Chapitre 54 : Clarté

16 minutes de lecture

“Profite de ton congé pour récupérer tes heures, et soigne ta peau (surtout pas de gras). Je te veux au top de ta forme ! Bon repos.”

***

Au lit et cerné par le manque de sommeil, Billy jeta un regard à son reflet. Il séjournait dans un hôtel à Saint-Germain, heureux d’avoir quitté la caravane du tournage pour quelques jours. L’habitude l’avait levé bien avant l’aube, tenant le rythme pour son premier film. Ce fut sans étonnement qu’il lu le message de son agent quelques heures plus tard. Il devait travailler sa forme et son apparence, en accord avec son personnage.

Billy jouait un ado de dernière année, typiquement le bad boy imbu de lui-même gagnant en sens moral à la fin du film. Celui-ci était à la destination d’un public adolescent, aux jeunes demoiselles plus précisément. Les bouclettes qu’il avait déjà envie de couper joueraient en sa faveur dans le rôle du méchant. Conscient d’avoir été choisi pour plaire, il avait saisi l’opportunité de démarrer une carrière dans le cinéma.

Conscient de devoir se reposer, Billy n’en fit rien. Sur le coup de dix heures, il se couvrit pour sortir. La fine pluie qui tombait du ciel gris lui rendit service. Encapuchonné sous son parapluie, il se fraya aisément un chemin entre les silhouettes pour rejoindre un taxi.

  • Je vous conduis où, jeune homme ?

À vingt-et-un ans, Billy avait perdu l’habitude qu’on le considère comme un simple garçon. Le chauffeur le voyait-il étudiant ? S’il l’avait été, il aurait choisi une autre branche artistique, comme le dessin.

  • Montparnasse. Vous pouvez m’arrêter à la gare, merci.

Une petite balade s’imposa. Les cliquetis sur la toile l’apaisèrent. De même que l’odeur épaisse du tarmac mouillé mêlée à la fraîcheur matinale. Ou la peinture ? Billy n’en avait jamais fait que durant son enfance. Les souvenirs l’amenèrent à s’enfoncer dans les ruelles. Il se remémorait les réunions régulières de ses parents devant Saint-Clair, d’autres visages lui apparaissant aussi flous que l’aquarelle. Parmi eux, une blonde, bruyante, armée d’un énorme sourire. S’en serait-il rappelé s’il n’avait pas connu Kimi par la suite ? La femme et l’adolescente se ressemblaient tellement. S’il n’y avait pas cette similitude, jamais il n’aurait envisagé l’impensable. Le fantôme de la mère de Kimi sous les yeux, Billy serra le manche en bois de son parapluie.

Emmitouflée, elle sortait de ce qu’il avait deviné être au fil des jours son atelier. La boutique présentait une devanture simple et vitrée. Des meubles anciens décoraient la pièce, d’autres attendant d’être rafraîchis, à côté des ornements décrochés de leurs toiles. Paysages et portraits s’invitaient au bazar artistique. Une affiche collée à l’entrée renvoyait au parc des expositions. L’artiste se prénommait Lana. Billy s’avança tandis qu’elle fermait à clé. Elle passait sa capuche avant de tressaillir, la pâleur tombant sur son visage en même temps que ses tripes dans son estomac.

La main déposée contre son torse, la surprise l’envahit, et ses rictus rendirent un semblant de sourire à Billy avant de se détourner de son attention. Dans une situation pareille, il n’obtiendrait rien, sinon en y allant franco :

  • Je sais que c’est vous.

Ingénue, elle se retourna :

  • Pardon ?

Le ton aurait pu le convaincre, s'il n’était pas sûr de lui.

  • Vous êtes Alicia.
  • Excuse-moi, garçon, mais tu te trompes de personne.

Elle jouait si bien qu’il aurait aimé la croire. D’un franc sourire, elle le salua et disparut à son tour sous son parapluie.

  • Attendez ! Je sais que c’est vous, insista-t-il, alors qu’elle partait en retrait. Lorsque je vous ai vu la première fois, je me suis rappelé que j’avais connu une femme durant mon enfance…

Tel un piquet de grève, la blonde resta droite.

  • … Une femme qui ressemblait à Kimi, bien qu’en réalité, c’est l’inverse.
  • Je ne veux pas paraître grossière, répondit-elle de son air le plus concluant. Mais je suis importunée. Tu te trompes de personne. C’est vrai, car je ne connais personne de ces noms-là. Donc si tu veux bien, j’ai un enfant à aller chercher à l’école bientôt.
  • C’est faux, rétorqua-t-il du tac au tac. Quelqu’un le dépose devant votre appartement tous les jours après l’école.

Billy avait mené son enquête, retraçant les pas de la femme depuis l’endroit où il l’avait vue la première fois.

  • … Vous m’avez suivi ?
  • Je n’en suis pas forcément fier, mais je devais en avoir le cœur net, avoua-t-il.
  • J’appelle la police, déclara-t-elle, aussitôt fouillant dans son sac.
  • Si vous les appelez, je leur dirai que vous portez une fausse identité.

Le téléphone à découvert, mal à l’aise, elle émit un rire. Billy croyait au coup de bluff. Il profita du temps où elle essaya de trouver une échappatoire pour la mettre au pied du mur :

  • Je ferai en sorte qu’ils me croient, quitte à utiliser mon nom, pour une fois. Je suis un Makes après tout.

Certain de l’avoir piégée, il la vit lever les yeux au ciel. Son regard devint fade. Elle perdit tout du personnage naïf.

  • Je n’en doute pas. C’est ce que font les Richess, “après tout”.
  • Moi non plus, je préférai ne pas utiliser mon statut. Accordez-moi du temps et…
  • Et si je n’en ai aucune envie ? Cela ne t’a pas traversé l’esprit, Billy ?
  • Vous vous souvenez de moi, dit-il en souriant. Écoutez, j’ai besoin de comprendre, alors à défaut d’appeler la police, si vous ne me dites rien, je raconterai à Kimi que j’ai trouvé une femme ressemblant à sa mère. Sinon, j’en parlerai à ma mère ou… aux Richess ? Je suis certain qu’eux aussi m’écouteront.

Les traits d’Alicia se resserrèrent.

  • … Parce que si je te raconte comment j’en suis arrivée là, tu n’iras pas le répéter ?
  • Cela dépend. Que préférez-vous ? Me le raconter à moi, avec le risque que j’en parle à mon tour, mais aux Richess, à votre famille, à Kimi… Ou bien de voir la police débarquer chez vous ? Après tout ce que vous avez reconstruit… J’imagine que…

Il entendit à son soupir que cette dernière réflexion l’eut à l’usure :

  • Très bien. Suis-moi.

***

Billy avait décliné l’offre d’Alicia d’aller boire un café en ville. Il préférait découvrir l’endroit où elle habitait, utilisant sa renommée comme excuse. Si les fans les prenaient en photo, les clichés remonteraient jusqu’à son pays de naissance et sa couverture s’envolerait.

De l’extérieur, l’appartement ne payait pas de mine, mais en entrant, la première chose que Billy vit fut la vue que lui offrait sa fenêtre principale. Depuis son balcon, elle pouvait voir la tour Eiffel danser au loin.

  • Vous payez cher le loyer ?
  • … C’est ma stabilité financière qui t’intéresse ?

Aussi sévère qu’une maîtresse d’école, elle se débarrassa et l’invita à faire de même. Face à l’ancienne amie de sa mère, Billy redevenait un petit garçon. Un deuxième vivait décidément ici, la peinture s’immisçant autant dans le foyer que sur son lieu de travail. Des toiles colorées et maladroites, accrochées au-dessus de la télévision, avaient retenu son attention. Le salon tenait dans un coin. La cuisine dans un autre, à droite du mini hall d’entrée.

  • Veux-tu boire quelque chose ?
  • Vous offrez l’hospitalité à votre stalker ?
  • … Tu as raison. Assieds-toi où tu veux plutôt.
  • Je n’aurais pas dit non à un café, cela dit.

Contre toute attente, il la vit lui octroyer un léger coup d'œil et cinq minutes plus tard, ils se trouvèrent face à face, chacun un café réchauffant leurs mains. Il analysa plus longuement l’appartement. Alicia semblait avoir une vie simple. Il la trouva absolument normale. Trop normale, pour une femme censée être morte. Maintenant, il fallait aborder le sujet sensible.

  • J’aimerais que ça ne traîne pas en longueur, dit Alicia nerveusement. Je suis à peu près certaine que mon fils te reconnaîtra.
  • Vous savez aussi qui je suis aujourd’hui ?
  • Oui, et que tu tournes un film à Paris en ce moment même. Je me suis un peu renseignée sur tes activités, depuis que… Eh bien, depuis que je t’ai aperçu, expliqua-t-elle en prenant une inspiration, puis une gorgée de son café.
  • Madame… Je suis désolé pour tout ceci, mais j’ai besoin de savoir : comment se fait-il que vous soyez en vie ?

Instantanément, il la vit s’évaporer ailleurs.

  • Tu ne partiras pas tant que je ne t’ai rien dit, hein ? Sinon tu préviendras du monde autour de toi, le devança-t-elle. Sauf que tu le feras aussi une fois que je t’aurai raconté ?
  • Cela dépend. De ce que vous me direz.

Les paumes appuyées à sa tasse, Alicia plongea dans le liquide fumant, une longue réflexion s'ensuivit.

  • Tu sais, quand j’étais plus jeune, je n’avais pas l’esprit clair. Pas autant qu’aujourd’hui. Il y a des morceaux de l’histoire que je ne pourrais pas te raconter, mais ce que je peux te dire, c’est que j’ai feint ma mort, car il m’a semblé à ce moment-là qu'il s’agissait de ma meilleure option.
  • Est-ce que ça veut dire que vous… regrettez ? se permit-il de la couper, curieux de voir son visage se déformer par les remords, mais elle devint au contraire, plus dure.
  • C’est un poids. Que je ne pourrais jamais enlever de ma conscience.
  • Pourquoi est-ce que pour vous, c’était la meilleure solution ?
  • … Tu poses les bonnes questions, dit-elle en souriant amèrement. Tu vois, Billy, le truc, c’est que j’ai été très naïve. Il y a longtemps, je suis tombée amoureuse. D’un garçon qui était malade. Peut-être que tu te rappelles de lui ? De Louis ? Ce n’est pas si étonnant, releva-t-elle face à la négation. Tu étais tout petit. Je suis déjà étonnée que tu m’aies reconnue.
  • C’est parce que vous lui ressemblez tellement. À Kimi.

Il la vit se refermer.

  • Pardon, poursuivez.
  • Quand j’ai rencontré Louis, il s’isolait de tout le monde, car… il se préparait à mourir. Finalement, c’est moi qui suis morte, rit-elle.

Appuyée à la table, elle lava ce vilain sourire de son visage en y passant ses deux mains.

  • Excuse-moi, je ris nerveusement, parce que je me trouve tellement… bête à l’heure actuelle. Une des conséquences de son traitement était qu’il deviendrait fou et c’est pourquoi Louis ne prenait pas ses médicaments. Sauf que comme une idiote, je suis tombée amoureuse au premier regard et en comprenant que c’était réciproque, j’ai… fais ce que je savais le mieux faire. J’ai forcé la porte avec Louis et pour mon plus grand bonheur, il a décidé de reprendre ses médicaments. Vois-tu, j’ai été égoïste, alors que je n’aurais jamais dû.
  • Vous auriez voulu… ne pas vous mettre avec lui ?
  • … J'aurais voulu être plus forte.

Ils se fixèrent un instant.

  • Quand je suis tombée enceinte, je n’en revenais pas. D’abord, parce que ça signifiait avoir un enfant en même temps que tous mes amis, et puis surtout, car je me suis rendue compte que j’allais devenir maman et Louis, papa. Le fait d’avoir un enfant ensemble, cela nous a donné encore plus de raison de s’accrocher. On a vite déménagé tous les trois, pour en profiter le plus possible. Au début, ça allait, puis… c’est devenu parfois compliqué. Vivre avec la maladie, c’était des hauts et des bas constamment, mais nous avions foi en le fait qu’un jour les médecins trouveraient un traitement adapté.

Elle s’arrêta.

  • Sauf que non. Malgré tous nos efforts, Louis devenait de plus en plus… étrange, puis violent… Heureusement, il ne s’en était jamais pris qu’à moi.
  • Vous voulez dire, qu’il n’a jamais été violent envers Kimi ?

À chaque fois qu’il prononçait son prénom, il voyait le trouble s’installer chez Alicia. Elle le chassait aussi rapidement, acquiesçant.

  • C’est pour ça ? Que vous vous êtes fait passer pour morte ? Car Louis s’en prenait à vous ? Mais dans ce cas, pourquoi avoir laissé Kimi… ??
  • Ne t’emporte pas, s’il te plaît. Ce n’est pas pour cette raison. Pas uniquement. Très vite, j’ai perdu mon père. Il m’aidait énormément dans cette situation et de nombreuses fois, il a essayé de m’éloigner de Louis, mais… C’était mon mari. Je voulais le soutenir et je ne voulais pas éloigner ma fille de son père. Je voulais qu’on soit une famille, qu’on y arrive ensemble. C’est là que j’ai été naïve. Je n’aurais jamais dû, car une fois que mon papa est parti, j’ai perdu tout le courage et l’énergie que je possédais. Tout est parti, et à côté de ça, ma fille refusait d’être en contact avec son père et à juste titre, car Louis perdait de plus en plus le contrôle. Il me… frappait. C’est vrai, hocha-t-elle plusieurs fois de la tête comme pour encore s’en convaincre. Il abusait de moi également. Je sais que ça ne paraît pas logique vu que c’était mon mari…
  • Non. Des hommes violent leurs femmes. J’ai connu des amies dans cette situation.
  • Je suis désolée.
  • Et ensuite ?
  • Ensuite,… Je n’ai pas seulement commis une erreur. J’ai commis une faute. Une faute qui n’a fait que m’entraîner plus loin.
  • Qu’avez-vous fait ?

Elle se leva, récupérant les deux tasses à la volée.

  • Prends-tu un autre café ?
  • Non merci.

Alicia lui tourna le dos, le temps de déposer la vaisselle dans l’évier et de passer un coup de lavette près de la cafetière. Elle s’appuya sur le plan de travail.

  • J’ai couché avec un autre homme. Voilà ma faute.
  • Je ne comprends pas…
  • La suite est simple. Je n’avais jamais ressenti autant de remords de toute ma vie. J’y ai longuement réfléchi durant ces années loin de tout. Ce n’est pas seulement mon mari que j’ai trahi, mais aussi des amis, tout comme l’homme en question, et ma fille… J’ai été faible et le seul moment où j’ai cru trouver du réconfort, c’est sur l’instant même. Le reste n’a été que douleur. Je m’en suis tellement voulu, mais… Il y a eu pire. Mes règles se sont stoppées.
  • Vous êtes tombé enceinte, comprit Billy. De lui ? De votre fils ?

Elle se mit à effectuer les cent pas.

  • En plus d’avoir trompé mon mari, j’étais peut-être enceinte de l’autre homme. Je voulais que ça cesse.
  • … Au point de vous faire passer pour morte ?
  • Non. Au point de tenter de me suicider.

Cela jeta un froid glacial dans la conversation.

  • Je n’ai pas réussi. Louis est revenu plus tôt de sa ballade avec Kimi et l’infirmier et il m’a surprise…

Billy déposa sa main au niveau de ses lèvres.

Elle avait voulu se donner la mort avec son enfant.

  • Évidemment, il m’en a empêché. Avant ça, il a ordonné à Kimi de monter dans sa chambre, mais j’imagine… qu’elle devait avoir envie de savoir ce qui se passait. Je n’étais plus moi-même à ce moment-là. J’ai craqué.

Ce fut sa voix qui craqua ensuite. Elle se racla la gorge et reprit ses esprits. Quand bien même elle gardait la face, Billy crut voir de la peine dans ses yeux.

  • Porter ce secret, c’était trop lourd, et en même temps, je ne voulais pas le dire. Après tout ce qui s’était passé dans ma vie, tous ces mauvais choix, ces regrets et puis Dossan se montrait si présent pour Kimi que… J’ai voulu disparaître, tout en ayant la certitude qu’elle finirait entre de bonnes mains. Mais avec la panique, j’ai fini par tout lui avouer et Louis… est devenu dingue. Vu ce qu’il venait d’apprendre, ce n’était pas étonnant. J’ai essayé à nouveau et Louis était encore assez conscient pour m’arrêter. Jusqu’à ce qu’il voie le sang. Cela a toujours été un déclencheur. Alors, il m’a fait ça, dit-elle en montrant la cicatrice à son cou. Ce n’était pas si profond, mais j’ai perdu beaucoup de sang et puis connaissance. Pas assez vite pour ne pas voir Kimi arriver.

Enfin, elle prononçait son prénom.

  • Je me rappelle si bien… de son regard à ce moment-là, dit-elle les traits serrés. Dans ses yeux, j’ai vu la mort. J’ai cru que c’était fini, moi aussi. Puis, tout s’est enchaîné si vite. Il l’a attaquée et je n’ai rien pu faire, car je me suis évanouie. Je me suis réveillée à l’hôpital avec le sentiment d’impuissance et là, j’ai découvert que nous avions tous survécu grâce à l’intervention de Dossan. Je parle de lui depuis tantôt, mais c’est…
  • Je sais qui il est.
  • Oh.
  • Car je connais Kimi.
  • Est-ce que ça veut dire qu’il a pris soin d’elle ?
  • Oui. C’est son père adoptif.

Le soulagement se lit sur son visage.

Elle reprit place à table.

  • C’est là-bas que j’ai pris ma décision. Pour avoir expérimenté la mort, je n’ai pas voulu retenter. Par contre, je me sentais toujours aussi mal, incapable, impuissante, et comme la pire femme au monde…

Billy la regarda de plus en plus sévèrement.

  • Comme la pire mère, alors après tout ce que nous avions dû supporter, j’ai jugé bon de disparaître. Pour toujours. Je préférai encore partir plutôt que d’être une épine dans leur vie. Je sais. C’est atroce.

Il transforma ses pensées intrusives en questions pratiques :

  • Dossan est-il au courant ?
  • Personne ne le sait.
  • Dans ce cas, comment avez-vous fait pour changer d’identité ? On ne disparaît pas en claquant des doigts. À moins que vous ayez demandé de l’aide à un Richess ?
  • Je t’assure, Billy, que si je m’étais appuyée sur un Richess, je ne serais pas là aujourd’hui. Ils m’en auraient dissuadés.
  • Dossan, alors ?
  • Le connaissant, il aurait tout fait pour me réunir avec Kimi.
  • Et pourquoi pas ? Pourquoi ne pas avoir emporté Kimi avec vous ? Vous auriez pu la retrouver par la suite ?
  • J’ai feint ma mort. Aux yeux de tous, je suis décédée et enterrée, donc...
  • Vous auriez pu l'enterrer aussi.
  • Dossan était à son chevet quand elle s’est réveillée et je préférai le garder loin de tout ça.
  • Pourquoi ?? s’énerva Billy.

Alicia garda son calme.

  • Comme je te l’ai dit, plus jeune, je ne voyais pas clair. Encore moins après ma tentative. La seule chose qui m’importait à ce moment-là, c’était de disparaître le plus loin possible. Je voulais juste me cacher dans un énorme trou et ne plus jamais en sortir, changer complètement de vie, parce qu’après toutes ces épreuves et les conséquences que cela a engendré de coucher avec… cet homme…
  • C’est avec Dossan que vous avez couché, n'est-ce pas ? Pas besoin de nier. Je le vois dans vos yeux.

En effet, ils reflétaient une culpabilité immense.

  • Est-ce qu’il est de lui ? Votre fils ?
  • ... Faire un test était trop risqué. Aujourd’hui, il me ressemble beaucoup, mais il a aussi des traits de Louis...
  • Billy pensa qu'elle ne pouvait en être certaine.
  • Puis-je vous demander pourquoi vous avez décidé de le garder ? Alors que vous étiez prête à partir avec lui ?
  • Une fois ma décision prise… hésita-t-elle. De partir loin, je veux dire. Je n’ai plus eu le courage de m’en détacher, car il est tout ce qui me reste de mon ancienne vie.

Il se mordit l’intérieur des joues.

C'en était trop.

  • Vous savez quoi, Alicia ? Je vous ai bien écouté et votre histoire est vraiment triste. Je comprends que vous n’aviez pas l’esprit clair autrefois. Seulement, vous ne voyez pas mieux aujourd’hui, car votre fils n’est décidément pas tout ce qui vous reste de votre ancienne vie. Kimi existe encore. Peu importe à quel point vous en avez fait le deuil. Vous n’êtes pas la seule à avoir souffert.
  • Je le sais.
  • Alors pourquoi faites-vous comme s’ils n’existaient plus ?
  • Car je n’existe plus.
  • Mais ça, c’est vous qui l’avez bien voulu. Vous êtes partie. Vous avez abandonné votre fille, en la laissant entre les mains d’un autre. Vous vous rendez compte ? Comment pouvez-vous être certaine qu’elle est heureuse avec Dossan ? Vous n’en avez aucune foutre idée. Voilà, la vérité : c’est une belle punition, mais je vais vous le dire moi. Droit dans les yeux, je vous confirme que c’est le cas. Pour le peu que j’en ai vu, j’ai été charmé par sa relation avec Dossan. Il s’en dégage quelque chose de fort. C’est parce qu’il l'a recueillie, et tant mieux, mais là où vous êtes aveugle, c’est que vous minimisez votre absence dans sa vie, car vous la croyez entre de bonnes mains. Vous avez tort. Je ne connais Kimi que dans les grandes lignes, mais je sais que derrière ses airs de battantes, il y a une fille fragile. Comme tout le monde, elle s’est certainement faite à l’idée que vous étiez morte, mais elle est encore jeune. Contrairement à vous, votre disparition, elle ne l’enterrera jamais. Vous êtes sa mère. Votre deuil, elle le vit au jour le jour, car c’est ainsi qu’elle aurait normalement dû vous connaître, et c’est une ado. Une ado qui grandit sans sa maman, sans la figure maternelle que toutes les autres filles de son âge possèdent… Elle a Dossan, mais elle ne vous a pas, vous. Au moins, vous pouvez être rassurée. J’aurai pu lui dire que vous existez encore, sauf que je ne veux pas participer au fait de lui briser le cœur une deuxième fois. Je préfère qu’elle croie que sa mère est morte plutôt qu’elle se rende compte qu’elle l’a abandonnée. Ce n’est pas à moi de lui dire. Ça, ce sera votre job à vous, sinon je préfère en tout point que vous ne restiez qu’un souvenir.

Billy prit congé de sa place, écrasant Alicia d’un regard lourd sens. Cette dernière finit par relever la tête.

  • C’est bien pour toutes ces raisons que je ne suis jamais revenue.

La réponse le fâcha. Il récupéra ses affaires.

  • Vous ne savez pas ce que vous manquez, mais cela ne regarde plus que vous. Au revoir… “Lana”.

Dès l’instant où il prit la porte, l’imposteur laissa couler ses larmes en silence.

  • Ah, et une dernière chose…

L’aîné des Makes fut secoué de la voir pleurer. Elle ne s’en cacha pas, autant déboussolée.

  • Oui ?
  • Je... vous invite à jeter un œil à mon dernier clip. Peut-être que vous y verrez plus clair ensuite.

Il partit pour de bon.

Dans la cage d’escalier, Billy croisa un jeune garçon tout blond. Il le scanna en même temps que ce dernier tomba des nues en voyant le chanteur. Effectivement, il n’avait rien de Dossan.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 3 versions.

Vous aimez lire Redlyone. ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0