus Diane. Elle a disparu, comme par magie. À vrai dire, je ne me sens plus marcher non plus, comme si je flottais à quelques centimètres du sol sans efforts.

Puis toutes mes inquiétudes disparaissent dans le néant.

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