SANS SUITE 7/ Jour 2 : Action ou vérité (2)

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À mon grand désarroi, au troisième tour, les deux hommes ajoutent un peu de piquant lorsqu'ils optent pour l'action. Pas de place pour l'anxiété, le jeu reprend.

John danse un slow langoureux avec Sybille, puis intime à Lukas de donner un baiser à qui il veut. Ce dernier se redresse et vient se planter devant moi ! À genoux devant moi, ses deux mains sur mes épaules, il plante ses yeux pétillants dans les miens. Son visage est grave. Le mien aussi sans aucun doute. Une douce chaleur m’envahit quand son souffle devient assez proche pour effleurer le bas de ma joue. Il s’écarte alors légèrement pour m’interroger du regard. Paralysée par les battements effrénés de mon cœur, j'attends. Il prend une profonde inspiration avant de déposer un délicat petit baiser sous mon nez. Je vais défaillir. Un autre chatouille mon menton. Le moindre mouvement pourrait briser cet instant merveilleux, je reste immobile. Désire-t-il approfondir ce moment ou se contente-t-il de réaliser son défi ? N’y tenant plus, j’entrouvre la bouche, soulagée quand aussitôt sa langue vient chercher la mienne. Penché au-dessus de moi, son corps m'oblige à m'appuyer sur mes coudes pour rester suspendue à ses lèvres. Il se colle au mien alors que l’un de ses bras glisse derrière ma taille. Sa main libre se pose au sol et l'empêche de m'écraser. Notre étreinte se fait plus insistante, mes doigts caressent ses cheveux et son dos musclé, et nous sommes inconscients de nos amis qui nous observent. Sybille nous sort de notre torpeur :

— C’est bon, Lukas, tu as réussi. Au suivant.

Tous mes sens sont en éveil, je le sens s'éloigner avec un profond regret. Grisée par des sensations oubliées depuis longtemps, je ne parviens plus à suivre ce qu’il se passe autour de moi. Je fais semblant et ris quand ils s’esclaffent, prends un air sérieux et amusé lorsqu'on annonce le défi d'Angie, mais le feu attisé dans l'intégralité de mon corps absorbe toutes mes pensées. Je n'ose même plus tourner la tête vers cet homme qui vient de me rappeler ce que sont l'envie et le désir, d'autant plus que ses traits doivent exprimer toute sa fierté. Il est hors de question pour moi, de supporter son air moqueur, pas après ça.

Mon prénom arrivé jusqu'à mes oreilles m'oblige à sortir de ma torpeur. Indécise, je tenterais bien une action, mais reste méfiante. D'un autre côté, quelle importance ? À la fin du séjour, chacun rentrera chez lui et nous ne nous reverrons jamais. Sauf mes deux amies Sybille et Leandra. Elles seules me connaissent, peut-être mieux que moi-même d'ailleurs. Qu'est-ce qui me retient ? Les autres m'aident à trancher. John s'impatiente, dans l'attente d'un mot de ma part pour annoncer le défi qu'il me réserve. Toutes les têtes sont tournées vers moi. Sybille m'implore silencieusement tandis que Monsieur Perfection me dévisage, hostile. Forcément, il lit mon dilemme sur mes traits. À moins que les deux amis soient habitués à la pratique de ce jeu, et aux pièges qu'ils réservent l'un et l'autre.

Sainte marie Mère de Dieu, c'est comme ça qu'il m'appelle. Eh bien, Sainte Marie Mère de Dieu va leur en boucher un coin ! Pas très sûre de moi, je plante mon regard dans celui de John et clame :

— Action !

Il baisse la tête, redresse les paupières pour mieux m'observer de son regard pervers et me laisse apercevoir son sourire triomphant. Un rapide coup d'œil à Lukas : il regarde maintenant son meilleur copain d'un air intrigué mais insouciant. John reprend la parole, s'adressant plus à moi qu'aux autres :

— Avant de poursuivre, quelques règles dont on n'a pas eu besoin jusqu'ici mais qui deviennent nécessaires : celui ou celle qui refuse sa question ou son défi se verra attribuer un nouveau gage auquel il ou elle n'aura aucun droit d'échapper. L'éventuelle personne désignée pour la réalisation de l'épreuve a l'obligation d'accepter sa nomination en tant qu'objet, sous peine d'être punie aussi. Dîtes-moi, si vous n'avez pas compris.

Pour quelle raison acquiesçons-nous tous ? Il y a sûrement un truc dans l'air que nous respirons et qui brouille nos pensées et nos actes. John reprend, à mon intention :

— Carly, seras-tu cap de provoquer le désir... chez Lukas ?

Ma voix m'abandonne face à une proposition aussi débile ! C'est tout simplement dégradant ! Tous paraissent aussi choqués que moi. Lukas attend, pratiquement allongé, un coude dans le sable, son visage amusé dans sa main. Il croit que Marie-Mère de Dieu va se dégonfler et il a bien raison.

— Rapproche-toi de lui ! m’ordonne John.

Son ton est devenu cassant, pressant, et ses yeux verts brillent d’impatience, voire d’excitation. Ma décision de choisir action a dû les surprendre, alors ils me provoquent.

— Je refuse. Tu me demanderas quoi, après ? De lui faire une fellation ? Tu es vraiment un grand malade !

— Je n’irai pas jusque-là, sois tranquille. Je ne suis pas non plus celui pour qui tu me prends. Souviens-toi seulement des règles que tu as acceptées.

— Bien. Dans ce cas, je quitte le jeu.

— Je ne te le conseille pas. Tu le regretteras si tu pars, et si tu n’apprécies pas Lukas, tu me haïras avant que j'en ai fini avec toi. Ces dix jours vont te paraitre les plus longs de ta vie, crois-moi. Alors agis maintenant !

— Je sors mon Joker.

— Il n'y en a pas. Les règles, Carly, les règles du jeu…

Dans quelle situation me suis-je laissée entrainer ? Mes deux amies restent muettes. Les yeux exhorbités de Leandra passent de l'un à l'autre alors que Sybille semble plutôt intéressée. Lukas, quant à lui, arbore toujours son rictus moqueur.

Mon cerveau fume, à la recherche d'une faille à exploiter pour me tirer de là, quand une réflexion m'ouvre de nouvelles perspectives. John a bien dit "provoquer le désir" ? Il me demande d'allumer son pote, en fin de compte. Ça devrait être possible.

— Ok. Vous voulez jouer ? Jouons. Préparez-vous à assister à un grand spectacle !

Je me maudis de ne porter qu’une fine robe blanche alors que John lâche une retentissante approbation.

Je m’étais levée pour partir et les abandonner à leur divertissement, alors je pivote pour faire face à Lukas et le fixe, tout en m’agenouillant. C’est dans cette position que je me dirige lentement vers lui, tête haute et poitrine en évidence.

Tiens, il a remis son jean et son tee-shirt à mon insu.

Il s’est rassis, une jambe repliée sous l’autre, tendue, et son sourire a disparu. Ses sourcils légèrement froncés prouvent son étonnement, mais une pointe d’amusement et de curiosité subsiste encore.

À quelques centimètres de lui, je marque une pause et le fixe, le regard impassible. D’un geste, je lui intime de me faire une place entre ses deux membres, qu'il deplie. Je me rapproche et pose mes cuisses sur les siennes, face à lui, très près de lui.

À mon tour de jouer. Sans quitter son visage des yeux, mes deux bras entourent sa taille tandis que mes mains passent sous son polo. Mes doigts effleurent son dos, son cou puis ses épaules. Je lui laisse croire que je vais redescendre sur son torse. Mes ongles reprennent le chemin en sens inverse, lentement, en frôlant sa peau. Ils dessinent ensuite le tour de sa ceinture puis longent les deux côtés de son corps pour retrouver ses épaules musclées. Mes mains caressent délicatement ses biceps, mais le maillot les empêche de poursuivre leur route. Marche arrière.

Je reviens à son cou où mon majeur suit la forme de son visage, mais le tee-shirt entrave encore mes gestes. Lukas s’écarte légèrement pour passer le tissu au-dessus de sa tête et l’envoyer valser plus loin. Mes mains libérées lissent ses sourcils, esquissent l’arête de son nez puis dessinent ses lèvres entrouvertes. Mon majeur s’immobilise une ou deux secondes et fait mine de pénétrer dans sa bouche. Je sens son souffle, il est plus fort qu'au moment du baiser.

Mes doigts reviennent sur ses épaules et tels un pinceau, brossent les muscles de sa poitrine, puis les creux créés entre ses abdominaux. J’entends les murmures de nos spectateurs. Je dois les ignorer car Lukas ne m'a pas encore donné la réaction espérée. J’attends qu’il ferme les yeux, ou que sa respiration se fasse irrégulière, ou même un tressaillement.

J’aimerais l’embrasser, laisser mes lèvres prendre la place de mes mains. J’ai envie qu’il réponde à mon désir lui aussi mais nous ne sommes pas seuls et je suis forcée de faire abstraction des besoins de mon corps. Une chose est sûre, nous serions à l’abri des regards, mon défi serait déjà accomplit, dépassé même.

Mon index revient à sa ceinture où il glisse pour en faire le tour. Première vraie réaction : Lukas capitule et s’allonge en essayant de m’entraîner avec lui. Allongée sur lui, je n’aurai plus autant d’aisance pour le caresser, alors je résiste. De plus, c'est mon défi, c'est à moi de mener la danse, pas à lui. 

— Carly, je crois que tu as réussi ton épreuve Q’en penses-tu Lukas ?

John serait-il choqué ? Peu importe ; c’est son problème. Il m’a provoquée ; le résultat en sera mon sourire triomphant.

Comment a-t-il nommé le partenaire d’une épreuve ? Un jouet, c’est ça. Ledit jouet n’a pas répondu à la question. Il scrute toujours mon visage, dans l’attente. Tu n’en as pas eu assez, mon coco ? Allons-y.

En me déplaçant un peu pour atteindre le haut de son corps parfait, je rencontre… son érection ! Ce n’est pas cette preuve que je veux montrer aux autres. Il doit abdiquer, avouer ma réussite. Et puis je veux plus, en particulier faire l’amour avec cet homme.Ce désir inassouvi va me tenir éveillée une bonne partie de la nuit, car il est déjà trop tard ; mon corps réclame ses caresses, ses baisers ; il demande à découvrir l’amant parfait qu’il promet de se révéler.

Je reprends l’exploration de son torse. Sa bouche est toujours entrouverte, et ses paupières commencent à se baisser, provoquant de fines rides au coin de ses yeux. Je m’appuie légèrement sur ses pectoraux, et les presse délicatement de la paume. Puis mon pouce, titille ses tétons dressés. Je caresse maintenant tout son torse, dans un rythme désordonné. Ses mains viennent se poser sur mes hanches, tandis que la chair de poule apparait sur sa peau. Les frissons me parcourent aussi. Les mouvements de sa poitrine se précipitent, en même temps que ma propre respiration. Il attrape mon visage en se redressant et c’est avec un râle de soulagement qu’il vient coller ses lèvres sur les miennes. Nos langues se trouvent immédiatement et d’une petite pression dans mon dos, il me colle encore à lui. Alors que sa bouche s’écarte pour atterrir dans mon cou, il murmure :

— Tu as gagné.

— Plus fort, que les autres entendent aussi.

— Tu as gagné ! crie-t’il, renfrogné.

Je fais appel à toute ma volonté pour le repousser et me remettre sur mes jambes. Bon, elles sont flageolantes, mais je parviens à me tourner vers John pour lui adresser mon sourire de triomphe. Il applaudit, suivi par mes amies et Angie. Lukas ne les imite pas. Il m’observe, une expression à la fois narquoise et satisfaite affichée sur le visage. Il devrait être déçu, non ? Enfin, il détourne le regard pour récupérer son tee-shirt.

— À toi, Sybille.

Angie ne trouve rien de mieux à lui proposer que reprendre avec Lukas là où je me suis arrêtée. Je suis une nouvelle fois muette de stupéfaction. Où vont-ils chercher leurs idées ? Des images de vieux films dans lesquels les orgies étaient courantes me traversent l’esprit. C’est ridicule !

Lukas refuse, ce qui me rassure quelque peu :

— Non !

Mon amie aussi conteste. Leandra est déjà debout, prête à s’enfuir. John semble partagé par contre. À mon avis, il est attiré par Sybille et en désaccord avec cette idée malgré son esprit joueur.

— Souvenez-vous des règles, tous les deux. Si vous vous défilez, vous avez un gage pire. Cependant, je suis à court de propositions, alors Lukas, tu as été le premier à te rétracter, tu seras donc le premier à subir ta punition.

— Je prends.

— Ok. Je meure d’envie de voir comment tu vas rendre à Carly ce qu’elle t’a donné. À toi de jouer. Sybille, je manque d’originalité car je commence à m’ennuyer, mais je sais ce que tu vas faire. Tu vas embrasser langoureusement John. Quand vous serez tous trop en transe pour continuer sur la plage, nous pourrons rentrer.

Je ne m’attendais pas à cela. Lukas non plus d’ailleurs, car il m’interroge du regard. Face à mon absence de réponse, il revient se planter devant moi, appuie sur mes épaules pour m’allonger et s’étend près de moi, ou plutôt contre moi. Mon visage dans ses deux mains, il me susurre à l’oreille :

— Je me moque de leur petit jeu. Mais tu vas subir une petite vengeance pour m’avoir laissé en plan.

Ses doigts effleurent le tissu fin de ma robe. Ils caressent mon dos et mes épaules dénudées. Il se colle encore à moi tandis que sa main passe doucement sur ma hanche, puis sur mon ventre et poursuit sa course entre mes seins. L'une de ses jambes cherche à se coincer entre les miennes. Je résiste.

Nous sommes tournés vers Angie et un homme que je ne connais pas. C'est le trou noir en ce qui concerne cette apparition. Puis le dernier défi de la jeune femme me revient à la mémoire : elle devait se trouver un partenaire dans les groupes voisins. Mon cerveau ne contient aucun souvenir de cette scène.

Lukas caresse maintenant ma cuisse, toujours à travers la robe. Je tressaille lorsque l'un de ses doigts rencontre ma peau et se réfugie sous l'ourlet, en remontant jusqu'à l'aine. Ma main sur la sienne l'arrêter malgré les pulsations qui se répercutent jusque dans mon intimité. Que fait-il ?

Debout, il me tend ses paumes pour m'aider à me redresser. Sa bouche s'empare de la mienne et son corps collé au mien m'oblige à reculer en direction des arbres. Adossé à un pin parasol, il me presse contre lui en pétrissant mes fesses. N'importe qui peut passer par là ; il se pourrait qu'on nous observe déjà.

peut-être perçoit-il ma réticence car il entrelace nos doigts et m'entraîne vers les villas. Il se déplace si vite que je cours presque pour le suivre. Est-il excité à ce point que c'en devient une urgence ? L'humidité entre mes jambes me rappelle que je me trouve dans un état similaire. Lukas ralentit l'allure par moment, pour m'embrasser fiévreusement, amplifiant encore notre désir.

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