Partie dix ~ Versions des faits

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Les paupières encore closes, Anna revint doucement à la réalité, quittant le monde des rêves qui disparaissait dans le néant. Quand elle ouvrit enfin les yeux, un sourire étira ses lèvres. Taylor dormait paisiblement à ses côtés, ce qui permettait à la jeune femme de regarder son visage. Même endormi, il ne perdait rien de sa beauté.

Comme son ventre criait famine, Anna se leva pour aller préparer le petit déjeuner. Avant de descendre, elle attrapa une chemise dans l'armoire de Taylor qu'elle enfila afin d'habiller son corps nu. Celui-ci se camoufla aisément sous le vêtement, trop grand pour sa fine silhouette.

La jeune femme entreprit de faire des pancakes selon la recette du policier. L'homme s'était donné la peine de lui montrer sa façon de faire, un jour alors qu'elle se fascinait pour sa réalisation. Les gargouillements vinrent tordre l'estomac vide d'Anna, torturé par l'odeur alléchante qui envahissait la cuisine.

Cette bonne odeur chatouilla les narines de Taylor, qui finit par se réveiller sous la faim soudaine se manifestant. Le policier descendit à son tour avant de rejoindre sa petite amie dans la cuisine. Lui enlaçant la taille, sa tête s'enfuit dans le cou d'Anna pour lui murmurer d'une voix douce.

– Tu deviens une championne de pancakes !

– C'est parce que j'ai un bon chef, répondit-elle avec tendresse.

La jeune femme se retourna vers lui et l'embrassa en passant ses bras autour de sa nuque. Lorsqu'elle écarta légèrement le visage, Anna aperçut sa fille débouler dans la pièce telle une fusée. Suzy fit un câlin aux deux adultes, saisissant leurs jambes de ses petites mains. Ce simple geste déclencha un rire général amenant la bonne humeur.

Début d'après-midi, Magalie Thompson avait donné rendez-vous à Anna. Selon l'assistante sociale, de nouvelles informations concernant l'avancée de la procédure lui étaient parvenues dans la matinée. La jeune femme s'empressa donc de rejoindre le commissariat en taxi. C'est d'un pas précipité qu'elle atteignit le bureau de Magalie, qui aborda le sujet rapidement.

– Comme je vous l'ai dit au téléphone, de nouvelles infos sont tombées ce matin, voilà pourquoi je vous ai convoquée aujourd'hui, expliqua-t-elle. Le juge a donné l'ordre aux policiers d'amener votre mari au poste afin de l'interroger.

– Alors, vous allez l'arrêter ? s'exclama Anna avec enthousiasme.

Une lueur d'espoir traversa les yeux de cette dernière. Enfin, son bourreau serait condamné. Cet homme recevrait la sentence qu'il méritait.

– Pour l'instant, aucune inculpation n'est envisagée. Votre mari va simplement nous fournir sa version des faits, ensuite le juge décidera de son sort.

Anna se leva brusquement de sa chaise, fusillant l'assistante d'un regard noir. Son cerveau fulminait d'une colère folle qu'elle s'efforçait de contenir.

– Sa version des faits ? aboya-t-elle. Je vous ai dit ce qu'il m'avait fait. Vous avez vu les bleus sur mon corps et vous avez même le témoignage de ma fille ! Alors pourquoi doit-on encore entendre ce qu'il a à dire ?

– Je comprends votre énervement Anna, répondit calmement Magalie en se levant à son tour. Et s'il n'y avait que moi, je l'enverrais directement derrière les barreaux. Mais ce n'est pas ainsi que ça marche, nous devons respecter la procédure établie par le juge.

La colère retomba doucement. Anna repensa alors aux messages qu'elle avait reçus sur son portable. Elle prit son cellulaire dans sa poche, puis montra à l'assistante les nombreux sms venant de Franck. Avec cette preuve-ci, elles pouvaient être certaines que l'homme finira ses jours en prison.

Magalie recopia le contenu des messages dans son carnet de note afin de les communiquer au juge. Ce dernier reviendrait peut-être sur sa décision en voyant les menaces rédigées par le mari de la victime. Cependant, Anna en doutait fortement. Elle savait bien à quel point Franck pouvait mentir pour échapper à la police, il l'avait déjà fait. Les preuves fournies contre lui ne l'empêcheraient pas d'inventer une histoire insensée afin de semer le trouble dans la tête des flics.

Alors non, la jeune femme n'était pas totalement convaincue de l'arrestation de son mari. Bien que c'est ce qu'elle souhaitait, Anna devait se rendre à l'évidence, Franck savait manipuler les gens. Et c'est sa manipulation qui jouerait en sa faveur.

Traversant le hall, Anna regarda droit devant elle. Sourire effacé, mine déconfite. Elle ne semblait pas prêter attention au défilé de policiers présents, ni aux sonneries de téléphones qui résonnaient. Arrivée à la sortie du commissariat, la jeune femme freina sa marche en écarquillant les yeux. En face, se trouvait son mari qui arrivait, escorté par deux agents. Son regard glacial se posa sur sa femme qui tressailli. Il ne cessa de la dévisager jusqu'à ce qu'il ait disparu de son champs de vision.

Taylor, qui suivait le suspect, s'arrêta à hauteur d'Anna. Il la fixa un instant pour capter son attention.

– Nous allons l'emmener en salle d'interrogatoire, l'informa-t-il. Il va nous donner sa version des faits, mais je ne peux pas promettre que nous obtiendrons des aveux de sa part.

– Il ne vous dira rien, répliqua la jeune femme. Tout ce que vous obtiendrez sera que mensonges.

L'homme en uniforme soupira tout en jetant un coup d'oeil vers l'escalier menant à l'étage. Il avait conscience que Franck ne ferait pas le moindre aveu et prenait la remarque d'Anna bien en compte. Ses collègue et lui, ne devaient en aucun cas se laisser embobiner par ce type.

– L'interrogatoire risque de prendre du temps, je te tiendrais au courant de la suite des évènements, annonça Taylor avant de rejoindre ses coéquipiers.

Anna tenta de s'occuper le temps de l'échange entre son mari et les forces de l'ordre. Cela lui évitait de penser aux horribles choses que Franck était en train de dire. La jeune maman se changea les idées en compagnie de son enfant qui terminait sa journée d'école.

Néanmoins, un certain tracas la rongeait. Et si tout ça ne servait à rien ? Si tout ce qu'elle avait entrepris jusqu'à maintenant n'était au final, qu'un moyen de plus pour se rapprocher d'une mort certaine ?

Car en agissant de cette manière, Anna en avait la certitude, elle signait son arrêt de mort !

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