Chapitre 73

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- Fabien, Charlotte, Tommy, Octavio passez ces uniformes, Ordonna Madame Arca. Edwina, Naïa, je vais vous demander de vous mettre dans la trappe sous les sièges arrière avec Edmara. Attention, elle ne devra pas faire de bruit.

- Bien, s'il faut, je la calmerai en lui donnant le sein.

- Faite comme vous voulez, mais faites le vite.

Je soulevais la banquette et me glissais avec Edwina et ma fille dessous.

- Laissez-moi m'installer avant de refermer, demandai-je.

- Pas de soucis, faites-moi un signe dès que vous êtes prête.

Pour ne pas prendre de risque, j'ouvris mon corsage et donnai à boire à Edmara. Une fois convenablement installées, Madame Arca referma la porte. J'étais dans un noir complet. Il ne subsistait que le bruit du moteur, de ma fille qui tétait et des autres passagers qui parlaient et marchaient.

Edwina me prit la main, sans un bruit. J'entendis quelqu'un s'asseoir au-dessus de nous, alors que le véhicule commençait à ralentir, pour s'immobiliser complètement. Mon cœur battait fort dans ma poitrine. La liberté était toute proche et pourtant elle pouvait être remise en cause par ce dernier barrage.

Des voix étouffées arrivaient à mes oreilles, mais restaient inaudibles. La portière avant s'ouvrit, une personne monta et fit bouger le bus. Je ressentais chaque pas qui s'approchait de nous.

- Comme je vous l'ai dit, nous sommes treize avec le chauffeur.

L'homme marcha un peu, demanda au hasard l'identité de quelques personnes, sans que je puisse savoir exactement à qui.

- Tout est en règle, dit-il alors qu'il était tout près de moi et me décrocha un hoquet de peur.

Charlotte toussa, puis s'excusa. Le silence s'installa. La main d'Edwina resserra son emprise sur la mienne.

De nouveau, je ressentis les secousses à sa descente. Quelques minutes après, qui semblèrent une éternité, le bus se remit à rouler. Le poids sur ma poitrine s'envola, en même temps que l'emprise d'Edwina. La trappe qui me dissimulait s'ouvrit. Je vis le sourire de Charlotte, qui prit Edmara dans ses bras, alors que Fabien aidait Edwina à se relever. Tommy arriva à son tour et me délivra pour m'étreindre. J'étais tellement soulagé, nous étions tous tellement soulagés. Entre les fauteuils, nous improvisâmes un câlin général, maladroit, mais délicieux.

- Je vais vous abandonner ainsi que quatre de mes hommes et un chauffeur, dit Madama Arca, alors que le bus ralentissait.

- Mais comment allez-vous rentrer, demanda Tommy.

- Ne vous inquiétez pas, nous avons stationné un véhicule sur le parking, où nous sommes en train de nous arrêter.

- Merci... Merci, nous vous devons tellement, dis-je alors que la pression qui retombait commençait à me faire pleurer.

- Votre bonheur est mon moteur. Voir dans ce monde si fermé, le tour de force que vous avez réalisé est extraordinaire. Alors c'est moi qui vous remercie.

- Nous aurons la chance de vous revoir ?

- J'espère que non, car cela voudrait dire que nous avons échoué.

- Alors, nous ne vous oublierons jamais.

Le bus avait redémarré. Nous abandonnions Madame Arca qui nous faisait signe. Elle avait pris tous les risques, pour des personnes qu'elle ne connaissait pas encore il y a dix jours. Je me sentais toute petite face à cette femme si grande. J'embrassais tendrement Edmara et Tommy posa ma tête sur son torse.

- Tu devrais dormir. Andréa m'a dit que nous avions plusieurs heures de route.

- Et toi, tu ne vas pas le faire.

- On se blottit tous les trois et on dort, si ça te va ?

- J'aime ce programme.

Je me laissais bercer par le battement de son cœur et la chaleur de son corps, en glissant lentement dans le sommeil.

- Maman, me disait la voix d'un petit garçon.

Mais je n'arrivais pas à ouvrir les yeux. Je forçais sur mes paupières qui étaient si lourdes.

- Maman, tu m'oublies.

Il fallait que je me réveille. Je luttais, je me débattais, pour me sortir de la profonde torpeur dans laquelle je m'étais enfoncée.

- Maman, me dit-il en posant sa main sur ma joue.

J'ouvris enfin les yeux et Tommy était là.

- Nous sommes arrivés, dit-il.

M'éveillant complètement, je repensais à cet enfant, celui de mes songes, celui que je laissais dans ce monde. Depuis des mois, il hantait mes rêves. Il me manquait au fond et je devais l'abandonner ici.

- Il faut sortir, maintenant, nous dit Andréa.

- Tu as réussi à avoir...

- Plus tard, Naïa. Il n'y a pas de temps à perdre. Il y a des sacs à dos, avec tout le matériel de survie nécessaire, dans le coffre. Nous allons devoir marcher encore quelques kilomètres. Reste à espérer qu'Edwina tiendra bon jusqu'au bout.

- Je pense que ça va aller, confirma-t-elle.

- Parfait et on fera une pause dès que nécessaire.

Le soleil se levait et le ciel rosé faisait briller le givre des branches. Je retrouvais enfin ma forêt, je rentrais enfin chez moi.

Andréa marchait d'un bon pas et s'éloignait petit à petit.

- Je crois que j'ai besoin de m'arrêter, dit Edwina.

- Tommy, tu pourrais rattraper Andréa et lui dire ? demandai-je.

- Bien ma chérie, dit-il en posant son sac et en partant au pas de course.

Il revint une minute après, essoufflé.

- Elle prend de l'avance et on la rejoint dès qu'Edwina peut reprendre.

- Et comment sait-on où aller ? dis-je.

- Pas de soucis, nous connaissons aussi le chemin, dit l'un des militaires, resté avec nous.

- Profite un peu du paysage, n'est-ce pas magnifique ? me demanda Tommy.

- Magnifique.

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