Chapitre 2 (partie 2/2)

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Arme en main, le Guerrier-Cuistot s’approcha furtivement des peaux-vertes. Il se plaça dans leur dos, puis d’un simple geste de la main, lança le signal. Borbon s’exécuta, la corde de l’arbalète claqua ! Le carreau siffla dans l’air avant de transpercer le crâne d’un des archers gobelins, le décapitant presque ! Tel un rapace qui fond sur sa proie, Joshua se jeta sur les gobelins !

Le premier fut un gobelin armé d’un tranchoir et équipé d’une cotte de mailles, si le bruit de l’arbalète l’avait alerté, il ne réagit cependant pas assez vite ! La Vorpoêle lui brisa la nuque comme une allumette. Il s’écroula dans la neige dans un bruit étouffé. En entendant le son de la chute du cadavre, ses camarades se retournèrent.

Assez vite pour voir les coups mais pas pour les éviter, Joshua fit appel à une nouvelle technique de son art : le « Poêle-furie » et alors le disque d’adamantine fit pleuvoir un torrent de coups précis et mortels !

Les os des gobelins explosèrent et leurs chairs furent broyées par la puissance des coups du Guerrier-Cuistot ! Aucun des peaux-vertes ne put porter le moindre coup avant de mourir, tous rendirent l’âme sans comprendre ce qu’il se passait. De son perchoir, Borbon Saché avait assisté à toute la scène. Il en était resté bouche-bée, il n’avait même pas eu besoin de tirer son deuxième carreau. Le soldat descendit du rocher et rejoignit Joshua, les yeux toujours ronds comme des billes.

-Joli tir, dit le jeune homme au teint ambré.

-Euh…merci, beau combat. Balbutia le semi-homme.

Il ne voyait pas quoi dire d’autre.

Joshua de son côté était préoccupé et sur ses gardes, s’attendant à entendre d’autres gobelins, mais il n’entendit rien. Pourtant ses petits monstres se déplaçaient toujours en grand groupe. La présence de ces éclaireurs était très alarmante. Il devait vite retourner au camp et alerter le convoi.

Sans perdre plus de temps, le guerrier-cuistot chargea les cinq dépouilles sur ses larges épaules. Encore une fois, Borbon fut étonné de l’écart entre la taille du jeune humain et sa force de taureau.

-Vous…comptez les manger ?

Joshua afficha un regard affligé au semi-homme. Sur le même ton neutre il expliqua son intention de faire son rapport avec les cadavres comme preuves, avant de dévaler la pente vers le campement.

Borbon ne trouva rien à répondre et s’engagea à la suite du guerrier-cuistot.

Il ne leur fallut pas très longtemps pour rejoindre le convoi. En voyant le jeune homme semblable à un bloc d’ambre s’approcher avec son étrange chargement, la capitaine vint aussitôt à sa rencontre.

Joshua laissa tomber son macabre paquetage sur la neige et dit :

-Il va falloir être très prudent capitaine, ces peaux vertes nous attendaient en embuscade.

Sans rien ajouter d’autre le jeune homme s’approcha du feu que la troupe n’arrivait toujours pas à allumer. Joshua savait ce qu’il avait à faire. Il s’accroupit, prit une profonde inspiration et lorsqu’il expira une gerbe de flammes jaillit de sa bouche ! Une des technique de base de son art du combat, le « souffle du fourneau ».

La vue du jet de flammes provoqua une légère panique parmi les membres du groupe. Mais Joshua ne s’en préoccupait guère, trop concentré à allumer le feu et surtout à préparer la pitance.

Dans le pays natal du jeune homme, le royaume Gourmet, l’art culinaire avait une place très importante dans la société. Pour lui et ses compatriotes s’alimenter correctement et y prendre du plaisir était presque aussi sacré qu’une cérémonie religieuse.

Joshua sortit un faitout du paquetage de sa monture, l’accrocha au-dessus du feu avant d’y verser un filet d’huile. Le liquide gras se mit à chauffer puis à frire. Pendant que l’huile chauffait, Joshua sortit un gros quartier de viande ainsi que des légumes. Il éplucha et découpa les ingrédients avec une vitesse et une finesse purement surnaturelles et artistiques pour ses compagnons.

Cette tâche accomplie, il mit la viande à griller dans le récipient. Un délicieux fumet de viande cuite commença à monter du feu de camp et beaucoup se mirent à saliver. Arrivé à un certain stade de cuisson, il versa une dose d’eau dans le faitout avant d’y ajouter les légumes. L’eau se mit à bouillir et les légumes mijotèrent doucement.

Lorsque Joshua estima que la cuisson était suffisante, il prit une pincée d’une épice inconnue et la jeta dans le ragout. L’odeur devint alors alléchante, au point que certains membres du groupes se mirent à baver sans interruption.

Entre temps, Borbon avait fait son rapport à Sorya Romar. La description des compétences du guerrier-cuistot, ne fit que confirmer les soupçons de la haute elfe sur la force de Joshua.

La capitaine s’inquiétait toutefois de la présence des quelques gobelins. Elle s’attendait certes à en croiser mais pas dès leur arrivée dans la zone enneigée du col. L’instinct de la militaire lui criait que quelque chose de grave se préparait. Hélas, Sorya ne pouvait rien faire à part préparer au mieux son équipe pour les événements à venir.

Joshua retira finalement la préparation du feu et clama :

-Le repas est prêt.

Il découpa la viande en plusieurs morceaux pour chaque membre de la troupe, ainsi qu’une portion de légumes fumants et appétissants. C’est avec la même adresse surnaturelle qu’il avait cuisiné le repas, qu’il le servit. Lorsque Sorya reçut son écuelle elle eut plus l’impression de tenir un plat gastronomique qu’une pitance de campeur. La viande rouge et juteuse baignait dans un mince bouillon avec les divers légumes. Ces derniers étaient dorés à la perfection.

La haute elfe prit son couvert et porta une cuillérée du ragout à sa bouche. À l’instant où la nourriture toucha sa langue, ce fut un véritable feu d’artifice de saveurs. Jamais au grand jamais, Sorya n’avait mangé quelque chose d’aussi délicieux.

La chair de la viande fondait littéralement sur les langues des membres de l’équipe, les légumes étaient cuits à la perfection, les épices mystérieuses relevaient le goût à merveille.

La capitaine n’était pas la seule à être réceptive au chef d’œuvre culinaire du Guerrier-cuistot : Borbon pleurait presque alors qu’il dévorait sa portion, les marchandes semblaient totalement subjuguées par le repas.

Le seul à manger normalement était le cuisinier lui-même. Joshua mangeait sa part avec un plaisir non dissimulé, certes mais sans exagération. La haute elfe s’approcha, s’assit aux côtés du jeune homme et demanda :

-Simple curiosité quelle est cette viande que tu nous as cuisinée ?

-Du filet d’hydre des marais madame. Répondit tout naturellement Joshua.

La vétérane se figea, son regard alla du cuisinier à son écuelle.

-Alors c’est vrai, vous cuisinez les monstres au royaume Gourmet ?

Le guerrier-cuistot hocha la tête en silence. La haute elfe n’en revenait pas, en l’espace d’une journée elle avait pu voir de ses yeux les légendes du légendaire royaume se manifester.

Tous les habitants du continent, parfois au-delà, avaient entendu parler de ce pays légendaire et dangereux. Le pays Gourmet était une monarchie matriarcale, où la culture reposait sur deux choses fondamentales : la chasse aux monstres et la cuisine de leur chair.

Les femmes chasseresses traquaient les monstres et leurs hommes, les plus grands chefs cuisiniers du contient d’après certains, en faisaient des créations gastronomiques de premier ordre. Peu de gens se rendaient dans ce pays à cause de sa faune hostile. Personne n’osait attaquer ce royaume, car chacun savait que les chasseresses de la reine Raikane tailleraient en pièce n’importe quelle armée qui aurait la folie d’attaquer leur foyer.

Peu de gens avaient l’occasion de rencontrer l’une des chasseresses hors de son pays, sauf dans le cas où un royaume voisin requérait les services de sa sororité afin de se débarrasser d’un monstre nuisible. Mais leurs hommes cuisiniers eux, seul les ambassadeurs ou les rares voyageurs qui se rendait dans ce mystérieux royaume avait pu les rencontrer. Les quelques témoignages les décrivaient comme totalement dévoué à leur art culinaire, vivant et respirant au rythme de la cuisson de leurs plats. Croiser l’un de ses chefs cuistots si loin au nord du continent était quelque chose d’inédit, Sorya se rendait compte à quel point son escouade et elle étaient chanceux de l’avoir dans leur équipe.

La suite du repas se poursuivit dans une joie bienvenue avant le voyage difficile qui attendait la troupe. Un peu moins d’une heure plus tard, le campement fut plié et tous reprirent la route.

Dans le chariot à l’abri des regards, la demi-elfe sortit de sous sa cape une écuelle encore pleine et la tendit à une petite main sortant d’une des caisses.

-Merci. Répondit une voix de petite fille.

-Mangez, votre altesse.

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