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Arrivé dans la pièce sécurisée, Kagi s’empressa de lire les parchemins. Il remarqua très vite qu’ils étaient numérotés.

- Kagi, explique ! Qu’est-ce qui s’est passé quand t’as touché la plante ?

Le caméraman leur conta son expérience, ce qu’Hito et l’inconnue lui avaient appris et les derniers jours du cordonnier. Puis, ils s'affairèrent à la lecture des parchemins.

- Il faut déjà les mettre dans l’ordre, sinon ça va être incompréhensible.

"14 mai 1814
Je prie encore et encore, de toutes mes forces, pour qu’il me rende ma famille. Je ne peux pas rentrer chez moi, les voir, sans aucune once de culpabilité, de tristesse pour ce qu’ils ont fait. Ils ne sont plus humains. Je resterais ici, dans cette chambre. Je me cacherais pour ne jamais les voir lorsqu’ils viendront prier ou faire des offrandes. J’ai peur de ce que je serais capable de faire, peur de moi-même et de ma colère. Je ne veux pas leur ressembler, je ne veux pas qu’ils ressentent à leur tour la perte d’un être cher, malgré ce qu’ils m’ont fait subir. Chaque jour qui passe est une torture. Je prie, je lui ai tout donné. Il me rendra ma famille."

"04 juin 1814
J’ai dû interrompre ma prière, je n’ai pas vu le jour se lever. J’ai entendu du bruit et j’ai couru ici. Ils pensent probablement que je me suis enfermé de nouveau chez moi. Ils n’ont toujours pas remarqué que j’habite désormais dans le temple. Je les entends parfois, rire et chanter dans les couloirs, ils me donnent envie de vomir. Ils ne regrettent pas ce qu’ils ont fait, ne comprennent pas ce qu’ils m’ont pris. Ils sont égoïstes et ignobles. Je ne veux plus jamais les revoir."

"27 juin 1814
Les jours passent et je commençais à avoir vraiment faim, j’ai été dans l’obligation de sortir me chercher à manger. J’ai croisé ma famille, qui me regardait partir. J’aurais voulu les toucher, les prendre dans mes bras. J’ai essayé de leur parler, mais je crois comprendre qu’elles ne peuvent pas. Ça m’a fait tellement de bien de les voir. J’ai bien pris soin de ne croiser personne du village, je suis sorti lorsque tout le monde dormait, au milieu de la nuit. Puis j’ai continué de prier pour le retour de ma famille."

"03 juillet 1814
Je pleure depuis des heures. Je les ai vus traverser la pièce d’à côté. Ma femme et ma fille. Si vous saviez à quel point vous me manquez ! Chaque jour passé sans vous est une torture. Chaque seconde passée loin de vous me tue à petit feu. J’arriverais à vous ramener à moi. J’arriverais à vous faire revenir. J’espère au moins que vous ne souffrez pas là où vous vous trouvez, là où vous vivez dorénavant. J’aimerais tant pouvoir vous parler, pouvoir vous serrer dans mes bras, pouvoir être à vos côtés... J’y arriverais, je continuerais de prier jusqu’à ce que l’on soit réuni."

"06 juillet 1814
J’ai entendu le forgeron, il prie pour le retour de sa femme et de sa fille. Une partie de moi a envie de rire, de lui dire que c’est un juste retour des choses. Une autre partie de moi pleure pour ce pauvre homme. Cette partie de moi ne souhaite cette épreuve à personne. Je me demande ce qui leur est arrivé ? Peut-être qu’ils se sentaient coupables à la place de leur père..."

" 08 juillet 1814
J’ai vu ma famille aujourd’hui, elles étaient accompagnées de la femme et du fils du forgeron. Je me demande comment il va. J’espère qu’il tient le coup."

"17 août 1814
Quelque chose se passe dans le village, il y a de plus en plus de villageois qui viennent prier leur famille perdue. J’espère qu’ils ne font pas d’autres sacrifices... Ce serait insensé. Si c’est le cas, il faut que je les en empêche. Par précaution, j’ai installé des talismans à l’entrée de la pièce. Ils me protègeront du mauvais œil."

"17 octobre 1814
Les fantômes sont de plus en plus nombreux et leurs esprits ne sont vraiment pas contents. De ce que j’ai compris des prières que j’entends de ma chambre, notre kami les enlèverait un à un. Qu’est-ce qui se passe bon sang ?"

"22 octobre 1814
Je les vois chaque jour qui passe. Au moins, elles sont ensemble. J’ai remarqué quelque chose d’inhabituel. Les fantômes que je vois sont immobiles, ils ne peuvent même pas bouger les yeux. Mais elles, elles peuvent se mouvoir, marcher, regarder dans n’importe quelle direction... Est-ce parce que je suis sur le point de les ramener ? Est-ce parce que notre Kami les ramène à moi peu à peu ? En tout cas, j’ai espoir. Elles seront bientôt à mes côtés."

- Le parchemin numéro 10 est une carte ! On dirait une carte du village entier. Il y a des maisons barrées. Je crois qu’il notait les familles enlevées par la plante, expliqua Nori.

"01 novembre
Les esprits les enlèvent un à un. Il n’y a presque plus personne dans le village. J’ai peur de sortir d’ici, peur d’être une nouvelle victime. Il ne me rendra jamais ma famille. Je dois trouver un moyen de les libérer. Je vais abattre cette énorme plante responsable de tous nos malheurs. Mais pour ça, il faut que je trouve un moyen de retourner au village."

"12 novembre
Ils apparaissent par phase. C’est comme s’ils avaient besoin de dormir. J’attends la prochaine phase et je cours au village récupérer la hache du bûcheron et de quoi manger. La faim me tiraille le ventre."

"07 décembre
Il n’y a plus personne au village. Ils sont désormais tous des spectres. J’ai pu récupérer la hache. Lorsqu’ils iront dormir, j’abattrais ce yokai."

"décembre 22 14
Lorsque j’ai voulu jeter un œil à l’extérieur de ma chambre, j’ai découvert ma femme et ma fille qui m’attendaient. Elles m’ont conduit jusqu’au yokai et m’ont fait comprendre que je devais la toucher. J’ai touché cette plante. Elle m’a permis de parler à ma famille. Leurs âmes tourmentées sont piégées à l’intérieur. Ma femme et ma fille souffrent ainsi que tout le village. Je n’ai pas pu me résoudre à abattre la seule chose qui me permet de leur parler. Elles m’ont expliqué qu’elles n’étaient pas toujours responsables de leurs actes. Quelque chose les force à attraper les survivants. Je dois faire très attention."

"18 janvier 1915
J’ai de moins en moins de force... mourir. Il est... mensonges. Je me suis fait avoir... Confiance... plus elles. ...pas moi... sur les murs... erreur."

- Je pense que c’est à ce moment-là qu’il commençait à faiblir, déclara Kagi.
- Il y a encore une quarantaine de parchemins, mais faut les décoder, ça va être compliqué.
- Attendez, j’en ai trouvé un autre plus ou moins clair.

"février
La plante n’est pas la responsable. C’est juste le... à âmes. Le voyageur... dans les environs. Il faut que je le trouve. Je dois me préparer. Ma femme m’a... le seul moyen. Si j’abats..., leurs âmes... piégées... toujours... revenir en arrière. Ils n’auront plus jamais... de libertés et souffriront... l’éternité... renseigner sur ce yokai."

- C’est bizarre... hésita Kagi. Quelque chose ne colle pas...

Tomoe étala trois parchemins sur le sol.

- Vous voyez ? Il y a le mot "androcée" présent dans tout ce qu’il écrivait. Pourquoi il le répète sans arrêt ? Le reste est vraiment incompréhensible. Là, je peux lire "Tuer l’androcée" ici "androcée, quelque chose, âme" là, il écrit plusieurs fois "androcée" à la suite. Et ensuite, sur le dernier parchemin, il y a cette phrase : "Je n’ai plus de force, je vais mourir, mais l’androcée est la solution." C’est quoi androcée ?

Nori et Kagi n’avaient malheureusement pas la réponse à cette question.

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