1.7 – Je m’en vais

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Les voyages forment la jeunesse, dit-on. Mais qu’est-ce que le vaste monde a à m’offrir de mieux que mon foyer ?

Si tu ne pars pas, tu ne le sauras jamais. ”

Le frère aîné de Manon, conseiller au château, avait repris la demeure parentale qu’il avait rénovée.

Arrivée devant la maison familiale, elle en poussa la porte, portant sous son bras un gros panier chargé de linge. Sa mère préparait la soupe. Agnès s’affairait autour de l’âtre, dans lequel crépitait un feu dont les flammes léchaient avidement un grand chaudron.

Posant son panier, la servante se rendit vers un berceau, au coin de la pièce où reposait le dernier né de la famille, fils de son grand-frère. Le bambin dormait, emmailloté comme il se doit dans ses langes.

À cette heure-là, le père de famille travaillait encore avec sire Henri. Son épouse effectuait quelques travaux chez un paysan du coin et les deux plus grands enfants jouaient dans la rue avec d’autres gamins.

Si Manon et ses deux frères travaillaient au château, c’était bien grâce à leur mère. Son emploi de nourrice, pendant ses années d’activité chez les Sautdebiche, avait valu à ses enfants une situation enviable par rapport à beaucoup de villageois. Un fils aux cuisines, un autre comme conseiller, Manon en tant que servante.

Agnès avait perdu son mari de nombreuses années auparavant. Lorsque Manon était encore petite, une maladie avait emporté le brave homme, ainsi qu’une fillette de quatre ans. Financièrement, la femme s’en était sortie grâce à son poste chez les Sautdebiche. Cependant, si s’occuper de Manon et Isabelle lui avait évité de sombrer dans la dépression, l’âge lui rappelait désormais ce passage tragique de sa vie.

Aujourd’hui, usée par les ans, la vieille dame logeait chez son aîné. Manon et son plus jeune frère qui habitaient au château, apportaient une contribution financière symbolique pour aider au maintien de leur mère.

Après s’être intéressé au couffin, Manon salua chaleureusement Agnès.

— Eh ben me vla bien surpris t’vouére !

Manon prit un air un peu timide, regardant le sol, elle se décida à parler :

— Mère, il faut que je vous annonce une nouvelle. Je ne sais pas si elle va vous plaire.

Retournant à sa marmite, Agnès attendait patiemment l’annonce de sa fille. Y faut qu’ce soit bien important pour qu’elle fasse une tête comme celle-là, si ça se trouve elle va m’dire qu’elle va s’marier.

— Dis toujours, on voira ben.

— Mademoiselle Isabelle me prend comme dame de compagnie.

La nouvelle surprit tant la vieille dame qu’elle manqua de se brûler.

— Oh ben c’étions une bonne nouvelle, fille. T’auras plus à t’en faire pour les sous !… Alors tu pars avec elle tout là-bas !

Manon releva la tête, heureuse de la manière dont sa mère le prenait.

— C’est mon désir, si vous êtes d’accord.

La vieille dame regarda sa fille droit dans les yeux, abandonnant sa cuillère dans la marmite.

— Je suis ben heureuse pour toi gamine. T’auras une bon’ place et c’étions bien pour toi. Si tu pourrais avec ça, rencontrer un nobliaud qui t’épou’srais, tu d’viendrais une pt’ite noble, chez l’baron, tout ça ! Ce s’rait pas mal, et vu qu’t’es jolie comme un cœur, ça m’étonn’rait pas trop qu’ça t’arrive. Fais quand même attention de pas te faire engrosser par n’import’ qui. D’abord le mariage, hein ?!

Elle marqua une pause.

— Par cont’ tu vas m’manquer, viens faire un gros câlin à ta pauv’mère. Roh s’que j’suis fière de toi ! Faudra qu’tu fass’ bien s’qu’e Mam’zelle Isabelle te diras !

Après que sa fille l’eut serrée tout contre son cœur, celle-ci en vint au deuxième motif de sa visite.

— Comme Mademoiselle doit m’habiller et que le tailleur a beaucoup de travail à cause du mariage, elle m’envoie ces vêtements que vous pourriez adapter pour moi. Ils lui appartenaient. Elle m’a confié également cet argent pour vous dédommager.

Manon accepta ensuite de partager la soupe chez son frère, avant de retourner dormir dans sa chambre dans la demeure seigneuriale. Le lendemain matin, elle recevrait sa première leçon d’équitation.

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