Chapitre 22

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"Je t’en envoie par la poste ?"

Je souris en voyant la photo que Julien avait joint à son message.

Il était en tablier de boulanger, coiffé d’une toque plate, pouce levé. Derrière lui, une fournée de brioches pralinées dorait dans le fournil.

"Oui, mais alors glisse-toi dans le colis aussi," tapai-je en guise de réponse.

Une part de moi cria que j’étais vraiment ridicule, à me rabaisser à ce genre de mièvreries. C’était d’ailleurs la première fois que je formulais à Julien mon désir de le revoir (même si c’était d’un ton humoristique détourné).

Depuis mon rendez-vous au "Prestige" avec Bruno et Evie – que je n’avais d’ailleurs pas revus entre temps – j’avais petit à petit entretenu un lien avec Julien par messages. Même si c’était purement amical, cela me faisait du bien de pouvoir échanger avec lui.

Je ne savais pas exactement où j’allais comme ça, ni ce que je souhaitais réellement, mais je m’étais dit que cela ne pouvait pas être pire que de subir le poids de son absence en continu. D’une certaine façon, je préférais continuer à me faire du mal en m’attachant progressivement à lui plutôt qu’en l’oubliant progressivement.

Dans le fond, je me voyais avec Julien, je rêvais secrètement de sa bouche contre la mienne, de partager une véritable histoire, quelque chose de fort et de précieux, avec lui.

Restait à savoir comment lui envisageait la suite de son côté, si on pouvait parler ainsi. Je n’étais même pas certaine d’avoir le temps de le revoir prochainement : j’avais certes fini mes partiels, néanmoins je travaillais au cabinet et les recherches pour constituer mon mémoire me prenaient tout mon temps libre. Mais je n’avais pas envie de m’interroger sur les « comment » et les « pourquoi » maintenant. Je voulais seulement profiter sans me prendre la tête.

Oui, je ressentais de vraies choses, quand je pensais à Julien. Oui, il me manquait et j’étais pressée que l’on partage d’autres moments ensemble comme lors de mon séjour à Nanterre. Si possible, sans l’agression dans la rue, cette fois.

Et oui, je commençais à devenir gnangnan, ça m’écœurait mais une fois de plus, je n’avais pas envie de me prendre trop au sérieux, comme toute cette affaire.

Ce jour-là, je me rendis au cabinet d’avocat où j’effectuai mon alternance. Je ne sais pas si c’est juste un effet placébo, mais tout me parut soudain simple au travail, et le soir, la rédaction de mon mémoire me parut plus fluide que d’habitude.

Le lendemain, à midi, durant ma pause repas, je retrouvai deux collègues pour déjeuner ensemble dans un parc proche du cabinet.

Nos manteaux étendus sur l’herbe verte, nous profitions des rayons du soleil du mois de mai. Encore quelques efforts et je validerai mon Master. Ma soutenance de mémoire est en septembre, mais ça m’angoisse déjà.
Bien que mes études me passionnent, je suis soulagée qu’elles touchent bientôt à leur fin. Enfin, je compte intégrer une école d’avocats ensuite, donc disons que j’en aurais seulement fini avec la fac…

Mes collègues et moi partageâmes un pique-nique, puis rentrâmes au cabinet. Un message de Julien attira mon attention alors que je m’apprêtais à reprendre le travail.

"Est-ce que ça te dit qu’on se revoie, un de ces 4 ?"

Mon cœur sembla faire un bond de bonheur dans mon ventre. Il veut me revoir. C’est bon signe. Evidemment, si je ne représente qu’une pote à ses yeux, ça peut tout aussi bien être par simple amitié. Mais dans tous les cas, moi j’ai envie de revoir sa frimousse, alors je réponds :

"Seulement si tu me ramènes une de tes brioches pralinées. C’était cruel de me mettre l’eau à la bouche comme tu l’as fait hier."

Julien m’envoya un peu plus tard son emploi du temps en photo, afin que je lui communique mes disponibilités en fonction des siennes. Je me rendis cependant rapidement compte qu’il serait très compliqué de faire concorder nos moments de temps libre. Il semblait que notre rencontre improvisée à Nanterre avait été une heureuse coïncidence de la fortune.

En effet, Julien travaille désormais tous les samedis à la boulangerie, car ses jours de repos sont maintenant le dimanche et le lundi, et ses horaires sont en totale opposition aux miens. Il n’est pas disponible lorsque je le suis et l’est seulement quand je suis moi-même en cours ou au cabinet d’avocat.

De plus, avec mon mémoire et toutes les démarches pour intégrer une école d’avocat que je dois faire en ce moment, je ne peux pas me permettre de sortir les dimanches. J’ai du travail par-dessus la tête, mais je suis certaine que je pourrais rapidement dégager au moins une demi-journée pour le retrouver.

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