chapitre 5

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Je suis encore allongée, groggy après un si long sommeil, lorsque j’entends, par ma fenêtre ouverte, une voiture avancer sur les graviers de la cour, puis Massimo et Vincent s’entretenir en italien sur le perron :

— Comment va-t-elle ?

— Affaiblie, sous calmants, mais le médecin est optimiste. Je lui avais dit que ce serait trop difficile pour elle.

Puis plus fort :

— Où elle est, l’autre ?

J’ai à peine le temps de me redresser sur les oreillers qu’il est déjà là, dans l’encadrement de la porte, haine et dédain incarnés :

— T’es une traînée, une droguée, une meurtrière. Tu as monté la famille contre moi. Et maintenant tu débarques et tu détruis ce que j’ai de plus cher ? C’est Adelina qui a voulu te prendre, moi je t’aurais laissée à la clinique. Je vais te rendre un dernier service : je vais te fourrer dans un établissement loin d’ici, dont tu ne sortiras plus. Je ne veux plus jamais entendre parler de toi.

Du jour d’après, je ne me souviens de rien. En fin d’après-midi, Massimo frappe à la porte de la chambre, en casquette, cravate, chaussures cirées, impénétrable à son habitude :

— Mademoiselle, il est l’heure de vous emmener à votre consultation.

J’enfile mes sandales et lui obéis.

Je me retrouve devant Elizabeth. Qui évalue rapidement le silence et l’attitude abattue qui lui font face et prend sa décision :

— Évelyne, vous avez à nouveau besoin de médication et de surveillance. Votre frère nous enjoint de procéder à votre transfert dans un autre établissement. Ce que nous ne saurions refuser puisqu’il en a le pouvoir. Cependant la comtesse Sanpierri...

Je n’identifie pas le nom de famille sur le moment.

— ... nous a appelés. En clair, elle nous demande de faire traîner le dossier, et de prétexter que vous n’êtes pas en état de voyager. Ce à quoi je ne suis pas loin de souscrire… Écoutez-moi bien, Évelyne.

Elle parle lentement et avec force.

— En tant que psychothérapeute, et en tant que femme qui s’est attachée à votre sort, je vais vous dire deux choses : d’abord que votre colère est normale et qu’elle fait partie du processus de réappropriation de vos sentiments. Madame la comtesse Sanpierri l’a bien compris, même si elle est très affectée par vos propos.

Je réalise enfin qu’il s’agit d’Adelina... Au prix d'un effort considérable je reporte mon attention sur mon médecin, qui continue son discours.

— D’autre part, je pense que cette personne peut représenter un élément déterminant de votre reconstruction. J’ai en conséquence pris la liberté d’échanger avec elle. Je crois que vous devriez écouter ce qu’elle a à vous confier.

Elle reprend une intonation plus formelle :

— Vous êtes dès à présent réadmise dans nos murs en raison de l’état psychologique dégradé dans lequel je vous vois aujourd’hui. Vous ne pourrez pas être transférée avant une semaine. Nous réévaluerons votre dossier en Commission.

Après un silence, elle poursuit à voix basse, s’assurant de mon attention :

— Adelina sollicitera de venir vous parler.

Voilà qu’elle utilise son prénom.

— Je pense et je veux croire que vous serez capable de faire un choix.

Une pause.

— J’ai terminé. Vous avez huit jours pour décider de reprendre l’avenir à votre compte, ou pas. Avez-vous compris ce que je vous ai dit ?

Je hoche la tête en répétant :

— J’ai huit jours.

Elle me jauge et murmure :

— Je reviens vous voir quoiqu’il arrive après-demain. Tenez-bon, Évelyne.

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