Episode 2 - Bienvenu en enfer (1)

3 minutes de lecture

Retour au présent, anciennement New York, 2648

Un ciel couvert d’épais nuages gris recouvraient la plaine surplombée d’une colline derrière laquelle s’étendait la ville qui ne dort jamais. Une brise fraiche du mois de décembre balayait les feuilles des arbres dispersé çà et là dans l’étendu sauvage. Quelques arbres s’accrochaient désespérément à leurs dernières feuilles brunes d’automne, les autres étaient complètement mit à nu et semblaient greloter. Une fine couche de neige d’un blanc immaculé tapissait le sol de sa douce et fragile beauté. Aux extrémités de la plaine, une forêt sombre et épaisse, habitée par de multiples habitants, discernables grâce aux quelques traces hésitantes fraichement laissées là par un aventurier ou deux. Un couple de rapace chahutant gaiement passa au-dessus de la colline dans un croassement chantonnant. La jeune-femme agenouillée dans la neige leva les yeux vers eux et esquissa un léger sourire.

Elle rabaissa les yeux vers la sépulture qui se tenait là, se dressant fièrement face aux intempéries des saisons. La pierre était simple et d’un gris très clair. Dessus, aucune photo, aucun nom. Une simple épitaphe sur lequel il était inscrit « Repose en paix et restes-y ひめさま ». La jeune-femme déposa un bouquet de fleurs roses au pied de celle-ci et regarda le vent agiter les fins pétales. Ses yeux s’arrêtèrent sur l’inscription, ils s’y accrochèrent comme à une bouée de sauvetage. Le cœur lourd, la gorge serrée, les mains pressées sur la poitrine, elle resta là. Trois ans. Cela faisait trois ans que cette sépulture avait été mise là. Et comme chaque mois, elle se rendait ici, ne manquant jamais un seul rendez-vous. Et comme à chaque fois, debout devant cette pierre tombale elle se sermonnait et se promettait de ne pas revenir. Et chaque fois elle échouait lamentablement.

— Il va bien falloir que toi et moi on se dise au revoir et ce pour de bon, murmura-t-elle son souffle directement emporté par le vent.

La jeune-femme se redressa et épousseta son pantalon couvert de neige.

Elle fixa la sépulture comme si celle-ci pouvait lui répondre. Mais seul le silence résonna sur la colline, accompagné des battements d’ailes des deux rapaces. Encore une fois, elle se jura de ne pas revenir le mois prochain. C’était dangereux. Mais qu’est-ce qui n’était pas dangereux après tout ? Le simple fait de respirer l’était. Vivre était un perpétuelle danger pour elle. Est-ce que tout ça valait-il le coup au final ? Elle se le demandait très souvent. Je t’en prie, vas-y suicide toi, je serais enfin débarrassée du parasite que tu es ! vociféra une voix haineuse dans la tête de la jeune-femme.

— Je te manquerais trop, répliqua celle-ci du tac au tac sans la moindre once d’émotion.

La petite voix ne répondit pas et se retira Dieu seul savait où.

Non, elle ne pouvait pas avoir des idées aussi noires. Elle ne pouvait pas se laisser abattre. Elle n’avait pas fait tout ces sacrifices pour rien. Chaque jour était un éternel combat entre la vie et la mort, mais cela devait bien valoir le coup au bout du compte. Des milliers de questions accompagnaient la jeune-femme, sans jamais qu’aucune réponse ne lui apparaissent. Elle devait attendre de voir. Et se battre. Un jour peut-être aurait-elle enfin l’occasion de vivre libre. Un jour peut-être cesserait-elle enfin d’avoir à se battre. En attendant ce jour, qui ne viendrait peut-être jamais, elle devait avancer quoi qu’il en coûte. C’est eux ou moi. Et ça ne sera pas moi, essaya-t-elle de se convaincre.

Un peu rassénérée, elle se pencha, attrapa une poignée de neige et la jeta en l’air. La petite boule se désintégra et fut portée plus loin par le vent. Les yeux vairons de la jeune-femme suivirent les petits points blancs jusqu’à leur destination, dans une étendue blanche où ils ne firent de nouveau plus qu’un. Satisfaite, elle ferma les yeux et inclina légèrement le buste vers la sépulture avant de tourner les talons et de s’éloigner. Elle descendit la colline, ses cheveux de jais balayés par le vent.

Annotations

Vous aimez lire Rattis Books ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0