Chapitre 46

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Il continuait à pleuvoir dehors, le vent avait redoublé de violence, ses assauts devenaient plus dangereux chaque minute.

Johany était seul dans sa chambre d'hôtel, étendu sur son lit, ses écouteurs dans les oreilles. Il ne voulait plus entendre le rugissement des bourrasques, ni le bruit des poubelles qui s'envolaient dans la rue, percutant les voitures, les murs des bâtiments.

Mais il voulait surtout fuir ses propres pensées. C'était pourquoi Black, des Pearl Jam, résonnait dans ses oreilles. Il se sentait transporté par la musique et par la voix d'Eddie Vedder, loin de la folie extérieure de la nature déchainée.

Le jeune homme passa des heures dans cette position, les yeux fermés, sa musique à fond résonnant sous son crâne. Des tas d'images l'assaillaient, de regrets, des remords...

Lorsqu'il se releva, Boulevard of broken dreams, de Green Day, s'achevait. Il ôta ses écouteurs et mit la chanson qui suivait, Under the Bridge des Red Hot Chili Peppers, sur pause.

Il descendit à l'accueil et dîna une soupe très épicée, qui eut pour effet de lui couper l'appétit jusqu'au lendemain matin.

La tempête ne s'était toujours pas atténuée à son réveil, vers neuf heures. Elle avait même encore empiré. En regardant par la fenêtre de sa chambre, Johany ne reconnut presque pas la rue dans laquelle il avait marché la veille. Des branchages, de larges feuilles qui devaient provenir des palmiers bordant les routes, jonchaient la chaussée. Des détritus et toutes sortes d'objets étaient éparpillés partout. Un palmier était même tombé à quelques mètres, creusant un trou béant dans la toiture en tôle d'un salon de massage.

Johany eut alors peur pour sa vie pour la première fois depuis qu'il avait quitté la France. Il avait pris cette tempête à la légère la veille, ne s'en était pas soucié en songeant qu'elle s'apaiserait dans la nuit et qu'il ne s'agissait que d'un petit orage saisonnier...

Mais s'il était confronté à l'une de ces effroyables tempêtes qui dévastaient les pays asiatiques par temps de moussons, cela changeait la donne. Il se rappela les images des maisons éventrées, écroulées, que la télévision du bar faisait tourner en boucle. Et la population semblait vraiment inquiète, ce qui n'était pas pour le réconforter.

"Pourvu que tout rentre dans l'ordre d'ici cet après-midi..." espéra-t-il mentalement, tout en sachant que les chances étaient faibles.

En effet, le jeune homme ne put mettre un pied à l'extérieur de la journée et resta confiné dans son hôtel, qui par chance lui plaisait beaucoup. Il joua au billard avec deux clients, à l'accueil, écrivit de nombreuses heures dans son carnet et lut longtemps également.

En fin de journée, il se connecta au réseau Wifi payant de l'hôtel pour demander des nouvelles de Dao. D'après le personnel, les 4 000 îles n'étaient pas trop touchées par la tempête, mais il voulait tout de même s'assurer que le jeune homme allait bien.

Ce dernier lui répondit un peu plus tard, exposant que Don Khon était plutôt épargnée pour l'heure, même si les rafales de vent avaient aussi déraciné un palmier, non loin de chez lui.

Johany se coucha un peu rassuré, après avoir englouti un bol de nouilles. Il était cependant plus inquiet pour ses économies : à ce train-là, si la tempête ne partait pas, il serait contraint de trouver un autre endroit pour dormir, même si un refuge moins coûteux serait difficile à dénicher.

Il se forçait déjà à minimiser ses dépenses quant à ses repas, mais n'avait d'autre choix que de rester à l'hôtel : les bus ne reprendraient pas du service de sitôt même si la tempête faiblissait, vu l'état des routes.

Ses songes furent habités par des éclairs et des trombes d'eau, qui inondaient les habitations.

Une vision onirique atroce le réveilla en sursaut au milieu de la nuit. Il épongea son front baigné de transpiration et calma les battements de son coeur emballé par l'adrénaline.

Dans son cauchemar, il nageait à contre-courant dans les rues inondées de Luang Prabang, terrifié à l'idée de se noyer. Il passait devant un bar et en regardant à l'intérieur, il voyait une télévision affichant l'image de Dao, puis celle de son corps recouvert d'un drap blanc.

Lorsque Johany essayait de s'accrocher à la porte ouverte du bar, en hurlant que c'était impossible, il se faisait entrainer par le courant. Il se retrouvait alors à la confluence des eaux avec le Mékong et s'éloignait de la plage de Don Khon où Dao et lui s'étaient baignés.

Le jeune homme mit du temps à se rendormir, perturbé par son rêve et les bruits extérieurs indiquant que l'orage était toujours là, plus puissant et dévastateur que jamais...

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