Chapitre 15.2 : Yume

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Yume tournait et se retournait dans ses draps. Malgré tous les efforts du monde qu'il effectuait pour enfin trouver le sommeil, le jeune homme n'y parvenait tout simplement pas. Son esprit était ailleurs. Il était pensif. Impossible de fermer l’œil lorsque l'on pensait trop.

Les étranges paroles d'Astrid lui revenaient sans cesse en mémoire. Même s'il lui avait presque prouvé par A plus B que son monde était bel et bien réel à ses ses yeux, cela ne l'empêchait pas de douter encore. Et si elle avait raison ? Et si elle rêvait réellement de tout cela ? Il lui suffirait juste de se réveiller pour disparaître et ne plus exister. Ne devenir que du vide, et n'exister qu'à travers les pensées de quelqu'un.

Yume se passa une main sur le visage, tentant désespérément de chasser ses horribles idées de sa tête. Non. Rien ne semblait faire effet. Elles étaient là, toujours présentes, persistaient à continuer de le torturer mentalement. Comment faire pour se débarrasser d'elles ?! Celui lui paraissait être une tâche impossible à réaliser.

L’Épéiste regarda ses mains. Grâce aux rayons de la lune bleue à travers la vitre, il parvenait à recevoir l'image de son corps. Yume l'imagina disparaître, fondre, comme s'il n'était qu'un vieux souvenir.

Le blond soupira. Il devait impérativement trouver un moyen de changer ses idées, ou bien il ne parviendrait pas à trouver le sommeil ce soir. Peut-être que sortir lui ferait du bien.

Yume enfila rapidement ses bottes de combat puis sortit de la chambre sans faire de bruit, de peur de déranger Fab et Tip avec qui il dormait. Il ne referma pas la porte derrière lui, celle-ci pouvant faire du bruit et ainsi réveiller les deux frères.

A pas de loup, le jeune homme prit sa veste qu'il avait négligemment laissé sur le porte-manteau puis sortit de la maison. Les mains dans les poches, Yume dévala les escaliers lentement, toujours perdu dans ses sombres pensées. Il s'éloigna de l'habitat et prit une ruelle un peu au hasard, marchant là où ses pas le mèneraient.

Sans y faire réellement attention, le blond arriva devant l'Arbre aux Fées. Il s'arrêta un instant, remarquant que quelques petits points rouges voletaient encore autour des branches. Ainsi, les Falkies non plus ne dormaient toujours pas ? Elles aussi ne trouvaient pas le sommeil, ou bien étaient-elles toujours éveillées pour une toute autre raison ?

Sans prévenir, une des petites lueurs rougeâtres se posa tranquillement sur l'épaule du jeune homme. La Falky prit alors sa véritablement forme : celle d'une fée miniature. Ce n'était pas la même petite créature que la fois précédente, même si elle possédait les mêmes yeux blancs déroutants. Cette Falky portait une sorte de kimono bleu, retenu à sa taille par un ruban rouge. Comme ses semblables, elle avait une peau toute rouge. Elle possédait également des cheveux châtains en bataille, ressemblant un petit peu à la coiffure de Yume, ce qui le fit sourire.

« Tu es un ami de Yunni, n'est-ce pas ? » demanda la petite créature de sa voix aiguë.

Le blondinet confirma ses dire en lui adressant un sourire.

« Super ! Pourrais-tu la remercier de ma part alors ? Je n'ai pas vraiment eut la chance de pouvoir la rencontrer en chair et en os, vu l'état lamentable dans lequel je me trouvais.

‑ Ce sera avec plaisir, mais je ne connais pas ton nom » releva Yume.

La Falky se frappa le front de la paume de sa minuscule main. Tiens, l’Épéiste ne l'avait pas remarqué avant, mais elle ne comprenait que trois doigts !

« Je m'appelle Lilia, se présenta-t-elle. Dis-lui simplement mon nom, et elle comprendra. Du moins, je l'espère…

‑ Alors c'est toi la fameuse Lilia ! Yunni m'a raconté ce qu'il s'est passé dans la forêt ! Est-ce que tu vas mieux ? »

Pour lui prouver qu'elle était en pleine forme, la Falky déploya ses ailes transparentes et se jeta dans le vide. Elle voleta à hauteur du visage du jeune homme.

« Je constate que oui, sourit ce dernier. Yunni sera ravie de l'apprendre. Et ton neveu aussi.

‑ Mon… Ah, lui. »

Yume se rendit compte un peu tard de l'erreur qu'il avait commise en désignant directement Fab comme son neveu. Il savait pourtant que les Falkies et lui n'étaient pas réellement en de très bon termes…

« J'imagine que je dois également le remercier pour avoir prévenu Mère… »

La petite fée soupira.

« Soit. Eh bien, tu lui diras merci de ma part. Il se fait tard, je vais devoir te laisser. Au plaisir de te revoir un jour… Euh… Je viens de réaliser que je ne connais même pas ton nom.

‑ Yume » se présenta l’Épéiste.

Inconsciemment, dans un geste de réflexe, le jeune homme lui avait machinalement tendu la main pour se présenter. Amusée, la princesse Falky lui serra l'index de ses deux petites mains. Puis elle s'envola en direction du cœur de l'Arbre aux Fées, avant de disparaître derrière les branchages.

Un sourire amusé aux lèvres, Yume reprit sa route, bien qu'il ne savait pas réellement où il se rendait.

Ses pas le menèrent cette fois-ci sur la place centrale de Buxih. S'arrêtant à proximité de la statue de la Déesse, Yume profita du faible éclairage des flammes pour mieux la détailler. Ce visage… Oui, l'avait déjà vu. Il avait rencontré la Déesse en personne. C'était elle, il en était persuadé.

« Tu pensais à moi ? Comme tu es mignon ! » s'exclama soudainement une voix fluette dans son dos.

Le jeune homme fit volte-face. Un sourire angélique plaqué sur son visage enfantin, se tenait désormais juste devant lui l'étrange petite fille qu'il avait rencontré hier à Fikternand. Mais également la même silhouette qui était représentée en marbre. La Déesse en personne.

Comme pour vérifier qu'il ne rêvait pas, Yume alterna son regard entre le petite fille et la statue. Pas de doute : il s'agissait bien de la même personne.

Cette action répétitive arracha un rire discret à la fillette.

« Tu dois te poser énormément de questions, affirma-t-elle en recouvrant son sérieux.

‑ Et comment ! »

Le blondinet commença par désigner la statue de son index.

« C'est réellement toi ? Je veux dire : t'es réellement la Déesse ou alors tu te fais passer pour elle ? »

Les mains dans le dos, la blondinette afficha un sourire malicieux. Elle commença à tourner lentement autour de l'enfant de marbre, comme pour faire durer le suspense. Puis elle regagna sa place.

« Ca dépend de quel côté on se place, dit-elle mystérieusement.

‑ Comment ça ? »

La petite fille posa un doigt sur sa bouche, joueuse.

« Secret !

‑ Quoi ? Non ! Je veux savoir ! supplia le jeune homme.

‑ Ca ne sert à rien de te brusquer maintenant. Les réponses viendront en temps et en heure. »

La blonde plongea soudainement ses yeux péridots dans les iris lagons de Yume. Elle lisait dans son esprit.

« Je crois que tu venais pour une toute autre chose » changea-t-elle de sujet.

Yume se passa une main dans les cheveux, mal à l'aise à l'idée que cette enfant puisse lire en lui aussi facilement.

« Eh bien…, débuta l’Épéiste.

‑ Chut, ne dis rien, ordonna la petite fille. Laisse ta conscience me parler. Elle en sait plus que tu ne le crois. »

Un long silence s'ensuivit. Leur conversation se résuma à se regarder intensément dans le blanc des yeux.

« Elle est plus fiable que toi » brisa-t-elle soudainement.

Yume ouvrit la bouche pour riposter, mais la blondinette leva une main pour le faire taire immédiatement.

« Donc, ce sont les paroles d'Astrid qui te perturbent.

‑ Mais comment fais-tu pour…

‑ Peut-être devrais-tu ne plus y penser, conseilla celle qui ressemblait traits pour traits à la Déesse.

‑ Ne plus y penser ? s'emporta l'ancien membre de l’Élite. Si c'était si facile, je ne serais pas dehors à l'heure qu'il est ! »

Un sourire en coin naquit sur les lèvres de la fillette. Le jeune homme serra les poings, ne semblant pas apprécier la manière dont elle aimait se moquer de lui.

« Tu t'approches de la vérité, dit-elle. Peut-être même que tu l'as déjà trouvée. Cependant, ce n'est pas seulement ça qui te maintient éveillé.

‑ Pardon ?

‑ Interroge ton cœur, et tu auras ta réponse.

‑ Quoi ? »

Yume porta une main à sa poitrine. Comment était-il censé s'y prendre, au juste ?

« La réponse viendra le moment venu, termina la petite fille. Maintenant excuse-moi, mais le temps en dehors de ma tour est compté.

‑ Ta tour ? répéta le blondinet en fronçant les sourcils.

‑ Qui sait, peut-être nous y retrouverons-nous une fois là-bas ? »

Sans un mot de plus, la blondinette tourna les talons, laissant Yume d'autant plus en proie au doute. Cependant, elle s'arrêta soudainement, et pencha la tête en direction du jeune homme, comme si elle venait de se souvenir de quelque chose d'important.

« Ne te torture pas trop l'esprit, laisse ton subconscient s'en charger. Pour l'instant, protège tes deux amies du mieux possible. »

La petite fille lui adressa un dernier sourire. Puis son corps s'évapora de nouveau, se transformant en vapeur.

« Ne pas se torturer l'esprit ? marmonna-t-il dans sa barbe. Plus facile à dire qu'à faire… »

Finalement, s'il ne serait pas sortit de sa chambre, ses pensées en auraient était moins troublées. Le jeune homme n'avait pas besoin, en plus de sa crise existentielle, de se questionner sur les étranges apparitions qui venaient à lui dernièrement ! Sans parler de l'affreux rêve qu'il avait fait la nuit dernière…

Le froid et la fatigue commencèrent à se faire sentir. Yume décida de rebrousser chemin et de rentrer chez Fab et Tip.

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