Course surprise 

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Allez, vas-y un effort ma belle, se répétait-elle en boucle pour se motiver. Depuis une semaine, chausser ses baskets pour fouler les chemins caillouteux des bords de Loire ne l'enthousiasmait pas. Les quinze derniers jours avaient été difficiles, les missions s'étaient accumulées. Les journées de vingt-quatre heures ne suffisaient plus. Les piles de dossiers s'amoncelaient, le travail la submergeait. Elle développait un sens de l'organisation au millimètre, pourtant les grains dans le sablier lui échappaient. La jeune femme courait dans tous les sens, elle gravissait les étages quatre à quatre. À ce rythme effréné, la vie filait trop vite. Le soir venu, elle enfilait ses running pour s'offrir une bouffée d'oxygène et tenter de rattraper le temps qui s'enfuyait à chacune de ses enjambées. Parcourir des dizaines de kilomètres, manquer de souffle, sentir ses muscles tirer, voilà les ingrédients d'une recette magique concoctée jour après jour. Son prochain objectif était de s'inscrire à un trail. Pure folie, au simple goût de l'effort, elle était prête à aller au-delà de ses limites. Se prouver qu'elle pourait soulever des montagnes. L'horloge du four la rappela à l'ordre, soit elle partait à l'instant, soit il valait mieux oublier pour ce soir. C'était sans compter sur son compagnon de toujours, Tex attendait assis au pied de sa chaise. Cette sortie était aussi la sienne. Il poussa avec son museau les chaussures, la paire gisait sur le carrelage, abandonnée à leur triste sort.

  • Bon ok, tu as gagné on y va.

Le chien se redressa et se précipita pour s'installer devant la porte d'entrée. Flavie sourit, finalement son berger allemand avait une fois de plus eu le dernier mot. Comment résister à son regard insistant et charmeur ? L'animal était son meilleur coach sportif. Jamais, il ne l'a laissée tomber et toujours l'aidait à se relever. Elle saisit son petit sac à dos et chopa la bouteille d'eau au passage. Elle allait sûrement batailler dur pendant plus d'une heure. La sueur deviendrait sa meilleure alliée en cette fin de journée épuisante. Elle pourrait éjecter ses soucis à chaque foulée et vider sa tête. Avant de se lancer, ses pas réguliers composaient une mélodie calme sur le trottoir. Elle longeait la départementale, puis augmenta le rythme pour permettre à son chien de se caler. Arrivée sur le chemin qui menait en bord de fleuve, loin des bruits de la ville et de l'agitation des retours dans les cités dortoirs, elle lâcha Tex pour qu'il puisse gambader selon son bon vouloir. Docile et bien élevé, il ne courat pas loin de sa maîtresse. Il s'avérait être le bodyguard idéal. En éclaireur, il préparait le terrain. Le duo réalisait le même parcours deux soirs par semaine et empruntait un itinéraire différent le vendredi.

  • Tex, où tu vas ? Tu te trompes, on est mercredi. Viens là.

Que lui arrivait-il ? Ce n'était pas dans son habitude de ne pas revenir quand elle l'appelait. Il avait peut-être senti quelque chose de particulier. Elle essaya de le rattraper, accéléra la cadence, sa respiration devint désordonnée. Cette pointe de vitesse n'était pas du tout prévue et ce soir où elle aurait voulu maintenir un rythme léger, elle entreprenait un sprint intense. Elle sentait qu'elle entrait dans le rouge. Son chien n'était pas visible et à l'effort s'ajoutait une pointe d'angoisse. Le chemin s'enfonçait dans la forêt. Le sol, moins carrossable, s’avérerait un entraînement royal pour sa future course. En ce mercredi soir, elle s’en serait passée. Mais pour le coup, si cela était un subterfuge de son berger allemand, il était encore plus malin qu'elle ne l'aurait imaginé. La course poursuite s'acheva quand elle entendit des aboiements répétés. Elle se stoppa net et regarda autour d'elle pour essayer de l'apercevoir. Quand enfin sa silhouette se dessina dans le lointain, elle retrouva son souffle. Courir en apnée n'était pas la meilleure idée de l'année. Son compagnon ne bougeait plus.

  • Tex, qu'est-ce qui t'a pris de partir ainsi ?

Elle baissa son regard, allongé dans les feuilles, un homme. Il ne bougeait pas. En l'observant plus attentivement, quelque chose l'interpella. Pourquoi semblait-elle le connaître ? Ce n'était pas la première fois qu'elle le voyait. Elle essaya de rassembler ses pensées, mais pour l’heure, il y avait urgence. Ses cours de secourismes allaient lui être enfin utiles. Elle devait avant tout vérifier s'il était toujours conscient. Elle s’approcha de son visage et du bout des doigts l’effleura. Avec son index passa délicatement sur sa barbe naissante pour ensuite s’égarer sur ses lèvres d’où s’échappa un léger souffle. Ce filet d’air la rassura, elle poursuivit son auscultation sommaire et posa ses deux doigts sur sa carotide pour découvrir un pouls régulier. Quand sa main passa sur son torse, elle apprécia les dessins de ses pectoraux, ils prenaient du relief à chaque respiration.

  • Est-ce que vous m’entendez ? glissa-t-elle à son oreille.

Pas de réponses, elle frôla son crâne, ébouriffa ses boucles brunes à la recherche d’une éventuelle bosse ou cicatrice. Le cuir chevelu était intact, pas de trace de sang, ni d’impact. Tous ses signes vitaux répondaient, lui, pas du tout. Même s’il avait fait un malaise vagal ou autres, elle ne serait pas à même d’intervenir. Le mettre en position latérale de secours serait le plus adapté en attendant les pompiers. Elle regarda son portable, le téléphone n'affichait aucun réseau et bientôt plus de batterie. C’était bien sa veine, comment avait-elle pu oublier de le charger ? Elle attrapa le bras du blessé pour essayer le plus doucement possible de le faire basculer sur le côté. Tex s’était allongé et il ne bougeait pas d’une oreille. Elle aperçut la tenue du sportif, l’écusson sur son maillot lui disait vraiment quelque chose. Était-ce le moment de s’attarder sur de tels détails ?

  • Evidemment. Tex, c’est le gars que l’on croise le vendredi. Il court avec son groupe. Il nous fait un signe de la main et nous sourit. C’est pour ça que sa tenue me parle. D’ailleurs ils sont où ses potes ? Rappelle-toi, la semaine dernière, il y en a un qui m’a sifflée. Quel gougeât quand j’y pense et je me souviens que je me suis bêtement retournée pour lui dire ma façon de penser et je l’ai vu le nez dans l’herbe.

Flavie continuait à parler à voix haute, qui sait peut-être que l’entendre dire tout et n’importe quoi le réveillerait. À moins que ce soit elle qu’elle essayait de rassurer. Elle vérifia les parties visibles du blessé, ses doigts cheminaient sur sa peau. Elle fut surprise de découvrir des frissons parcourir les bras de l’homme inconscient. Son visage semblait calme et apaisé, aucun stigmate d’une souffrance quelconque n’apparaissait. Elle saisit son téléphone, une notification, son ami Max s’inquiétait de son retard. Mais comment avait-elle pu oublier qu’elle devait le rejoindre au restaurant ? Elle eut juste le temps d’envoyer « un imprévu, on remet ça demain … » et écran noir. Décidément ce n’était pas la fête, le soleil se couchait au travers des arbres, les glissant peu à peu dans la pénombre. Comment allait-elle pouvoir s’extraire de cette situation ? Bien sûr personne dans les parages. Le bouger n’était pas envisageable, elle pourrait aggraver les blessures non visibles. Le laisser tout seul avec son chien serait la meilleure option. Avec Tex à ses côtés, il ne risquerait rien.

  • Bon Tex, bouge pas de là, je vais essayer de rejoindre la route pour appeler les secours. Tu veilles sur lui. Je ne serai pas longue.

Flavie se redressa, avec sa main droite, elle s’appuya sur le tronc mort à sa portée, son pied ripa et elle se retrouva nez à nez avec le coureur allongé. Elle sentit la chaleur de son souffle se déposer sur sa joue. Un sentiment agréable l’envahit. Pourquoi n’avait-elle tout à coup plus envie de bouger ? Elle était tombée sous le charme des yeux rivés dans les siens. Dans son regard, une étincelle crépitait. Il reprenait vie, le volcan endormi se réveillait et ses sens rentraient en ébullition. Le sourire lumineux du vendredi venait d’apporter une éclaircie dans l’obscurité de ce mercredi insensé. Il l’observait, elle rougissait. Il voulait parler, elle attendait. Ses mains s’approchèrent des siennes, leurs doigts se croisèrent. Un lien se tissa délicatement entre les deux êtres. Pas besoin de dire mots, ils consentaient à poursuivre le chemin que leur index traçait sur la joue de l’autre. Elle échappa une larme qu’il essuya avec tendresse. Ce geste emplit de sensualité, la bouleversa.

  • Rassure-moi, ce n’est pas un canular, demanda Flavie sous le coup de l’émotion.
  • Non, je pensais plus à un rencart.
  • Une idée sortie de ton placard ?
  • Oh une idée comme ça, un pur hasard.
  • Enfin là, tu m’as mise dans le bazar.
  • Pas sûr il n’est pas encore trop tard.
  • Et bien je n’ai aucune envie de bouger, c’est bizarre.

Julien s’assit face à sa sauveuse, avec tendresse il ôta la mèche échappée du chignon avant de venir poser ses lèvres sur les siennes. Un bouche à bouche voluptueux débuta entre les deux sportifs. Tout s’accéléra, les langues se mêlèrent, l’étreinte fut légère. Ils partagèrent avec gourmandise l’eau de la bouteille de Flavie, le liquide se déversa sur leur langue. Goulûment, ils s’abreuvèrent à la source de leur désir. Quelques gouttes s’échappèrent dans le décolleté de la belle. Julien ne quitta pas la chute du liquide entre ses seins, le débardeur révéla ses tétons tendus. Il ne put résister à poser son pouce sur leur extrémité pour les titiller avec subtilité. Tout son corps en réponse se tendit. Allait-il s’arrêter à ce délicieux contact ? Serait-il convenable de s’étendre bien plus ? Tout échappait à son contrôle. Voulait-elle plus ? Flavie ne comprenait pas ce qui se passait. Il y a à peine quelques minutes, elle désespérait de ne pouvoir l’aider et maintenant ce n’était plus de son soutien dont il avait besoin. Les rôles étaient inversés, elle se sentait défaillir à ses assauts.

  • Tu as envie de te laisser tenter ? lui demanda Julien.
  • Oui sans hésiter.
  • Envie de perdre pieds ?
  • Je crois bien et sans regrets.

Il l’attrapa par la taille et la souleva dans ses bras, leurs lèvres à nouveau s’unirent dans un baiser langoureux. Un marathon entre leurs corps débutait, chaque mouvement de terrain accompagnait leurs ébats. Il plaqua son dos contre le tronc d’un chêne majestueux. Elle pouvait sentir les battements de son cœur se caler à son rythme. Les préliminaires d’une course folle débutaient. Les mains trottaient à la découverte de chaque parcelle cachée, celles auxquelles elle n’avait pas eu accès jusqu’à présent. Les gestes se précipitèrent, le chrono était lancé. Des désirs fous les envahissaient. Concours de coïncidences ou ascension des émotions, ils accédaient aux plaisirs de l’autre. Une simple épreuve dans les péripéties de cette soirée au cœur de la nature. Leurs bouches partaient en excursions, chaque déplacement était un argument supplémentaire pour un lâcher prise de plus érotiques. Franchir l’arrivée pour connaître la jouissance ultime. Les obstacles s’esquissait sur leur corps, lui souhaitait accéder aux mamelons de la belle sans passer par la case départ, elle voulait dévoiler l’étendard de plus en plus à l’étroit dans son short.

  • Ah moi de t’accorder toute mon attention, dit Flavie en se penchant.
  • Dans tes yeux brûlent le feu de la passion.
  • Mes mains vont t’offrir une sensuelle sensation.
  • Ne me laisse pas ainsi, au bord de l’éruption.

Flavie s’agenouilla et avec gourmandise se saisit de sa hampe pour l’enrober de ses lèvres. Elle commença de longs va-et-vient, sa langue errait sur cette élégante friandise. À chaque incursion prolongée sur son gland, il échappait un râle profond. Les doigts de Julien posés sur la tête de la belle affamée, paressaient dans ses longues mèches mordorées. Il reproduisait le même parcours qu’elle avait emprunté pour vérifier son état de santé. Il était au bord de l’implosion à chaque fois que son palais heurtait la pointe de son pénis. Progressivement, il s’échappa de son emprise pour à son tour la combler. Il ne serait pas le seul à succomber sur ce lit de feuilles. Ses doigts se faufilèrent pour s’amuser à flatter son intimité. De fines perles s’échappèrent, traçant la trajectoire à suivre pour qu’il puisse s’abreuver à sa source. Ils faisaient la navette, ne voulaient pas rompre le contact qui les reliait. Ils franchissaient avec volupté les paliers de cette sublime virée charnelle. Ce corps à corps les mena au bord de l’extase, une succession d’orgasmes les emportèrent jusqu’à ce merveilleux bouquet final qui les terrassa lorsqu’ils franchirent main dans la main l’arrivée. Essoufflés et comblés par ce trekking sauvage, ils s’allongèrent l’un contre l’autre. Les deux s’endormirent en espérant qu’à leur réveil leur partenaire de course ne se serait pas évaporé.

Attrape rêve

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