Où 4/10

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- Lui, si, rétorqua Ombre.

Ssdvenna’êk’ la détailla du regard, mauvais, puis renonça à débattre avec leur peu de vocabulaire commun. Plus loin, la soumise achevait de monter une petite tente entourée de pieux solidement enfoncés dans le sol. Le dragonien désigna le lieu du menton, puis fixa Gérald.

- Loui, là.

Ombre s’interposa entre son seigneur et la tente. L’écailleux au nom imprononçable lui montra les crocs et émit un grondement sourd. Gérald lui glissa doucement :

- Ne te les mets pas à dos, Ombre.

- Keuak tôa loui dire ? feula le tisserand.

- Il me recommande de ne pas m’interposer. Mais je ne vous laisserais pas le traiter en prisonnier.

- Si. Loui prisonnier. Pas fers pôr loui.Que toit. Ô… loui peuvoâr’ partir, mais môrir. Pas de nôs…

Le dragonien montra ses mains et agita les doigts.

- Isséri veut accueillir tô rojeutai. Donc loui ôcy. Puis loui bientôt môrt. Môa de…

Il leva un pouce.

- Si…

- Moins d’un siècle, acheva Ombre, glaciale.

Le savoir lui déplaisait fortement. Moins d’un siècle pour trouver un moyen de partir vivre à la Faille, avec Astuce, Kriss et Brouillard. Le soleil descendait. Bientôt, si on la laissait dormir, elle pourrait savoir… En attendant, elle refusait que son seigneur soit incarcéré. Que deviendrait-elle sans lui ? Déjà qu’elle se sentait perdue… Égarée parmi des sauvages dont elle ignorait tout, même la langue.

- Ombre, laisse-les faire.

Elle voulut se retourner et protester. Il ajouta d’une voix atone :

- C’est un ordre.

Le terme lui valut un crachat bilieux en pleine face, accompagné d’un feulement hostile. Le liquide verdâtre grésilla au contact de sa peau, et il grimaça. Le liquide acide le brûlait, Gérald prit sur lui pour s’essuyer de sa manche en lambeaux avec flegme.

Ombre se surprit à feuler elle-même en réponse, avec plus d’hostilité encore.

- Ô va rrrrégler ççça vite, grogna soudain Ssdvenna’êk.

Il se tourna vers le campement, et lança quelque chose à l’assemblée. Aussitôt, tous abandonnèrent leur activité, et ils formèrent un autour des trois. Le tisserand somma Ombre de rester dans le cercle, tandis qu’il s’éloignait, tirant Gérald par le bras pour l’emmener à l’écart. Ombre voulut s’interposer encore, quand Isséri entra dans son champ de vision. D’instinct, elle pressentit qu’en aucun cas elle ne devait insister. À la place, elle fit face, et baissa spontanément la tête comme le tisserand l’avait fait.

Le geste plut à l’assemblée. Quelque chose de froid enserra le crâne de la petite rousse, tandis qu’Isséri la sondait du regard. La noble tendit une main, et des filaments noirs apparurent autour. Ils crûrent, puis formèrent le fourreau d’Ombre, rattaché à sa ceinture. La sensation de froid s’évanouit, lorsque la dragonienne lui lança son arme.

La garde rapprochée attrapa son bien en vol, et s’en ceignit aussitôt. Sans plus attendre, un dragonien rompit le cercle et l’approcha, une épée courte de mauvaise facture en main. De mauvaise facture, mais épaisse. Il laissa à Ombre le temps d’exécuter quelques gestes avec la sienne, avant de charger. Ne sachant comment considérer cette attaque, Ombre appliqua ce qu’on lui avait toujours inculqué : désarmer, immobiliser. Elle parvint à estimer correctement le centre de gravité de l’arme de son assaillant, et elle put l’en défaire d’un coup. Il voulut se lancer dans un corps-à- corps, qu’elle esquiva sans peine. En un éclair, elle bondit sur son flanc et le renversa, les bras maintenus dans le dos, pesant de tout son poids sur lui.

Incertaine sur la suite des évènements, elle s’intéressa à la foule. Leur nature prédatrice perçait, ils flairaient dans l’espoir de percevoir une odeur de sang. Le vaincu grogna quelque chose. Avec prudence, Ombre le libéra, et il réintégra le cercle après avoir ramassé son épée.

Elle se redressa, et retira le sable de ses vêtements déchirés et imbibés de sang séché. Toujours incertaine, elle attendit. Un second dragonien l’approcha, et fut vaincu en peu de temps. Un troisième prit le relais.

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