La Compagnie

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Les portes s'ouvrirent à la volée et un brancard poussé par deux pompiers investit la pièce. Un homme d'une certaine corpulence s'y trouvait allongé. Un troisième pompier à cheval sur lui pratiquait un massage cardiaque.

  • Homme blanc, cinquante-cinq ans, en arrêt, dit l'un d'eux.
  • On l'a pris en charge il y a une vingtaine de minutes, continua un second. On a fait au plus vite, mais avec la circulation c'était pas évident !

Le docteur Fournier s'avança vers le patient.

  • Merci messieurs, dit-elle. Je prends le relais !

Je prends le relais, pensa Martin, foutaises ! C'est encore nous qui allons devoir le gérer !

Les pompiers se retirèrent, laissant la médecin avec les deux internes, Martin et Gaëlle.

  • Humbert, continue le massage. Gaëlle, prends le relais s'il faiblit, on commence à avoir l'habitude avec cette mauviette ! grogna-t-elle.

Connasse, après une garde de bientôt trente heures pour la troisième fois de la semaine, je pense normal d'avoir fait un malaise il y a deux jours. De toute façon, cette vieille peau se décharge de tout son travail sur nous. Résultat, elle se la coule douce à la machine à café ! Et encore, quand elle n'y rajoute pas un peu de whisky ! Et cette manie de m'appeler par mon nom de famille !

  • Je reviens dans deux minutes. Vous deux, vous avez sa vie entre les mains, continuez le massage.
  • Docteur, intervint Martin, le patient est déjà bleu, il est trop tard pour lui…
  • Faites ce que je vous dis !

Le docteur Fournier quitta la salle, laissant les deux internes avec le patient sans vie.

  • Quelle sorcière ! cracha Martin. Cette pourriture n'est plus bonne à rien ! Elle nous traite comme de la merde alors qu'on s'occupe de tout pour elle ! En plus, elle doit avoir au moins cent vingt ans cette vieille bique !
  • Calme-toi, répondit Gaëlle. On fait ce qu'elle demande, sinon on va encore tout se prendre en pleine face. Et pour ta gouverne, elle vient d'avoir soixante-huit.

Les deux jeunes internes continuèrent pendant de très longues minutes. Fournier ne revenait toujours pas.

  • Je suis sûr… qu'elle nous a… oubliés, cracha Martin au rythme du massage qu'il administrait au patient.
  • Je te remplace, c'est mes cinq minutes.
  • D'accord. De toute façon il est déjà mort, c'est trop tard pour lui. Heureusement que cette vieille peau avait dit deux minutes !

Quarante-cinq minutes s'étaient écoulées depuis le départ du docteur lorsque celle-ci daigna enfin revenir.

  • Eh bien, où en est-il ?
  • Toujours dans le même état docteur. Gaëlle m'a remplacé mais on n'a pas d'amélioration, on arrête ?
  • Bien sûr que vous arrêtez ! Vous auriez dû vous arrêter il y a longtemps, on a d'autres patients dans cet hôpital ! En plus de ça, tu laisses cette pauvre Gaëlle faire tout le travail !

Martin serra les dents. Il lui aurait bien donné une gifle ou deux ! Ce monument du passé ne devait certainement plus savoir ce que les mots « sauver une vie » signifiaient. Il consulta sa montre.

  • Heure du décès : 23 h 52, reprit-il.
  • Bien, je m'occupe de la paperasse. Filez vous deux, on vous attend certainement ailleurs !

Martin ravala sa fierté et quitta la pièce, suivi par Gaëlle. Une rage immense naquit en lui. Il n'avait jamais souhaité la mort de quiconque, au contraire, il dévouait sa vie à sauver celle des autres. Mais avec elle, c'était différent. Si seulement elle pouvait disparaître… Il parcourut les couloirs du service des urgences silencieusement en direction de l'accueil. Son téléphone vibra dans sa poche. Il le sortit, vit pour la énième fois un numéro qu'il ne connaissait pas et rangea son portable. Il s'appuya sur le comptoir de la réception et sourit à la femme d'âge mûr qui se trouvait derrière.

  • Qui est le suivant Mylène ?
  • Monsieur Delaunay. C'est lui, dit-elle en désignant un homme du menton. Sa femme nous l'a déposé en nous disant qu'il faisait régulièrement des malaises. Ça va avec Fournier ? Je sais qu'elle peut être dure à vivre avec les hommes…
  • M'en parle pas !

Il prit un ton charmeur avant de poursuivre.

  • Je te raconterai tout ça un soir autour d'un verre si ça t'intéresse. Tu sais à quel point j'en ai envie !
  • Et tu sais que j'adorerais, répondit-elle de la même façon. Mais je pense que mon mari ne sera pas tout à fait d'accord.
  • Et ça me tue de te savoir avec lui Mylène, plaisanta-t-il. Pourrons-nous un jour avoir une chance ?
  • Qui sait, soupira-t-elle en souriant. Un jour, alors que je serai vieille et gâteuse, tu pourras t'occuper de moi.
  • Tu sais bien que je ne demande qu'à m'occuper de toi, Mylène.
  • J'en ai des frissons !

Il s'avança vers son prochain patient et lui sourit.

  • Monsieur Delaunay ? Bonjour monsieur, suivez-moi je vous prie.

L'homme s'exécuta et ils entrèrent dans une petite pièce au centre de laquelle trônait une table d'examen.

  • Je vous en prie, asseyez-vous ! Alors, que vous arrive-t-il ?
  • Ben, ma femme dit que je fais des malaises, mais moi j'ai jamais r'marqué… J'pense que c'est juste que des fois j'suis dans mes pensées, vous voyez docteur ?
  • Bien, nous allons voir ça, je vais vous ausculter.

Martin prit le stéthoscope qu'il avait autour du cou et le posa sur la poitrine de l'homme. Ce dernier sursauta au contact du métal.

  • Ah !
  • Attention ça va être un peu froid.
  • Oui, j'ai bien senti !
  • Ne parlez plus et respirez normalement…

Après avoir placé son instrument à plusieurs endroits sur le torse du patient, il reprit la parole.

  • Tout a l'air normal, je vais quand même vous faire passer un électrocardiogramme.
  • Qu'est-ce que c'est ? Ça fait mal ?
  • Non, sourit Martin, rassurez-vous, c'est très rapide et totalement indolore. Je vais vous poser des électrodes, des sortes de pansements en somme, qui vont servir à mieux écouter votre cœur.
  • Ah ! Vous êtes gentil vous, vous expliquez bien !
  • Ah ah ! C'est normal monsieur, je suis là pour prendre soin des patients, pas pour les traumatiser !

*

*   *

  • Eh bien, vos résultats ont l'air normaux, je ne comprends pas d'où viennent vos malaises. Êtes-vous fatigué en ce moment ? Vous dormez bien ?
  • Pardi oui ! s'exclama le patient. J'ai jamais aussi bien dormi depuis que j'suis retraité ! À soixante-neuf ans, comprenez, c'est pas trop tôt !

Martin prit une feuille de papier et commença à écrire. Un son strident et continu résonna dans la pièce.

  • Je vais vous prescrire quelques analyses, on n'est jamais trop prudent ! Vous êtes stressé en ce moment ? Monsieur ? Monsieur !!

Le sang du jeune interne se glaça. Le son provenait de l'appareil, indiquant que le cœur du patient s'était arrêté. Il poussa sa chaise violemment et entreprit un massage cardiaque.

  • J'ai un arrêt ! hurla-t-il.

L'homme revint à lui, déboussolé de voir le jeune homme au-dessus de lui.

  • Eh là, qu'est-ce que vous faites ?
  • Monsieur, vous étiez en arrêt cardiaque !
  • Ah bon ? J'ai rien r'marqué moi !
  • C'est certainement la cause de vos malaises répétés, je pense qu'il vous faut un pacemaker…

La porte s'ouvrit à la volée et le docteur Fournier s'engouffra dans la pièce, ainsi que deux autres médecins.

  • Qu'est-ce qu'il se passe ici, grogna Fournier, je ne vois personne en arrêt. Encore un de vos petits jeux stupides, Humbert ?
  • Non, docteur, répondit Martin, ce patient était vraiment en arrêt, son cœur a tendance à…
  • Fermez-la ! Et allez donc prendre l'air, je prends le relais.
  • Bien docteur, cracha-t-il.

Il se tourna vers son patient et lui sourit.

  • Je vous souhaite un bon rétablissement, monsieur Delaunay.
  • Merci docteur, vous êtes vraiment gentil, vous !
  • Il n'est pas docteur, grogna la vieille femme. Et de toute façon il ne le sera jamais, soyez-en sûr ! Allez, Humbert, foutez-moi le camp ! Je finis mon service dans dix minutes, j'ai pas envie de réparer vos conneries !

Le jeune homme serra les dents et partit en vitesse. Il traversa en un éclair les couloirs de l'hôpital et poussa la porte qui menait à l'extérieur. Il s'époumona pendant de longues secondes avant de fermer les yeux. Il laissa l'air frais caresser son visage et estomper peu à peu sa rage.

  • Monsieur Humbert ? Monsieur Martin Humbert ?

Il se retourna et aperçut un homme en costume noir à côté de lui, une mallette à la main.

  • Je suis désolé, répondit Martin, je n'ai pas pour habitude de crier de la sorte…
  • Ce n'est rien enfin, vous n'avez pas à vous justifier, pas avec moi. Puis-je vous entretenir quelques instants, monsieur Humbert ?
  • C'est à quel sujet ?
  • Vous avez dû recevoir un courrier et quelques appels téléphoniques récemment, je suis Michel Lambart, représentant de La Compagnie.

Martin se souvint des appels manqués cette semaine. Il avait également reçu une magnifique lettre manuscrite avec un sceau de cire rouge, l'informant qu'un dénommé Michel Lambart entrerait en contact avec lui dans les prochains jours, concernant quelque chose d'important. Chaque mot, soigneusement inscrit avec une encre de qualité, ajoutait au document une touche artistique presque irréelle. Lettre simplement signée « La Compagnie ».

  • Je n'ai pas vraiment le temps pour ça, je dois retourner au travail, on est débordés en ce moment. Et puis, j'ai tout ce qu'il me faut, je vous remercie.
  • Je n'ai absolument rien à vous vendre, monsieur Humbert, et je vous promets que je ne serai vraiment pas long, dix minutes tout au plus ! Il est capital que je m'entretienne avec vous.
  • Bien, dans ce cas, je vous écoute, mais soyez bref, s'il vous plaît.
  • Je ne suis pas vendeur de magazines, ou d'objets soi-disant miracles, je ne pourrais pas vous vendre quoi que ce soit même si j'essayais. Cela dit, ce dont je dois vous entretenir nécessite un endroit plus… discret.

Martin hésita quelques instants avant de céder.

  • OK, que dites-vous d'une salle de réunion ? À cette heure-ci, personne ne l'utilise.
  • Ce serait parfait, je vous remercie monsieur Humbert.

Les deux hommes marchèrent un moment, puis entrèrent dans une pièce vitrée, donnant sur les couloirs de l'hôpital. Martin présenta une chaise d'un geste de la main à son interlocuteur qui s'exécuta, puis il s'assit en face de lui. Il consulta sa montre.

  • Vous avez dix minutes.
  • Je vous remercie. Bien, je vais être bref et concis. Ce que je m'apprête à vous dire relève du plus grand secret, et ne devra en aucun cas être révélé. Les conséquences pourraient être désastreuses. La panique gagnerait les habitants du pays, et même, du monde entier, causant d'irréversibles dommages collatéraux.

Il marqua une petite pause.

  • Garderez-vous le secret ?
  • Très bien, répondit Martin amusé.
  • Bien. La Compagnie repose sur des principes extrêmement simples, le premier d'entre eux étant le pilier fondateur de notre organisation. Maintenant, vous ne partagerez peut-être pas notre avis sur ce premier point, et j'aimerais le savoir dès à présent, si vous le permettez. En effet, la manière dont je vais vous informer de ma mission dépendra du fait que vous partagiez, ou non, notre point de vue.
  • C'est-à-dire ?
  • Je dois savoir s'il est nécessaire d'y mettre les formes, ou si je peux aborder le sujet de manière franche. Mais rassurez-vous, monsieur Humbert, ajouta-t-il en riant, la finalité ne changera pas. Faites-moi confiance !
  • Je vois. Quel est ce principe ?
  • Eh bien, nous pensons que certaines personnes en ce monde ne méritent pas de continuer à vivre…

Le jeune homme se redressa légèrement sur son siège. Il se demanda s'il avait bien compris ce que monsieur Lambart venait de déclarer.

  • Voilà, je l'ai dit ! Voyez-vous, certains de mes confrères mettent en doute mon approche très… Disons crue, de la chose. Ils préfèrent adopter une version plus douce, plus feutrée. J'ai cependant de bien meilleurs résultats qu'eux. Alors monsieur Humbert, que pensez-vous de ce que je viens de dire ?
  • Je ne peux être d'accord avec une telle affirmation, tuer est un acte abominable ! Personne ne devrait tuer un autre être humain.
  • Je me suis mal exprimé, monsieur Humbert, pardonnez-moi. Pensez-vous que la peine de mort soit utile ?

Martin se leva de sa chaise et marcha face à une vitre de la pièce. Le va-et-vient incessant des médecins s'était calmé à cette heure. Il ne restait que quelques patients dans la salle d'attente visible à l'autre bout du couloir.

  • Elle n'est plus en vigueur en France depuis des années, bien avant ma naissance.
  • Vous avez raison. Cela dit, elle est encore en vigueur dans d'autres pays.
  • Dans certains cas bien spécifiques, je suppose qu'elle est méritée, oui. Mais seule la justice peut décider de qui doit vivre ou mourir.
  • Ah, serait-il donc question de qui doit exécuter la sentence selon vous ?
  • Je suppose qu'on peut dire ça.
  • Alors permettez-moi de vous poser une autre question osée. Avez-vous déjà souhaité la mort de quelqu'un qui, selon vous, ne méritait plus de vivre, monsieur Humbert ?

Le jeune homme, d'abord déboussolé par cette question, eut l'image du docteur Fournier en tête. Devant le silence de son interlocuteur, l'homme reprit.

  • Attention, je ne parle pas de vouloir tuer quelqu'un… Non, simplement de vouloir que cette personne disparaisse purement et simplement de ce monde pour une raison ou une autre. Une envie tellement profonde de voir cette personne disparaître qu'elle vous hante jour et nuit.
  • Je n'en sais rien, je n'y ai jamais vraiment pensé, mentit Martin. C'est possible, reprit-il après un temps d'hésitation.
  • Donc selon vous, il se pourrait que dans certains cas, un individu en moins sur Terre soit bénéfique pour certaines personnes ?

Martin s'esclaffa.

  • Vous êtes quoi comme société, une agence de tueurs à gages ?
  • Pour reprendre vos propos, je suppose qu'on peut dire ça, répondit Lambart en riant à son tour.

Le visage du jeune homme se crispa.

  • Cependant, il n'y a absolument aucun aspect criminel dans nos actes ou nos méthodes. Nous sommes effectivement une société secrète dont je suis le représentant français, je vous l'accorde. À vrai dire, nous sommes répartis dans le monde entier. Supposons que je vous raconte comment nous nous sommes développés…
  • Il vous reste huit minutes.

Monsieur Lambart sourit.

  • Cela sera suffisant. Notre création remonte à 1947. À l'origine, deux jeunes hommes de Paris, un avocat et un psychologue criminel, furent appelés à participer à un procès judiciaire. Un homme était jugé pour l'enlèvement, la séquestration, la mutilation, le viol et le meurtre de deux jeunes enfants. Il était indéniablement coupable.
  • Mon Dieu, quelle horreur !
  • Une bonne défense et un jury influençable ont conduit à la libération immédiate de l'accusé. Lors de l'annonce du verdict, nos deux amis étaient furieux. Submergés par la rage. Ils savaient que quelque chose de mal venait d'être fait. Mais ils étaient, hélas, impuissants.
  • Malheureusement, ces choses arrivent.
  • Je dois vous préciser quelque chose sur ce psychologue. Il s'intéressait de près à des pratiques étranges, du genre de celles de certaines tribus, comme enfoncer des aiguilles dans une poupée par exemple. Il a noté un aspect remarquable dans tout cela. Y croire peut rendre certaines choses possibles. L'histoire d'une mère soulevant une voiture en flammes pour sauver son enfant donne la conviction à beaucoup de parents qu'ils en seraient eux aussi capables. Mais si croire en quelque chose nous permet de sauver une vie, croire pourrait-il nous permettre d'en prendre une ?
  • C'est possible.

Monsieur Lambart sourit.

  • Le psychologue voulait tester cette théorie. Il a proposé à son ami l'avocat de l'aider à la vérifier. Tous deux étaient convaincus de la culpabilité de cet homme. Lui qui avait fait souffrir ces pauvres enfants et était reparti libre.
  • Comment ?
  • C'est justement ce qui devient intéressant. Ils sont allés voir cet homme. Ils lui ont clairement annoncé leur intention. Ils allaient souhaiter de toutes leurs forces le voir mort. Bien évidemment, l'homme leur a ri au nez, mais ils ont pu sentir une légère peur dans son regard. Voyez-vous, de nombreuses personnes sont superstitieuses, et c'est là la clé du procédé. La cible doit y croire. Même juste un peu.

Martin se rassit sur sa chaise, mal à l'aise.

  • Ils lui ont annoncé que chaque jour, ils souhaiteraient ardemment le voir mort. Jusqu'à ce qu'eux même ne puissent plus stopper le processus qui allait faire de ce souhait une réalité.
  • OK, c'est un peu tiré par les cheveux…
  • Deux mois plus tard, il décéda d'une crise cardiaque.
  • Bien sûr, ça s'appelle une coïncidence.
  • Évidemment, nos deux amis ont pris cette éventualité en considération. Ils ont donc réitéré l'expérience pour écarter cette possibilité.
  • Ils l'ont refait ?
  • Oui, et cette fois, ils ont demandé de l'aide à cinq autres personnes. Ce petit groupe formait le noyau de la société que je représente aujourd'hui. À ce jour, nous sommes plus de trois cent mille à travers le monde.
  • Trois cent mille ?!
  • Absolument. Si vous ne me croyez pas, j'ai ici de quoi vous convaincre.

L'homme déverrouilla sa mallette et en sortit un épais dossier qu'il ouvrit et présenta à Martin. De nombreux documents y étaient regroupés. Certificats de décès, photos de scènes de crime, rapports de police et d'autopsie. Toutes ces personnes étaient bel et bien décédées. Martin s'agita sur sa chaise, la sueur commença à perler sur ses tempes. Il pensa au docteur Fournier, cet horrible être abject. Il trouva une liste de noms.

  • À ce jour, nous avons par nos souhaits retiré plus de mille deux cents personnes dont les noms figurent sur cette liste. Ce sont les photos de leurs cadavres, dans ce dossier. Voyez également que certaines personnalités y figurent, comme l'ancien président Kennedy. J'insiste bien sur le fait que nous ne l'avons pas tué, nous ne savons pas qui l'a fait. Notre liste de cibles à éradiquer contient actuellement trois cent quatre-vingt-deux noms qui finiront eux aussi par mourir. De plus, je dois vous informer que depuis la création de notre organisation, certaines choses ont changé. À présent, n'importe qui peut figurer sur notre liste des personnes à éliminer, pour peu qu'un de nos membres en fasse la demande. Nous développons de nouvelles techniques, plus performantes, plus rapides, plus efficaces, chaque jour.
  • Et ils vont tous mourir ?
  • Oh que oui. Tout à la fin de ce dossier figure notre liste de membres, allez-y, appelez-en un, dix, mille si vous le souhaitez, appelez tous ceux que vous voudrez monsieur Humbert.
  • Non, je vous crois, savoir que des milliers de personnes souhaitent votre mort, c'est suffisant pour créer la panique chez n'importe qui. Mais comment faites-vous pour trouver de nouveaux membres, étant donné que vous êtes une société secrète ? Et pourquoi venir me voir, moi ?
  • Très bonne question monsieur Humbert, très bonne question. Voyez-vous, nous avons des contacts un peu partout dans le monde qui nous soufflent des noms de personnes susceptibles d'être intéressées par La Compagnie. Quant à vous, monsieur Humbert, votre nom m'a été communiqué, d'où la raison de ma présence ici.
  • Je vois. Mais j'ai une question. Où est le piège ? Quel est le coût ?
  • Pour nous rejoindre ?
  • Oui, répondit Martin en se reculant sur sa chaise.
  • Juste la volonté de nous apporter quelqu'un à éradiquer et d'apporter un soutien infaillible à notre cause. C'est-à-dire que les nouveaux entrants doivent eux aussi souhaiter la mort de personnes dont on leur communique le nom.
  • Compris !
  • Et des frais d'adhésion.
  • Je le savais !
  • Cinquante euros.
  • Cinquante euros ?
  • Notre lettre manuscrite les vaut, vous en conviendrez.
  • Vraiment ? demanda Martin incrédule. C'est tout ?
  • Notre organisation n'est pas centrée sur le profit, monsieur Humbert. Les frais d'adhésion ne sont là que pour couvrir les dépenses, je suis sûr que vous comprenez ça. Alors, intéressant comme système, non ?

Le docteur Fournier passa devant la salle de réunion sans les apercevoir. Une chance ! Cette sorcière aurait encore trouvé quelque chose à dire à son sujet !

  • Elle doit savoir ? Est-ce que la victime doit savoir ?
  • C'est absolument essentiel, la victime doit être informée.
  • Très bien, monsieur Lambart. Vous m'avez eu ! Où dois-je signer ?

La question surprit ce dernier. Il hésita un moment.

  • Oh, je suis désolé, vous ne pouvez pas nous rejoindre, monsieur Humbert. Je suis ici pour vous informer que vous êtes sur notre liste.

Monsieur Lambart se releva, ajusta son costume et regarda sa montre.

  • Je suis désolé, j'ai pris une minute de plus que prévu. Bonne soirée, monsieur Humbert.

L'homme prit congé, laissant Martin seul dans la salle. Une pression extrême lui serra la poitrine. Son souffle se coupa. La sueur coulait sur ses tempes. Il se leva et courut à travers les couloirs de l'hôpital pour retrouver monsieur Lambart. Sa course effrénée le mena jusqu'à l'extérieur. Il scruta le parking sans trouver la moindre trace de l'homme. Une petite voiture passa devant lui, le docteur Fournier au volant. Cette dernière lui adressa un sourire malsain, puis se dirigea vers la sortie du parking.

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