Chapiter IX. Sun Tzu

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Faye Lin et Safah sont penchées sur la console de Gen quand il rejoint la passerelle.

-Un ban pour Dami ! Hurle-t-il

-J’aimerais tirer à moi toute la gloire, mais sans Iliam à mes côtés et Gunny pour m’ouvrir la voie on serait en train de faire du stop.

-Ah ? t’a rencontré des obstacles ?

-Rien de bien méchant, fait l’artilleur taquin. Quelques graviers mais le gamin était tout confus, j’ai dû lui montrer la voie de la sagesse.

-À coup de howitzer à particule ?

-Ouais ainsi que deux ou trois missiles thermo-barrique et notre pilote a pu voir la lumière qui l’a guidé vers le salut.

Dami ne dit rien et s’incline humblement. Cela a dû réellement passer près pour que le bouillant pilote en perde sa repartie. Néanmoins, discrètement Gunny se penche vers son capitaine.

-S’il ne nous avait pas sortie de cette vrille, je n’aurais pas pu aligner quoique ce soit, ça tournait sacrement vite même la conduite de tir a décrochée. Il est fort le gamin.

Le capitaine acquiesce, il ne connaissait qu’un autre pilote capable d’affronter la houle de l’horizon sans stabilisateur et à l’époque Kawrantin Houarn ne s’en était pas aussi bien sortie.

-Quel est notre niveau d’alerte ?

-Maximum, Tout le monde est à son poste de combat.

-Ok, dites-moi dans quelle bouse ont est. Des blessés ?

-Hormis Ruty et Nam, juste des commotions mineures.

-Sinon ?

-Les bonnes nouvelles d’abord. Commence Faye. Les systèmes vitaux sont intacts, On a perdu de l’air mais rien de dramatique. Les plasmas et L’hyper n’ont pas souffert n’ont plus, on peut bouger avec certaine limitation. Les sauts sont bien sûr hors de question. Les boucliers ont été mis KO mais Gen vient de les remettre en lignes. Au passage on a bouffé un peu de radiation et l’infirmerie va nous rajouter des pilules d’iode pour le dessert. Enfin, si nous recevons une visite imprévue et agressive notre armement nous permet de dire bonjour.

-Les mauvaises nouvelles ?

Elle hausse les épaules

-Les communications hyper sont out, il nous est impossible d’appeler à l’aide. Sans pointeur, je suis quasiment aveugle. Je me fie aux données des radars de Safah et de la centrale inertielle qui n’a pas aimé être bousculé pendant la fin de saut. Nous sommes maintenant en orbite autour d’une gazeuse, plusieurs lunes, aucune avec atmosphère. Le système ne comporte aucune planète tectonique non plus. Je crois que nous sommes quelque part près du nuage d’Aliun. Je ne peux pas être plus précise, les systèmes de navigation ont sauté, y compris la redondance, je ne peux même pas calculer une estimation de notre trajectoire… Ce n’est pas dû uniquement à l’explosion.

-Sabotage ?

-Oui, j’ai retrouvé plusieurs programmes étrangers, des virus. Je suis en train de formater la mémoire et de charger la sauvegarde. Cela va prendre plusieurs heures, il me faut reconstruire toute la base de données cartographique.

-Quoi d’autre ?

-Gen, c’est à toi.

-Je viens d’envoyer une équipe en EVA pour évaluer les dégâts, j’en saurais plus d’ici une demi-heure. Mais on a perdu plusieurs systèmes. Pour les principaux, Il y a bien évidemment le stabilisateur de sortie de saut bâbord, donc pas question d’utiliser l’hyper pour le moment. Là aussi j’attends le rapport d’avarie pour déterminer si je peux bricoler une antenne de secours avec les pièces de rechange. Ensuite vient le pointage optique, s’il est détruit-on va devoir se fier à la centrale inertielle en espérant qu’elle aussi n’a pas été sabotée. Là encore plus d’info à venir, car il y a éventuellement une chance de récupérer le pointage, la section n’est peut-être que coupée du reste du navire et dans ce cas il s’agit juste d’une histoire de câblage. Un coup de bol que les gosses aient évacué le nid.

-On peut aussi démonter le pointage d’une des navettes de reconnaissance, propose Le second.

-Cela m’embête d’esquinter une navette, mais d’accord, c’est une option. Quoi d’autre ?

-Les senseurs longue distance bâbord sont out, on n’est pas complètement aveugle mais borgne, d’autant que les capteurs dorsaux sont perdus, en sortant de saut les boucliers nous ont lâché et on a caressé un bout de roche qui nous a aussi embarqué un moteur vernier. La coque a percé mais rien de méchant les nanomatériaux auto réparant se sont déjà ressoudés. A vu de nez, quel que soit l’étendue des dégâts et si le Chef Math me file un coup de main, Je nous donne deux bonnes grosses semaines de réparations. Voilà pour le moment.

– Tiens-moi au courant de tes progrès. Où est Ray ?

-Il briefe la sécurité et doit interroger les cadets qui se trouvaient dans le nid, peut-être ont-ils vu quelques choses. Maintenant qu’on a un « bad guy » à bord, un suicidaire en plus. Le niveau de parano va monter d’un cran tant qu’on ne lui aura pas mis la main dessus.

-Si je peux me permettre, dit Faye. Brem est le mieux placé pour cette enquête, nous passons tous entre ses mains à un moment où a un autre.

-Où est-il ?

-Il est toujours à l’infirmerie

-Bien je vais lui parler, avec deux de ses cadets sur le billard je n’aimerais pas être notre saboteur lorsqu’il lui tombera dessus. Tenez-moi au courant des travaux ou si vous avez du nouveau. Gen ta priorité c’est le stab, plus vite on pourra bouger moins nous soerons vulnérables. Je vais prendre des nouvelles des enfants.

Brem était quelqu’un de facile à lire. Honnête et loyal, on devinait ses pensées en le regardant au fond des yeux, deux trous noirs désormais remplit de haine qui observaient les chirurgiens s’affairer autour de Ruty. Dans la salle d’opération annexe Namuelle gît aussi inconsciente tandis que les médecins et infirmières tentent de stopper l’hémorragie et de sauver son bras.

Agus prostré sur un fauteuil relève la tête et l’interroge de son visage défait.

-On ne sait pas encore. Mais il est costaud, ment-il au garçon. Il se bat.

-Nous n’aurions jamais dû venir, Bredouille Agus. C’est de ma faute, on aurait dû rester en bas. Quels nases !

-Je ne connais pas Ruty comme tu le connais, mais je ne pense pas qu’il soit d’accord avec toi. Il a mis sa vie en danger pour nous car cela comptait pour lui. Peut-être même pensait-il à toi, je sais que vous êtes comme les doigts de la main.

-C’est comme mon frangin. Il ne me laisse jamais tomber. Vous avez des amis comme ça Boscos ? Des gens qui sont toujours avec vous, même quand les embrouilles ne vous lâchent pas ?

-Oui quelques-uns, depuis peu toi et Ruty vous en faites partie. On est tous ensemble là-dedans et j’ai mal de le savoir allongé là-bas avec Namuelle. Mais je ne suis pas médecin et comme je ne peux pas l’aider directement, je vais donc utiliser le supplément de vie que Rut nous a acheté pour trouver l’ordure responsable de ce gâchis. Toi aussi tu vas faire ta part, écris-moi un rapport sur ton emploi du temps et depuis la dernière fois que tu as vu Ruty jusqu’à l’explosion. Il faut qu’on cadre les événements avant de pointer du doigt. Ok ?

Le mousse sort de son fauteuil et se plante devant Brem.

-Le salaud qui a fait ça je le veux aussi, vous m’en garderez un morceau Bosco ?

-La part du lion, fils. Maintenant va, je t’appelle dès qu’il y a du nouveau.

En sortant de l’infirmerie il croise le capitaine à la recherche de son bosco. Lorsque ce dernier trouve le colosse, la vue des jointures blanches des énormes poings trop serrés, ne le remplit pas d’optimisme.

-Encore trop tôt pour savoir ? demande-t-il.

-Ils sont en train d’arrêter l’hémorragie, mais elle a perdu beaucoup de sang et ils ne savent pas s’ils vont sauver son bras car en plus de la fracture ouverte, son coude est broyé et plusieurs tendons sont sectionnés. Si les nanobots et la greffe de reconstitution osseuse ne prennent pas ils vont devoir l’amputer. - Pour Ruty, ils ne pensent pas qu’il va survivre. Le môme n’a plus une côte en bon état, les os lui ont perforé les poumons et endommagé le cœur. Mais le plus préoccupant c’est qu’il souffre d’une sérieuse hémorragie cérébrale, ils tentent en ce moment d’opérer pour relâcher la pression. Son crâne est un vrai puzzle, il a le nez, les pommettes et la mâchoire brisés. Le salaud c’est acharné sur lui. Il ne devait plus pouvoir parler, c’est pour ça qu’il n’a pas donné l’alerte.

Il déglutit douloureusement.

-Je veux sa peau Ka. Celui qui a fait ça, je veux l’écorcher et le laisser crever lentement.

-À ce propos je sais que tu ne vas pas aimer ça, mais j’ai besoin que tu parcoures les fiches du personnel pour y trouver des anomalies.

-Je m’y attendais, tout le monde passe les tests psychologiques et le détecteur de mensonge avant de monter à bord. Je vais ressortir les enregistrements en commençant par les nouveaux. Veux-tu y jeter un coup d’œil avec moi ?

-Non Je te fais confiance, moi je préfère être sur la passerelle pour les travaux.

-Capitaine, ici Faye, on a de la visite. !

-Les nôtres ?

-J’en doute, Safah détecte deux bandits qui s’approchent en jouant à cache-cache avec la ceinture d’astéroïde. Mais je n’arrive pas à les identifier, chasseur, drone ou frégate.

-J’arrive !

Houarn est rapidement de retour sur la passerelle.

– Ils ne répondent sur aucune fréquence. Renseigne Harl

-On les traite en hostile, faites sonner l’alerte.

Dans tout le navire les lumières passent au rouge et le klaxon d’alarme retentit.

-Les chasseurs sont-ils prêts ?

-Oui mais on a aucun moyen de les guider il faut qu’ils utilisent leurs radars, donc impossible d’engager en mode furtif.

Deux commandos entrent sur la passerelle et tendent des gilets de combats et des armes de poing aux alentour. Houarn se saisit de l’étui qu’il fixe à sa hanche et enfile le lourd vêtement de protection.

-Safah ou en sont nos amis.

-Ils se rapprochent prudemment, en suivant une trajectoire circulaire.

-Gunny ? Solution de tir ?

-Je les suis en visuel, mais nous ne sommes pas encore a porté de tir.

-Une idée de la classe de navire ? Safah.

-On dirait … hésite Safah, on dirait le déplacement de deux frégates Suprématie.

-J’en ai peur, confirme Faye, accélération et manœuvrabilité, ça colle avec le profil de nos propres navires. Mais ce ne sont pas les nôtres. Si c’était le cas, leur approche n’a aucun sens, à moins qu’ils essaient de nous surprendre.

-Il ne faut pas que l’on reste immobile, Dami mets la planète entre eux et nous, mais discrètement qu’ils ne repèrent pas notre accélération. Essai de nous faire passer par les pôles

-Haye capitaine

Sans allumer les moteurs principaux, Dami se contente de légèrement dégrader l’orbite du vaisseau à l’aide des verniers et la gravité frondeuse de la planète fait ensuite le reste.

-Orbite dégradé, on suit maintenant une ellipse qui nous sortira au-dessus du nord…Vous voulez les engager ?

-Observe et apprend Dami. -Gunny, Lâches deux drones de reconnaissance. Nous allons les utiliser comme des leurres en modifiant leur signature de sorte qu’elles imitent la nôtre. –Safah planque les dans la ceinture.

-Sonde paré à lancer. ?

-Je suis synchro avec elles, paré !

-Lancement !

-Lancement Confirmé, répond Faye, j’essaie de te guider, fais attention au champ magnétique de la planète il perturbe les gyroscopes.

-Vu, commandant je compense la dérive. E.T.A. 20 minutes.

-Capitaine cette ruse est un peu éculée, vous ne pensez pas ?

-Aussi vieille que la guerre elle-même, mais Je ne sais pas qui ils sont.

-Et alors ?

-Alors on en revient aux bases.

Il lève un doigt avec le sourire en coin et cite sur un ton professoral ;

- « Poussez l’ennemi à l’action pour découvrir les principes de ses mouvements. »

Il quitte son siège et se place près du Chef Pico qui continue la citation en prenant un accent nasillard.

- « feignez le désordre, ne manquez jamais d’offrir un appât à l’ennemi pour le leurrer, simulez l’infériorité pour encourager son arrogance, sachez attiser son courroux pour mieux le plonger dans la confusion : sa convoitise le lancera sur vous pour s’y briser. » … Ce bon vieux Sun Tzu !

-Sounzou ?

-Un général qui n’était pas la moitié d’un crétin, il rédigea un manifeste sur l’art de la guerre il y a plusieurs milliers d’années. Explique Houarn.

-Jamais entendu parler.

-Le Légire, lui doit salement s’en souvenir, ricane Gunny. Il a pris ses tactiques en plein dans les parties basses quand il a envahi la mauvaise planète…

-Une autre histoire, Gunny, une autre histoire. L’interrompt le capitaine d’une tape amicale sur l’épaule.

Gunny se ravise.

-Désolé Cap. Ouais une autre histoire, une sale histoire.

-Pour le moment Safah, je veux que tu me planques l’une des sondes pendant que l’autre simule une fuite du réacteur. Tu me la surchauffes comme si elle était sur le point de péter et tu lui fais suivre des manœuvres d’évitement entre les astéroïdes…

-…Comme s’il s’agissait de l’Hermine salement amochée qui cherche à se planquer ! Je rejoins le commandant c’est usé jusqu’à la trame ! Ils ne marcheront jamais !

-Sans doute, mais cela les fera réagir d’une manière ou d’une autre. Tu feras pareil avec l’autre sonde, en simulant un autre type de panne bien-sûr, il faut être crédible, mais pas avant que je t’en donne l’ordre.

-Roger. Mais je ne vois pas ce que vous essayez d’accomplir.

- n’avez-vous pas écouté lieutenant, la reprit Faye, « Poussez l’ennemi à l’action …simulez l’infériorité pour encourager son arrogance ». Votre capitaine n’est pas un idiot. Nous ne sommes pas en grande forme et nous ne pouvons rien y faire, faisons donc en sorte que nos adversaires nous croient encore plus affaiblies et commander par un crétin. Le poussé à la faute, qu’il soit trop sûr de lui en nous attaquant et qu’il fasse l’erreur de nous croire à sa merci. C’est sérieusement burné comme plan, mais en manque de degré de liberté je prends l’option.

- « C’est lorsqu’on est environné de tous les dangers qu’il n’en faut redouter aucun. » souligne Ray Pico.

-Sounzou ?

-Le même. Répond Houarn

-Ce devait-être un sacré officier, d’où venait-il ?

Il fait mine de ne pas avoir entendu la question. Ray lui fait comprendre de ne pas insister. Ce qui surpris le second, elle recherchera plus tard qui était ce général.

-En position, signale Safah.

-Voyons ce qu’ils vont faire. Débute les manœuvres.

-Roger.

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