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 La cuisine et le modeste salon qui s’ouvraient sur l’entrée baignaient dans la lumière orangée du soleil couchant.

 Gianni sortit la plus grande planche à découper qu’il possédait et saisit le couteau à trancher. Il rinça les deux artichauts à l’eau clair et entreprit leur découpe. Quand le premier retomba en deux faces égales, il soupira. Le légume était si déshydraté que le centre s’était creusé, n’offrant pas le plaisir de déguster ce cœur si convoité. La découpe du second ne lui apporta guère plus de réjouissance. Contraint au jeûne, le vieil homme se réconforta en sortant une bouteille de Dalmore déjà bien entamée.

 Il s’en servit un verre généreux et s’installa dans le rocking-chair qui trônait devant la baie vitrée du salon. De là, une large vue s’ouvrait sur les terres qu'avait cultivées Gianni autrefois. Avec Alba, ils s’étaient toujours dit que pour rien au monde, ils ne vendraient ce terrain, pas même lorsqu’il serait temps pour eux de partir en retraite. Rosabella, une fois grande et avec leur futur gendre peut-être, aurait repris l’exploitation, pour en faire une sorte de tradition familiale.

 Gianni contempla un moment cette étendue de liberté qu’il avait désirée si jeune et vécut toute sa vie.

 Au loin, le soleil déclinait toujours plus, n’éclairant plus qu’une petite partie des anciens champs aujourd’hui laissés au repos. Gianni prit une lampée du liquide ambré et jeta un œil à la console qui lui faisait face. La tablette était parsemée de photos de Rosabella et Alba. Elles posaient au milieu des champs de blés d’or, dans le parc fleuri qui jouxtait la mairie, ou encore sur une des plages de Syracuse où ils partaient souvent en vacances. Même en de simples clichés, leurs sourires avaient le don de faire remonter les commissures de Gianni malgré le chagrin qui l’étreignait aussi, à leur simple vision.

 Gianni porta le verre à ses lèvres et en vida le contenu d’une traite. Il se balança sur sa chaise avec entrain, laissant son esprit voguer aux souvenirs d’un bonheur trop peu savouré.

 Perdu dans le temps, il ne sentit pas le mouvement de balancier ralentir et se stopper. L’éthanol qui voguait maintenant dans ses veines produisait un effet similaire. Ses paupières s’alourdissaient un peu plus à chaque seconde. Inutile de lutter, le sommeil était tout proche.

 Alors, il ferma les yeux sur les portraits des deux femmes de sa vie.

 Au loin, le soleil passait enfin derrière le bosquet qui entourait la propriété, laissant le monde de Gianni s’apaiser de sa ferveur.

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