Chapitre 60

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- Alors comment va Charlotte ? demandai-je à Octavio qui nous rejoignait dans la cuisine.

- J'ai très peur qu'elle soit en train de perdre le bébé. Les saignements qui ont commencé hier soir ne cessent pas, au contraire.

- Je ne comprends pas, j'ai eu aussi les mêmes symptômes et Edmara se porte très bien.

- Tu sais Naïa, les mêmes symptômes peuvent apparaître dans plusieurs maladies et certaines peuvent être fatales pour le fœtus. J'ai aussi beaucoup lu mes livres de médecine et il semble qu'en début de grossesse des fausses-couches puissent régulièrement arriver. La fièvre n'est donc peut-être pas responsable de tout ça.

- Octavio, hurla Charlotte de l'infirmerie.

Fabien regarda Octavio inquiet et l'accompagna pour rejoindre Charlotte.

- La pauvre, je sais tellement à quel point elle souffrait de ne pouvoir avoir de bébé, dis-je. J'ai peur qu'elle ne s'en remette pas.

Tommy se leva de sa chaise pour me prendre dans ses bras, alors que je pleurais.

- Elle retombera peut-être enceinte et tout ceci ne sera plus qu'un mauvais souvenir.

- Je lui souhaite tellement.

- En attendant, elle va avoir besoin de nous pour la soutenir. Et puis qui sait tout rentrera peut-être dans l'ordre.

Mais malheureusement, Octavio revint quelques minutes après pour nous annoncer la mauvaise nouvelle.

- Je pense qu'il n'y a plus de doute, elle perd beaucoup trop de sang. Fabien reste avec elle. Pour l'instant, elle m'a dit qu'elle ne voulait voir personne.

Nous nous sentions tous tellement mal. Charlotte qui était toujours pleine d'entrain et de joie de vivre ne méritait pas ça. Au même instant, Edmara se réveilla et je pris conscience de la chance qui m'était donnée de l'avoir eu.

Au bout de trois jours Charlotte, contre l'indication d'Octavio voulu se lever. Elle saignait encore un peu, mais pas plus qu'en temps de règle. J'étais un peu mal à l'aise, j'avais envie de la prendre dans mes bras, mais je ne savais pas si elle était prête. M'approchant d'elle et la regardant dans les yeux, je sentis les larmes monter. J'essayais de les retenir, mais l'émotion me submergeait. Charlotte me souriait tristement. Je la sentais aussi hésitante que moi, mais elle aussi faisait de petits pas en ma direction. Sans un mot, je lui tendis mes bras. Elle se mit à pleurer à son tour et s'y engouffra. Je savais que mes mots auraient été de trop, en cet instant. Elle avait besoin de la chaleur de mon corps, comme j'avais besoin de la sienne.

- Edmara va bien ? dit-elle dans un soupir après quelques minutes.

- Oui. Tu veux la voir ? Elle sourit de plus en plus, tu sais.

- Elle ne dort pas ?

- Non, dit Tommy alors qu'il la tenait dans les bras.

Comment expliquer ce qui s'est passé ensuite ? Charlotte l'a prise dans les bras. Elle lui a parlé, lui a dit qu'elle la trouvait belle et qu'un jour aussi elle aurait la chance d'avoir une fille aussi mignonne qu'elle. Et pour la première fois, Edmara a parlé. Enfin, parlé est un bien grand mot. Elle faisait des babillages qui ne voulaient rien dire, mais on aurait dit qu'elle lui répondait. Alors Charlotte a continué et elles ont échangé pendant de longues minutes. C'était comme si ma fille voulait la réconforter, comme si elle avait compris la souffrance de Charlotte.

- Tu sais Charlotte, c'est la première fois qu'elle fait ça, dis-je.

- Juste pour moi ? Tu es adorable, ma beauté.

Mais les jours suivants, le chagrin de Charlotte ne s'estompait pas, bien au contraire. Nous tentions tous de lui changer les idées. Avec Edwina nous lui avons proposé une après-midi bien être à se faire belle. Les garçons lui ont suggéré de les aider dans leurs bricolages. Le soir Fabien nous jouait de la musique et Octavio tentait de nouveaux tours de magie. Mais son sourire forcé ne dupait personne. Il lui faudrait du temps, c'est évident, ou tomber de nouveau enceinte. En espérant que ce coup-ci, tout se passe bien.

Après cinq jours, Charlotte nous réunit tous, pour nous annoncer qu'elle voulait repartir en randonnée avec Fabien.

- Je sais qu'il fait encore froid, mais nous sommes maintenant en mars et le soleil semble vouloir s'installer pour quelques jours. Je suis ravie pour toi, Naïa, mais te voir chaque jour avec Edmara, et croiser le ventre rebondi d'Edwina, me rappelle ma souffrance. Partir quelques jours me fera le plus grand bien.

- Je te comprends Charlotte. Nous allons t'aider à préparer ton expédition et à ton retour, je suis sûre que tu seras sur le chemin de la guérison.

- Je le souhaite de tout mon cœur.

Les chevaux étaient attelés et fortement chargés, pour tenir une petite semaine. Nourriture, couchage, vêtements, rien n'avait été oublié. Tout le monde était là, pour leur dire au revoir, même Edmara. Tour à tour, Charlotte nous prit dans les bras et en profita même pour glisser une main sur les fesses de Tommy. Un signe encourageant de sa part. Elle restait la Charlotte espiègle que nous aimions.

Ils s'éloignaient maintenant en direction du soleil levant et d'un ciel bleu et rosé qui se reflétait sur le givre matinal.

Je croisais les doigts.

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