Dans un bus

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Quand on la voit comme ça, elle n’a l’air que d’une jeunette de plus. Ni moche, ni vraiment jolie non plus. Sûrement perdue dans des études sans fin, à la jeunesse qu’elle dégage. Une enfance qui semble en transition.

Son visage n’est ni triste, ni euphorique. Son humeur est diluée par la concentration et l’intérêt qu’elle porte à l’ouvrage dans ses mains.

Un de ses bras entoure une des barres verticales du bus et s’y accroche. Ses côtes se plaquent contre celle-ci. Elle invite l’équilibre à ne pas la quitter.

Son natel se fait une place entre ses doigts et la couverture du livre. Une gourde, tout juste maintenue, par l’anse du bouchon, s’amuse sur une balançoire imaginaire.

Elle porte des vêtements larges, dans des teintes foncées. Ses chaussures sont toutes simples et n’ont pas de lacets. L’ensemble me fait penser que l’unique intérêt qu’elle porte à ses habits est d’en avoir. Ça a l’air confortable de s’habiller ainsi.

Deuxième point qui m’aiguille sur la théorie de l’étudiante : cet imposant sac à dos, qu’elle porte sur une seule épaule. Le poids de celui-ci aimerait d’ailleurs bien l’y déloger. Mais les réguliers balancements d’épaules imposés par la jeune fille remettent la sangle à sa place, éradiquant tout espoir de fuite. Trouvant ce petit jeu d’équilibre amusant, un autre sac s’y est invité, battant contre ses jambes, ses lanières reposant au creux de son coude.

Mais rien ne semble pouvoir la déloger de son petit monde.

Elle dégage un puissant calme, qu’il m’est impossible de définir comme propre au lieu où elle se trouve ou à sa personnalité.

Elle a pris un peu de distance avec le monde, enfilant des écouteurs au fil d’un bleu légèrement immonde. Une musique tourne dans ses oreilles, et chaque seconde, j’ai envie de l’entendre.

Le bus amorce un virage. Un de ses pieds se soulève imperceptiblement, comme pour se stabiliser. Elle n’a pas l’air de s’en rendre compte. Elle doit connaître ce trajet.

Soudain, l’histoire qu’elle suit paraît moins importante. Je la surprends à murmurer quelques bribes d’un air. La distance m’empêche de réellement reconnaître quelque chose.

Elle n’arrête pas de toucher à ses cheveux. Ses lunettes aussi. Tandis que les premiers glissent devant son visage, les secondes s’échappent de son nez. Conséquence de la position inclinée de sa tête.

Subitement, elle sourit, relève celle-ci. Ses yeux s’éclairent.

Une phrase, une pensée ? Quelque chose l’anime tout à coup et elle en profite.

J’aimerais pouvoir la connaître vivante, comme elle l’est, à l’instant. Attrapant à pleines mains les petits moments de joie. Et où émane d’elle cette sérénité.

Contredit par ces instants de passion, de concentration, où la chute semble pouvoir la gagner à chaque seconde.

Son regard croise le mien. Le marron de ses iris me fait baisser les yeux.

Quand j’ose à nouveau regarder devant moi, elle n’est plus là.

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