CHAPITRE 6

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CHAPITRE 6

CHAPITRE 6

La jeune fille attacha le tablier autour de son cou et de sa taille, puis délia son petit ballot de lin. Elle en retira une poignée de radis, un beau citron et un pot de miel de fleurs de prairie. Elle râpa, trancha, pressa puis mélangea les ingrédients dans un récipient de terre avant de les verser dans l’eau qui bouillait à feu doux. La décoction prête en quelques minutes, Blanche-Prudence la versa dans un autre pot de terre, puis astiqua le plan de travail et essuya la casserole de cuivre.

— Voilà madame, j’ai terminé. Merci de m’avoir permis d’utiliser vos ustensiles de cuisine.

— Hum... Pas madame, mère Gontrande, précisa la matrone qui tranchait des os de poulet. Ici, tout le monde m’appelle comme ça.

— Bien, mère Gontrande, moi c’est Blanche-Prudence. Merci à vous. Au-revoir et... au-revoir Anophèle.

— Au-revoir m’dame.

La jeune fille repartie en direction des appartements de Philibert-Armand en faisant bien attention de ne pas renverser sa mixture. Elle arriva à la porte et sourit aux deux gardes en faction, qui prévenus de son retour, lui ouvrirent le passage.

— Me voici votre Altesse. J'espère ne pas vous avoir fait trop attendre ?

— Nullement, nullement. Où en sommes-nous de notre affaire ?

— Voici une décoction de radis, de citron et de miel à consommer une fois par jour au réveil.

— Du radis, dites-vous ?

— Oui, essayez, vous ne serez pas déçu du résultat.

— Fort bien. Merci de votre sollicitude.

— C'est bien normal votre Altesse. Au Pays de Providence, riches ou pauvres, tous ont le droit d'être soigné.

— Quelle sagesse pour une aussi jeune demoiselle !

— La sagesse est donnée à celui qui sait en faire un bon usage votre Altesse.

— Sage et dévouée, vous êtes décidément un don de Dieu !

— Merci votre Altesse, mais à vous aussi il a été beaucoup donné. Vous avez de magnifiques jardins et vous habitez dans un endroit splendide.

— Oui, mais cet endroit est mon tombeau. Je m'y ennuie et la maladie m'y enferme depuis l'enfance...

Émue par la soudaine tristesse du Prince, Blanche-Prudence détourna la conversation.

— Votre Altesse, voici pour vous un petit pot de miel. Quelques cuillerées dans de l'eau chaude pour une inhalation. Cela décongestionnera vos sinus et dégagera vos voies respiratoires.

— Je le ferai. Je le ferai, je vous le promets.

— Très bien. Alors je vous laisse maintenant.

— Bien et... merci beaucoup.

— Que Dieu bénisse votre Altesse.

— Et qu'il fasse prospérer vos talents.

Étant donné qu'un grand bal devait clôturer la cérémonie de mariage, Berthe-Conteuse décida le deuxième jour, d'initier les trente à quelques danses en usage à la Cour. Aidé d'un maître chorégraphe, l'après-midi fut consacré à l'enseignement de la gavotte et du menuet. Plus ou moins doués dans l'apprentissage des techniques de base, certains assimilèrent très vite les pas élémentaires et prirent plaisir à danser en solo ou en couple, quand d'autres s'entraînèrent encore et encore sans parvenir à enchaîner deux mouvements à la suite.

Facile ou laborieuse, la formation proposée par Berthe-Conteuse fut un moment joyeux apprécié de chaque participant. Le soir au souper, prolixes et rieurs, plusieurs des trente retracèrent l'expérience entre eux et avec les souverains, puis remercièrent la Princesse pour l'heureuse initiative et le temps sacrifié.

Le troisième jour.

Le matin du troisième jour, Blanche-Prudence déclina l'activité jeux de cartes, de hasard, d'esprit ou d'adresse organisée par Berthe-Conteuse pour satisfaire les trente. Elle préféra la compagnie de mère Gontrande et d'Anophèle dans la salle de préparation, et en profita pour remplir ses récipients de terre. L'après-midi, c'est avec joie qu'elle accepta la promenade commune avec un garde-forestier qui répondit gentiment à toutes ses questions sur la flore environnante.

Alors que l'après-midi tirait à sa fin, le Prince Philibert-Armand fit appeler Blanche-Prudence.

— Votre Altesse, vous m'avez fait mander ? dit-elle en se courbant devant lui.

La venue de la petite paysanne dans sa chasuble bleue, ses cheveux d'or auréolant son doux visage aussi frais que la rosée du matin, procura un sentiment de bien-être au jeune homme.

— Oui chère demoiselle, confirma-t-il. Je souhaitais vous informer que vos inhalations de miel ont nettement amélioré ma respiration et que votre décoction à base de radis a considérablement réduit le sifflement de mes bronches. Je voulais vous faire part de ce grand bienfait et vous en remercier.

— Oh combien je suis heureuse ! C'est à moi de vous remercier de m'avoir fait confiance !

— Comment faire autrement ? Tout en vous, inspire confiance.

— C'est encourageant, mais si vous le permettez Altesse, nous allons poursuivre le traitement. Oui, car il ne s'agit pas simplement de soulager vos afflictions, mais bien de vous guérir.

— Une guérison ? Je n'ose y croire. J'ai subi tant et tant de désillusions à ce sujet, qu'aujourd'hui je considère mes souffrances comme une épreuve infligée ; un fardeau de Dieu à supporter ma vie durant.

— Que de fatalisme ! Votre altesse ne devrait pas s'avouer vaincu ! Ne saviez-vous pas que vos pensées influencent votre santé ?

— C'est vrai. C'est tout à fait vrai. Oh, Chère Blanche-Prudence, grâce à vous ce qui me paraissait impossible m’apparaît tout-à-coup comme... possible.

— Bien ! Votre confiance est importante pour ne pas dire essentielle ! Cela va contribuer à votre mieux-être et, je l'espère, à l'éradication totale et définitive de cette maladie qui vous accable depuis le sein de votre mère.

— Vous me donnez l'envie d'y croire Chère Blanche-Prudence. Dites-moi ce qu'il faut faire. Quel traitement voulez-vous me soumettre ?

— Nous allons procéder par étapes et nous verrons l'évolution selon ce qu'il vous sera demandé de faire ou d'avaler. Maintenant, après la décongestion et l'arrêt de vos sifflements, j’envisage d’assainir vos voies respiratoires et calmer votre toux.

— Bien. C’est entendu.

— Je m'en vais de ce pas vous préparer le remède adéquat. Octroyez-moi un quart d'heure et je reviens vous l'apporter.

— Fort bien. Je vous attends.

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