La faucheuse revit le jour de sa mort.

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Dalia avait disparu de la circulation depuis trois jours et tout le royaume des morts s'inquiétait de ne pas voir revenir la patronne. Elle prenait beaucoup de risques en désertant car son travail n'était pas seulement de tuer, il consistait à gérer tout le royaume, donner des ordres, accepter ou refuser des entrées de défunts personnes ou êtres surnaturels, ainsi qu'une ribambelle de responsabilités à entretenir. Si une seule obligation était oubliée, tout pouvait être déréglé dans le monde des morts comme dans celui des vivants. Cependant, la faucheuse n'avait pas oublié qu'elle pouvait perdre définitivement son rôle si elle ne faisait rien. Et bien qu'elle avait disparu depuis des jours, elle avait tué un nombre impressionnant d'humains. Cette situation était alarmante, Dalia pouvait-être en train de perdre le contrôle et ça n'annonçait rien de bon pour le futur. Même Roger ne réussissait pas à la localiser avec leur lien très fort.

Le squelette errait dans les lieux où de son vivant il avait passé ses meilleurs et ses pires moments de vie, plus particulièrement le moment de sa vie où il avait réalisé que sa mort venait.

Dalia avait renié et enfoui pendant si longtemps les souvenirs de sa vie humaine, que le flash qui était apparu sous ses paupières lui avait brutalement tout fait remonter à la surface et elle n'avait pas vu d'autre solution que de fuir pour rester seule.

Depuis qu'elle avait revu son image humaine, elle ne cessait de revivre le jour de sa mort tragique.

Par une belle journée de printemps, Dalia Curson jeune adulte âgée de vingt-ans, se réjouissait de revoir son fiancé Kellan qui s'était absenté quelques jours pour ses vacances en tant que célibataire.

— Mon chéri, tu m'as tellement manqué !

— Toi aussi, ma Dalia, toi aussi.

Le couple se prit dans les bras en souriant.

— Je t'ai préparé une journée fantastique, à commencer par une promenade spéciale.

La blonde souriait grandement, totalement admirative de l'homme avec qui elle s'apprêtait à vivre toute son existence.

Sans plus parler, Kellan prit la main de sa fiancée et la guida jusqu'à la voiture avant de lui bander les yeux.

Tout le long du trajet, la jeune femme posait des questions pour deviner quel était le lieu, mais c'était sans compter sur son amoureux qui gardait le silence.

Après une dizaine de minutes de route, Kellan stoppa la voiture pas loin d'une falaise. Il hauta le bandeau des yeux parfaitement maquillés de Dalia et la fit descendre. Puis avant de se diriger dans l'herbe, Kellan sortit une couverture et un grand panier de pique-nique.

Dalia s'avança énergiquement jusqu'au bord de la falaise, impressionnée par la beauté, la hauteur et la mer qui se trouvait à une distance si lointaine de l'endroit où elle se trouvait.

— C'est fabuleux, Kell ! Cette vue, je veux la voir chaque jour de ma vie !

— Justement, rejoins-moi, mangeons et je te dirai quelles autres surprises t'attendent.

Elle obéit, pressée de savoir ce qu'il cachait.

Tous deux grignotèrent tout ce qui composait le panier, c'est-à-dire des fruits frais coupés en morceaux, quelques sandwich gourmands et du chocolat.

— Qu'avais-tu à me dire, mon amour ?

— Cette journée sera ta dernière en tant que femme libre, es-tu vraiment prête à t'engager ?

— Bien sûr !

— Dans ce cas, je dois te dire que je me suis permis d'acheter une maison pour nous deux, et cette demeure se trouve à un kilomètre d'ici. Elle donne vue sur la falaise et un peu sur la mer, alors tu pourras t'en délecter chaque jour !

Dalia ne sut quoi répondre tant elle croyait rêver. Elle sauta dans les bras de son merveilleux fiancé.

— Je suis si chanceuse de t'avoir dans ma vie ! Tu es une bénédiction !

Le couple termina vite nu, à se donner de l'amour, sans que la jeune femme ne sache que c'était la dernière fois de sa vie.

Tout se déroula rapidement par la suite. Les deux jeunes adultes étaient vers le bord de la falaise à regarder l'horizon, en sous-vêtements. Dalia ne vit pas son fiancé disparaître quelques secondes pour aller chercher son arme puis revenir vers elle. Ce fut donc une sacré surprise lorsqu'elle sentit une partie de son visage brûler à cause d'un jet d'acide jeté par son conjoint.

Elle hurlait de douleur en suppliant Kellan de l'aider, car elle ne savait pas ce qu'il se passait. Mais ce dernier ne bougea pas, il la fixait en attendant qu'elle soit entièrement défigurée mais ce moment n'arriva pas puisque la jeune femme comprit que le coupable était son bien-aimé.

— Qu'est-ce que tu as fait ? !

— Je pense à mon futur. Tu as toujours fait de l'ombre à ta soeur et ça lui a causé du tort pendant de longues années ! Je le fais pour elle, et pour moi. Je l'aime.

Il ne laissa pas le temps à Dalia de parler, ou assimiler. Prenant son élan, il la poussa de toutes ses forces dans le vide, et attendit d'entendre ou de voir son corps s'écraser le long des rivages marins. Lorsqu'il fut sûr qu'elle ne se relèverait jamais, il rangea ses affaires et conduisit jusqu'à la maison de la femme qu'il aimait réellement. Il entra en trombe à l'intérieur et cria de bonheur.

— Je l'ai fait ! Nous pouvons vivre notre amour aux yeux de tous !

— Qu'est-ce que tu as fait Kellan ?

— J'ai tué ta soeur, pour toi, pour nous !

— Tu as quoi ?

— Tu m'as dit tellement de fois que tu voulais que ta soeur soit morte, pour que tu puisses exister et être heureuse. Par amour, j'ai réalisé ton voeu.

La jeune femme s'écroula au sol, en pleurs.

— Sors de chez moi, espèce de monstre, je ne veux plus jamais te voir ! Jamais je ne serai avec toi ! Et je ne l'ai jamais voulu !

Ils se battirent pendant de longues minutes et la situation, déjà dramatique, le devint encore plus. La plus jeune soeur tua à son tour, l'homme qui avait tué sa soeur dans la journée. Par la suite, elle s'évanouit de choc, sa nuque se brisa contre un coin de table pointu.

Dalia ne put s'empêcher de se sentir terriblement attristée par tous ses souvenirs, si tragiques. Une larme coula de chaque oeil, et elle se surprit à pouvoir pleurer. Après tout, elle était un squelette, mais il fallait croire que son côté humain existait toujours.

Elle ne savait pas si elle serait en paix en pardonnant son ex fiancé de l'avoir tuée, mais une chose était sûre, elle n'en voulait pas à sa petite soeur d'avoir tué Kellan. Et elle était reconnaissante d'avoir une seconde chance dans le monde immortel, bien qu'elle ne doive tuer pour vivre. Elle remerciait Azazel de l'avoir secrètement suivie et pour une raison toujours inconnue. Azazel n'avait finalement pas que du mauvais, et elle l'avait oublié.

La faucheuse entendit dans sa tête la voix de Roger qui la suppliait de rentrer. Il lui confia en même temps qu'il n'avait pas pu la localiser, mais qu'il avait vu ses souvenirs, dont sa mort et qu'il était désolé pour elle.

— Je rentre mon Roger. Désolée de t'avoir inquiété.

Elle fit son retour dans le royaume des morts quelques heures après, et fut accueillie avec beaucoup d'amour, même si elle souhaitait juste être seule pour digérer le fait que ses souvenirs et sensations d'humain étaient de nouveau activés en elle.

Roger se coucha auprès d'elle, silencieux mais prêt à la soutenir coûte que coûte.

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