3.2 –Visite guidée

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Ici vous pouvez admirer l’œuvre d’un peintre fort talentueux.

Et ces latrines, l'auguste seigneur des lieux venait y poser son auguste popotin ?”

Au petit matin, une trompe retentit dans toute la citadelle, réveillant les occupantes. Isabelle se dressa dans son lit, Manon déjà debout finissait de se vêtir.

— Mais qu’est-ce qui se passe ! s’exclama la dormeuse.

— Le mieux c’est d’aller voir. Dépêche-toi !

Enfilant ses vêtements à la hâte, Isabelle fut bientôt prête. Tout l’étage était en pleine ébullition et de nombreuses jeunes femmes de leur âge, à moitié réveillées, se pressaient dans le couloir. Elles reconnurent quelques visages aperçus la veille.

Isabelle interrogea la première venue sur la raison de cette sonnerie.

— C’est l’heure du déjeuner, lui répondit-elle. Si vous voulez manger, il faut se dépêcher !

Le repas avait lieu autour de la table du Bouton de Rose.

— Mon nom est Théodora, c’est toi Manon ? … Et donc toi, c’est Isabelle, eh bien, enchantée !

Comme elle les voyait perdues, elle enchaîna :

— Si vous cherchez vos places, elles n’ont certainement pas bougé depuis hier soir. À plus tard !

Théodora alla s’asseoir à quelques places de Fabiola. Elle était donc, elle aussi, apprentie chevaleresse. La fameuse Fabiola, qui ne les avait qu’à peine regardées le jour précédent lorsqu’elle les avait accueillies, était entourée de trois jeunes femmes. Toutes quatre semblaient former un groupe dont Théodora était manifestement exclue.

Quand les deux maîtresses des lieux arrivèrent, un peu en retard, le petit-déjeuner put enfin commencer.

— Mesdemoiselles, ce matin, j’ai des choses à régler, principalement de l’administratif dont je dois me débarrasser, fit Opale à l’intention d’Isabelle et Manon. Quelqu’un va vous servir de guide. Je vous recevrai en début d’après-midi avec Layinah pour un entretien.

Elle s’était exprimée suffisamment fort pour être entendue de toutes. Fabiola et ses acolytes redressèrent les épaules et regardèrent dans la direction de la comtesse afin qu’on les choisisse.

— Pourquoi pas Théodora, elle a l’air gentille, fit Manon.

— Eh bien pourquoi pas, Théo, acceptes-tu de leur servir de guide ?

Théodora, toute heureuse d’avoir été élue par les nouvelles, se présenta dès la fin du repas afin de recevoir sa mission.

— Tu leur expliques comment on fonctionne ici. Le déroulement une journée, tu leur montres un peu tout, les artisanes, le couvent. Il faut qu’elles puissent choisir ce qu’elles veulent faire. Évidemment, tu es libérée des tâches matinales !

La Dame de Montbrumeux vaqua à ses affaires, laissant la visite se dérouler.


§


— C’est aimable les filles de m’avoir choisie, je suis un peu toute seule ici depuis mon arrivée. Ce que vous avez vécu est fantastique, vous avez sorti Opale des geôles ! Et cette sorcière, incroyable ! Et puis vous vous connaissez depuis toujours, ça doit être formidable !

Les deux amantes lui sourirent :

— Oui, une drôle d’aventure, tu peux le dire ! Hélas un homme est mort, lui dit Manon.

— Tu as entendu notre histoire hier soir, remarqua Isabelle. Mais quelle est la tienne ?

Tout en entraînant le jeune couple à sa suite dans les escaliers jusqu’aux chambres, Théodora entama son récit.

— Fille de vigneron, je me suis enfuie de chez mes parents, lorsqu’il a fallu me marier. Un peu comme toi, Isabelle. Sauf que je suis partie seule. Dans un village une femme m’a repérée, nourrie. Elle appartenait au réseau de la comtesse. Ensuite elle a fait parvenir une lettre à Montbrumeux. Une chevaleresse est venue me chercher, ça fait un mois.

— T’as eu de la chance dans ton malheur ! Tu aurais pu tomber pire qu’ici ! Et, tu es seule ou tu as une compagne ?

— Comme je vous envie d’avoir réussi à bâtir un couple ! Non, je n’ai pas encore trouvé chaussure à mon pied.

— Je suis sûre que tu pourras rencontrer quelqu’un ici.

Théodora interrompit la conversation, elles venaient d’arriver dans le couloir de leur étage. Les filles étaient occupées à briquer le parquet, nettoyer les fenêtre, faire la poussière sur les meubles et les tapisseries…

— Voyez-vous, le matin après le petit déjeuner, on fait le ménage, d’abord nos chambres respectives, puis les espaces communs : couloirs, diverses salles de divertissement. Il y a peu de domestiques alors chacune doit participer, c’est une des règles de notre vie en communauté.

— Des salles de divertissement ? s’enquit Isabelle.

— Oui, pour la musique, la peinture, les jeux de société… Il y a une grande bibliothèque.

— Plutôt intéressant !

Elle les entraîna pour leur montrer.

— Et alors ? Que veux-tu faire Théodora ? De l’artisanat ou…

— Je veux être chevaleresse ! Mais c’est pas facile, peu d’entre nous arrivent au bout du rêve. Il faut tenir à l’entraînement, c’est difficile ! Et il y a des missions en tant qu’écuyères, ça peut être dangereux, mais ce qui est terrible, c’est en hiver ou quand il pleut beaucoup. En tout cas, c’est ce que l’on m’a expliqué. Mais rien de tout ça ne me fait peur !

— Nous aussi, on voudrait faire ça ! dit Manon.

— Pour moi ce qui est dur, c’est que je ne me suis pas fait d’amies, enfin, je ne suis pas là depuis longtemps.

— T’en fais pas ! On est là, et on va s’en sortir toutes ensemble.

Théodora leur sourit franchement.

— Merci, vous êtes bien aimables. Parce que la bande à Fabiola… elles sont impossibles. Tu sais, Fabiola, c’est la fille d’un prince. Elle joue à la cheffe et veut que tout le monde plie le genou devant elle. Les autres n’ont pas le droit de me parler, puisque je refuse leur petit jeu.

— Elle ne l’emportera pas, on a passé quelques jours avec la comtesse, et je peux te dire que ce n’est pas le genre de la maison, l’assura Isabelle.

— Allez, venez, on va dehors, je vous montre le coin des artisanes !

Arrivées dans la cour qu’elles n’avaient qu’à peine aperçue jusqu’à présent, elles constatèrent combien l’endroit était grand. Les lieux étaient en pleine effervescence, des charriots emplis de divers matériaux venaient livrer celles et ceux qui les attendaient.

— Ici, on fabrique les biens nécessaires à l’entretien du château et aux habitants. Mmm… je pense que je vais vous conduire chez Crispin, le tailleur, vous avez certainement besoin de vêtements.

Les trois jeunes femmes parvinrent dans l’échoppe en question. Le compagnon d’Ellanore les reçut.

— Bonjour Mesdemoiselles, bienvenue chez nous, j’imagine que vous ne venez pas ici pour rien ! Est-ce que vous savez déjà ce que vous allez faire comme métier ? Les vêtements que nous vous confectionnerons en dépendront.

— Nous n’avons pas encore eu notre entretien avec les deux Dames, mais nous voulons devenir chevaleresses, indiqua Isabelle.

— Je vais attendre que ce soit décidé, mais je peux déjà prendre vos mesures.

Il haussa la voix.

— Muriel, pouvez-vous vous occuper de mesurer ces demoiselles, je te prie ?

Une jeune fille, à peine sortie de l’enfance, émergea de l’arrière-boutique et prit consciencieusement les mesures des deux nouvelles, puis indiqua les valeurs à Crispin qui les nota.

— Muriel est mon apprentie, elle travaille sérieusement, je suis sûr qu’elle deviendra une très bonne couturière.

La petite rougit du compliment.

— Merci monsieur.

— Et vous êtes nombreux dans la boutique ?

— Nous sommes quatre, mais nous aurions du travail pour plus. Les chevaleresses abîment beaucoup leurs vêtements quand elles partent en mission. Vous n’imaginez pas le travail. Si vous changez d’avis, nous serions heureux de vous prendre comme apprenties !

La moue que lui fit Manon désespéra le jeune homme. Il haussa les épaules :

— Ah ! L’attrait de l’aventure est trop fort à ce que je vois. Au moins j’aurai essayé. Au revoir mesdemoiselles !

— Au revoir Monsieur… Crispin, saluez Ellanore de notre part !

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