Chapitre 46

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– Allez, un peu de nerf, m’encouragea Julien, en me tirant à lui.

Nous avions passé une excellente soirée, la veille, à notre retour de la ville. Le somptueux dîner de Noël préparé par nos hôtes nous avait ravi, et le reste de la nuit, passé entre l’allégresse d’une conversation animée et beaucoup d’alcool local, s’était révélé tout aussi réjouissant.

Après une grasse matinée et un déjeuner relativement léger – il fallait dire que mon estomac et mon foie n’étaient pas en mesure d’accueillir plus d’une salade normande – nous nous étions de nouveau effondrés sur le canapé de l’accueil.

Julien, qui s’était mis en tête de faire une randonnée en forêt avant notre départ, malgré la météo toujours aussi catastrophique, m’avait motivée à le suivre.

– Je ne sais pas trop, Ju, marmottai-je, un peu étourdie après m’être levée si brusquement, je te dis que j’ai attrapé froid, hier…

Comme pour accentuer mon propos, je reniflai et sortis un mouchoir de ma poche.

– Mais non, ça va nous faire le plus grand bien, insista Julien, en laçant ses chaussures de marche. Et tout de même, ce serait dommage de quitter ce beau site sans avoir fait le moindre tour dans le parc naturel !

– On le voit bien, d’ici, le parc, protestai-je encore, en désignant la baie vitrée de l’accueil.

– Mais c’est le moment, il y a une accalmie, regarde !

La pluie avait en effet cessé de tomber par trombes sur la forêt, même si le vent semblait plus violent que jamais.

Privée d’excuses supplémentaires, je soupirai et me préparai à sortir.

Nous marchions depuis plus de deux heures, plongés dans une discussion intense, sans ressentir le froid, ni le vent qui secouait les branches des arbres autour de nous. Finalement, ce n’était pas si désagréable, une fois qu’on était lancés… Le plus dur avait été de sortir du confort de la chambre d’hôtes pour affronter les bourrasques fraîches et l’humidité, mais désormais entrainés dans une cadence rythmée, nous n’étions plus touchés par la température.

– Est-ce que l’itinéraire qu’on a pris était une boucle ? demandai-je alors, en réalisant que notre vive conversation nous avait entrainé sur un nouveau chemin sans nous en rendre compte.

– Je me souviens plus, répondit Julien, le panneau était pas très clair, faut dire…

– Je ne sais plus non plus. Alors est-ce qu’on continue, ou on fait demi-tour ?

– Si tu te rappelles du chemin pour rentrer, on peut faire demi-tour ici, répliqua Julien, mais on a bifurqué plusieurs fois de voie et je suis pas sûr de parvenir à me rappeler comment rentrer. Je serais plutôt d’avis qu’on poursuive jusqu’au prochain panneau, pour se repérer.

Réalisant soudain que nous avions tracé notre route sans conscience de notre destination, je songeai :

« Eh bien, ça ne va pas être de la tarte, de retrouver notre chemin… Il y a tellement de tracés de randos différents, on aurait dû prêter plus attention à nos pas, au lieu d’être aussi absorbés par notre discussion… »

Au milieu d’une bourrasque particulièrement violente, le bruit d’une branche qui craque nous fit lever la tête d’un même mouvement.

– Attention ! s’écria Julien, en me poussant sur le côté.

Un instant plus tard, une large branche d’épicéa s’abattit à l’endroit où je me tenais juste avant.

– Wow, ce n’est pas passé loin, soufflai-je, fixant le morceau de bois au sol, médusée.

De grosses gouttes de pluie s’écrasèrent alors à nos pieds. Il avait fait un temps plutôt raisonnable depuis le début de notre sortie, mais le temps semblait désormais se gâter rapidement.

– Trainons pas, marmonna Julien, en passant un bras derrière mes épaules. Viens, on va faire demi-tour, je pense que t’as raison, c’est mieux.

Après une heure de marche sous un déluge de plus en plus violent, je demandai à faire une pause pour boire.

– Il n’y a presque plus d’eau, constatai-je, en soupesant la gourde que Julien avait emporté dans un petit sac-à-dos.

– Ça fait rien, je pense qu’on est plus très loin de la chambre d’hôtes, répondit-il, l’air cependant peu confiant.

En effet, depuis que nous avions rebroussé chemin, une heure plus tôt, nous avions tenté de nous repérer au mieux, en suivant plusieurs tracés différents, selon les indications des panonceaux qui surmontaient les rares piquets de balisage. Mais comme nous n’avions pas été attentifs à l’aller, il nous était difficile de retrouver le bon itinéraire.

Comme la veille, la pluie battante avait eu vite fait de changer la terre des chemins en une humide gadoue, ponctuée de larges flaques boueuses.

– Regarde sur Maps, qu’on en finisse, marmonnai-je, je commence à avoir froid.

– Pas de réseau, pesta Julien, après plusieurs tentatives. Je peux même pas appeler les gérants de la chambre d’hôtes pour leur demander des infos.

Je soupirai de frustration, consciente que nous allions devoir nous dépatouiller seuls pour rentrer.

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