Chapitre 43 - C'est la fin

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J’entends dans ma tête les mots de son ex résonner « Attention à toi, ce connard te brisera le cœur » tandis qu’autour de moi le monde tourne au ralenti. J’entends à peine les voitures de police repartir. En quelques minutes, il n’y a plus que nous et l’agent sur le trottoir.

Je n’arrive pas à regarder Matéo même si je sens ses yeux inquiets posés sur moi. Lorsque je perçois sa main se poser sur mon épaule, c’est comme si j’avais reçu une décharge électrique. Je me dégage de son geste puis je recule loin de lui et de ma mère. Je ne veux pas l’entendre déblatérer des excuses, alors je prends les devants.

- Je n’arrive à croire que tu m’ais menti alors que tu avais promis le contraire, je réussi à dire la voix tranchée de sanglots.

- Tina…

- Non ! je crie pour l’empêcher de poursuivre. Tout devient clair maintenant. Tu étais au courant de cette merde depuis tes dix-huit ans. Tu n’as pas hésité à dire qu’il n’y avait rien en me regardant dans les yeux.

S’il s’est emporté contre les Rochefort à Cannes c’est parce que même s’ils ne les connaissent pas, Matéo a vite compris leurs insinuations. Il n’était pas non plus à l’aise avec mon oncle parce qu’il voulait entrainer mon père dans de nouvelles escroqueries. J’en veut également beaucoup à mon père qui nous a fait croire que nous étions une famille unie à l’abris des problèmes.

- Je t’en prie laisse-moi t’expliquer, me supplie-t-il. Je n’ai rien dit pour ne pas que tu souffres.

Et bien c’est raté mon coco car tu viens de me briser le cœur. Je ne supporte pas ce genre de comportement où tout n’est que mensonges. Mes larmes coulent sans retenue sur mes joues et je suis possédée par la colère ainsi que la tristesse.

J’ai vraiment le sentiment d’avoir été trahie en premier par ma famille puis par l’homme que j’aime. La sensation qui me brule la cage thoracique est indescriptible et seules les personnes victimes de trahison peuvent comprendre.

Matéo tente une nouvelle approche en voulant me caresser les cheveux mais j’esquive son geste. Je parviens enfin à lever les yeux sur lui mais la seconde d’après je regrette. Son regard est rempli de peine et de regret.

Je ne parviens tout de même pas à lui pardonner de m’avoir caché quelque chose d’aussi énorme. Je ne lui laisse pas le temps de dire quoi que se soit que je prononce la sentence finale qui achève d’écraser les derniers morceaux de mon cœur brisé.

- Je ne peux pas te pardonner de m’avoir fait autant de mal. Je ne veux pas être avec quelqu’un qui me mente en me regardant dans les yeux.

Sans hésiter, je franchis la distance qui me sépare de la porte. Je rentre puis je la claque comme pour signifier que c’est la fin de quelque chose. Je m’effondre sur le lit de ma chambre puis je laisse le bruit de mes pleurs envahir le calme de la pièce.

Lorsque je n’ai plus assez de larme pour pleurer, je décide d’aller dans le salon. Ma mère prépare quelque chose de chaud dans la cuisine mais elle a perdu son ton sévère habituel. À présent, elle semble complètement abattue et n’a même pas fait attention à ma présence.

Je ne tarde pas à me manifester et elle sursaute légèrement. Je peux voir dans son regard qu’elle aussi a pleuré mais pour des raisons un peu différentes.

- Tu ne savais pas, je prononce d’un ton absent.

Cela est une affirmation et pas une question car je sais que mon père est très secret en ce qui concerne son entreprise bien que ma mère y travaille. C’est la seule personne a qui je n’en veux pas dans cette histoire sombre.

- Nous avons été bien naïves, soupire-t-elle en me servant une tasse de thé fumant. Monsieur Lemaitre m’a expliqué quelques détails quand tu étais en train de te disputer pour Matéo. Ton père savait pourquoi il était parti et c’est pour ça qu’il a été compatissant. C’est ton oncle et son géniteur qui l’ont embarqué dans cette histoire d’après les documents. Cela faisait longtemps que ce trio travaillait ensemble et ils n’ont pas pu refuser les offres mafieuses des Rochefort. Maintenant nous en payons tous le prix.

La seule chose qui m’a marqué dans sa longue tirade c’est le nom de Matéo. Ce nom résonne en moi, alimentant ma tristesse. Je ne peux m’empêcher de pleurer à nouveau et pour la première fois depuis longtemps, ma mère me prend dans ses bras dans le but de me calmer.

Je reste quelques minutes dans ses bras avant de me libérer de son étreinte réconfortante. Je ne parviens pas à boire mon thé car je tremble encore.

- Ne lui en veut pas, me conseille-t-elle. Je sais que tu pleures surtout pour lui mais je suis sûre qu’il avait une bonne raison de te cacher la vérité.

- Je ne sais pas, je bredouille. C’est comme si quelque chose était cassé entre nous et je ne sais pas si je pourrais le réparer. J’ai tellement mal que le simple fait de penser à lui me donne envie de pleurer à nouveau.

Le poids de la trahison ne me quitte pas mais ma petite confidence me permet de mettre des mots sur mes ressentis. Je parviens à finir mon thé puis je regarde l’eau scintillante de la piscine à travers la baie vitrée.

- Qu’allons-nous devenir ? je demande comme si le monde pouvait s’effondrer du jour au lendemain.

- Nous perdrons la moitié de notre fortune pour payer les amendes et les frais de justice, avoue-t-elle en versant une larme. Ton père sortira de prison dans plusieurs mois après son procès. La seule bonne nouvelle est que nous gardons notre maison et nos voitures. Mais le pire c’est que nous n’avons plus les moyens de payer Maria pour faire à manger donc elle fera uniquement le ménage une fois par semaine.

- Donc nous vivons comme des riches mais nous sommes pauvres, je soupire pour moi.

Je n’ai jamais aimé ma mère plus que ça mais la voir dans cet état de laisser aller qui ne lui ressemble pas, libère mon empathie. J’ai envie d’être gentille avec elle et de la soutenir. Je vois qu’elle est aussi affectée que moi par le licenciement de Maria. Cela signifie que je ne la verrais plus beaucoup.

- Toute la ville ne va pas tarder à être au courant de cet incident, continue-t-elle sans joie. Prépare-toi car le pire est encore à venir.

En effet, quelques heures après l’arrestation de mon père et de ses acolytes, les commentaires sur les réseaux ne se font pas attendre. Plusieurs articles parlent déjà du scandale et je pense que les Damas doivent se réjouir d’une si belle chute.

J’ai passé beaucoup de temps dans mon lit à regarder une série pour éviter de me concentrer sur les commentaires horribles que j’ai pu croiser. Je discute un peu sur le groupe Messenger avec Irina, Laura et Anne-Lise qui me soutiennent et proposent une soirée entre filles.

Après avoir annoncé ma rupture avec Matéo, je descends au salon pour retrouver ma mère et à ma grande surprise Alma. Ma mère n’a pas été là il y a dix ans mais notre voisine veut absolument l’aider dans ses moments difficiles : cette femme est vraiment une belle personne.

Je salue brièvement Alma avant de chercher un truc à grignoter. Je ne préfère pas m’attarder pas dans les environs car je viens de me rendre compte qu’elle a les mêmes yeux que son fils. Je réprime un sanglot qui commence à monter et rejoins ma chambre avec un paquet de biscuits à la main.

Je reste quelques heures dans ma chambre puis je redescends lorsque ma mère appelle pour le diner. Alma n’est plus là et je vois sur la table une ribambelle de sushi. Je ne m’attendais pas à ce qu’elle cuisine dans ces circonstances alors je m’installe sans faire de commentaire.

- Personne du club ne m’a encore appelé, avoue-t-elle. Mais, je ne m’attendais pas non plus à recevoir quoi ce soit étant donné la gravité de la situation. Je pense que nous pouvons dire au revoir à ces gens car nous n’avons plus la fortune ni la dignité pour les fréquenter.

- Et on s’en portera beaucoup, je rajoute. Crois-moi que si mon père est impliqué dans des histoires suspectes, certains de ces gens aussi et ils ne veulent pas être associer à mon père qui lui s’est fait prendre.

- Je ne cautionne pas les actions de ton père mais je commence à lui en vouloir de moins en moins car il a fait ce que tous les hommes à se place aurait fait : il s’est laissé tenter par l’argent, explique-t-elle avec une philosophie nouvelle.

- Je ne peux m’empêcher de me sentir trahie par ses deux hommes et je ne sais pas si je parviendrais à avoir la même relation qu’avant.

Ma mère ne rajoute rien et me laisse dans mes réflexions. Le reste du repas spécial Japon se déroule dans le silence et chacune semble absorber dans ses propres pensées. Il est vrai que seul le temps pourra nous aider à surmonter ses obstacles mais pour l’heure, je suis incapable de rencontrer mon père en prison. Je laisserais donc le soin à ma mère de lui faire honneur de sa présence chaque semaine pour qu’il se sente moins seul.

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