Je sors enfin du placard

2 minutes de lecture

Enfin... Dire que ça faisait des années que j'étais planquée, tout au fond de ce tiroir. J'étais passée, allez savoir comment et pourquoi, en dehors de mon compartiment normal de rangement. Du coup, normal, j'ai été oubliée, toute seule, inutile.

Là, ça y est, elle m'a retrouvée !! Elle a l'air si contente ! Pensez-donc, j'étais sa préférée quand elle était jeune. J'ai fait tous ses déménagements. Je l'ai suivie partout, même dans ses chambres d'étudiante ou dans ses stages à l'étranger.

Et ça fait pffff au moins trois ans que je n'avais pas vu la lumière du jour... Là, elle me regarde dans tous les sens, tellement heureuse de m'avoir redécouverte. Je suis un peu terne et poussiéreuse, c'est vrai. Mais au bout de toutes ces années, qui serait restée propre ?

Waow, je sens de l'eau tiède sur moi, un peu de Paic citron, mon préféré, et ça mousse partout. Je vais être de nouveau toute brillante. Un petit coup de rinçage avec toujours de l'eau tiède, juste la bonne température pour moi et puis un passage dans un torchon tout doux. Voilà, je suis belle comme un sou neuf, je brille de mille feux !

Elle se dirige vers le frigo, l'ouvre. Oh... Mon retour à la vie va être fabuleux. Je le sens, je le sais, elle va m'aimer de nouveau et moi je vais tellement l'adorer en retour. Dans ce frigo, elle se saisit d'un yaourt. J'entends ce bruit si caractéristique de l'opercule du pot qu'on ouvre, comme un appel d'air irrépressible. Elle le décolle complètement et l'approche de sa si jolie bouche.

Elle sort une langue rose, délicatement ourlée, humide et pleine de papilles sensibles. Elle promène cette langue sur l'opercule, récoltant jusqu'à la moindre trace de cette crème blanche et onctueuse qui s'y trouvait. Elle ne laisse rien, léchant avec délice (si si, je sais qu'elle a fermé les yeux, tellement elle aime ces laitages), ce bout de papier métallisé, jusqu'à ce qu'il brille comme s'il était neuf.

Maintenant, je sens que ça va être mon tour. Lentement, elle me plonge dans cette crème onctueuse et fraiche. Puis elle me ressort et m'approche de ces lèvres. Ces lèvres si délicieusement rouges foncé, d'une sensualité folle, qui s'entrouvrent à mon approche, puis s'écartent franchement pour se refermer sur moi. Elles me plongent dans le noir absolu de sa bouche, mais quelle chaleur, quelle moiteur !

A mon tour j'ai droit aux caresses si sensuelles de sa langue douce et humide. Il ne reste vite plus rien sur moi, je suis moi aussi brillante comme un miroir. J'aperçois de nouveau le jour quand elle entrouvre sa jolie bouche, avant de me retrouver en pleine lumière et puis de replonger dans ce pot en plastique.

Alterner le frais du yaourt et la chaleur de sa bouche, la douceur de ses lèvres, de sa langue. Décidément, c'est quand même d'une sensualité folle, la vie d'une petite cuillère, non ?

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