Acte 14 : L'ARMEÉ DE L'APOCALYPSE - Chapitre cinquième

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— Salut les Troll-spectateurs ! Bonjour, chère Janette.

— Bonjour chers Troll-spectateurs ! Bonjour, cher Marcel.

— Alors, quel article à vous glacer le sang allez-vous nous faire découvrir aujourd'hui, Janette ?

— En réalité, l'article du jour est assez... chaud. Si vous voyez où je veux en venir, Marcel.

— Pas du tout, Janette. Développez, je vous prie.

— Je préfère laisser ce soin à notre pigiste.

— Mais, vous rougissez Janette. Que vous arrive-t-il donc ? C'est la ménopause ?

— Je vous en prie, cher Marcel. Ce n'est pas parce que vous m'avez trouvée la tête dans le frigo la semaine dernière que j'ai des bouffées de chaleur. C'était juste un reste de cheese-cake qui me faisait de l'oeil. C'est d'ailleurs ce même morceau de gâteau que vous veniez chercher, me semble-t-il.

— Oui... bon... euh... lançons l'article !

*

Luxure

Estimant avoir assez paradé, Abigail Bowen s’éclipse de la salle de réception pour gagner le bar du Four Seasons. À en croire les regards envieux des femmes et les mines gourmandes de la gent masculine, elle a fait forte impression dans sa robe Elie Saab. La superbe blonde en a profité pour rallier le gratin de Washington à la cause de son amant. Ce dernier, accompagné de sa cour ainsi que de son épouse, ne lui a prêté aucune attention. Peu importe, c'était le deal.

Oui, Abigail Bowen est la putain du Président. Appartement de luxe dans un quartier huppé, voyages, toilettes haute-couture, parures, compte en banque suffisamment approvisionné... En échange, Abigail doit être disponible à toute heure du jour et de la nuit, prête à jouer de ses charmes pour satisfaire la libido de monsieur le Président ou l'aider à lever des fonds pour sa campagne de réélection. Bien entendu, afin de s'assurer de sa discrétion concernant cette liaison, la jeune femme fait l’objet d’une surveillance constante. Sachant que cela ne durera pas éternellement, elle s'en accommode très bien. Un jour, une autre prendra sa place.

Le barman la salue poliment, puis prend sa commande. Abigail examine son reflet dans le miroir. Ses longs cheveux de miel savamment noués sur la nuque, mettent en valeur un visage de toute beauté, aux pommettes hautes, où brillent deux prunelles noisette cerclées d’or. Sa bouche pulpeuse esquisse un sourire satisfait quand elle remarque, dans son dos, le regard appuyé de son garde du corps glissant le long de sa silhouette aux mensurations parfaites.

Sans plus prêter attention à son surveillant, Abigail récupère son verre, puis se dirige vers un petit salon où elle s’assoit avec délectation. Ses chaussures commencent à la faire souffrir. Elle les ôte discrètement, cachant ses pieds dans le drapé de sa robe en mousseline.

C‘est alors qu’il entre. Vêtu d’un costume gris anthracite, bien bâti, cheveux d’ébène, peau mate, il se dégage de lui une puissance, une sensualité hors du commun. Abigail se force à baisser les yeux. Si son garde du corps surprend son intérêt pour le moins insistant, aucun doute qu’il ira en informer monsieur le Président dans les plus brefs délais. Cependant, elle ne peut résister longtemps.

Assis au bar, ce spécimen de mâle parfait l’observe sans vergogne. Ses yeux… une ardeur soudaine envahit Abigail, sa respiration s’accélère sensiblement.

Oh mon Dieu ! Je me damnerais pour un type pareil !

Il lui sourit. Un sourire prédateur, sauvage. Un sourire qui déchaîne de sombres fantasmes. La jeune femme se prend à imaginer des choses que son amant est dans l’incapacité de concevoir. Son esprit vogue vers l’interdit, son corps, haletant, l’appelle.

C’est indécent. Et impossible. Ce genre de délire, c’est pas pour toi.

Oubliant son verre, Abigail quitte son siège pour se diriger vers la sortie. Elle gagne les ascenseurs à la hâte, suivie de près par son ombre qui appuie sur le bouton du cinquième étage. Un long soupir s’échappe de ses lèvres tandis qu’elle tente de reprendre contenance. En vain.

Au troisième, l’ascenseur stoppe. Les portes s’ouvrent sur l’homme au costume anthracite. La jeune femme doit prendre appui contre la cloison lorsqu’elle croise son regard. Des éclats incandescents embrasent ses yeux couleur d’onyx, faisant naître des centaines de flammèches qui lèchent la peau d’Abigail, avide de délices.

La maîtresse du Président souhaite que le temps s’arrête, prie pour retrouver la liberté à laquelle elle avait renoncé. Malgré le feu qui l'anime, elle sort docilement quand la cabine arrive à son étage. Sur le point de déverrouiller la porte de sa suite, Abigail sent soudain un souffle chaud courir le long de sa nuque. Elle fait volte-face, persuadée que l’adonis se tient juste derrière elle. Toujours dans l’ascenseur, il affiche une nonchalance insolente, regard de braise et sourire carnassier.

Quand elle entre, Abigail reste un long moment adossée au mur, dans l’obscurité de l’entrée, haletante, brûlante, le cœur battant à ses tempes.

Si j’avais pu avoir quelques minutes, juste quelques minutes…

On frappe.

Qu’est-ce qu’il me veut cet abruti de gorille ?

Prête à l’envoyer balader, elle ouvre à la volée. Disparu, le gorille.

— Bonsoir, Abigail.

Sa voix seule est une caresse. Ses yeux brillent d’une lueur envoûtante, son corps… Abigail se sait perdue, happée par ce magnétisme hors du commun.

Sa robe glisse au sol sans qu’il esquisse le moindre geste. Il effleure ses lèvres, son cou, sa clavicule, déclenchant un brasier qui ne demande qu’à être nourri.

— Je connais tes fantasmes Abigail. Je peux les assouvir. Pour toi, j’arrêterai le temps et ouvrirai la porte à tes désirs les plus secrets. Tu hurleras ton plaisir jusqu’au plus profond des abysses. Tu étais prête à te damner pour moi. Que ton vœu soit exaucé.

Une aura sombre l’enveloppe, mais rien ne pourrait la détourner de cet homme mystérieux, fascinant. Abigail Bowen s’abandonne à la spirale de luxure qu’il lui offre. La putain du Président connaît l’extase dans la douleur, une jouissance infinie qui l’amène aux portes des enfers.

— Maintenant, tu vas faire quelque chose pour moi.

La voix caressante a disparu. Le ton se fait à présent grondant et autoritaire. Abigail entrouvre les paupières. Son sang se glace. Au-dessus d’elle pulse une forme terrifiante, un amas sombre et mouvant dans lequel s’entremêlent d’étranges appendices luisants.

Tu es en train de rêver Abi.

La jeune femme cligne des yeux. Son nouvel amant se tient debout à côté du lit. Son sourire prédateur n’a plus rien de séduisant, les braises dans son regard ne sont plus que charbon.

— Tu es marquée de mon sceau, Abigail. Tu fais désormais partie de mon armée.

Abigail prend soudain conscience d’une douleur aiguë au niveau de son flanc droit. Elle effleure la zone du bout des doigts. Prise d’un haut le cœur, elle redresse la tête. Quelque chose sort de son corps, une chose presque reptilienne qui se retire à une vitesse ahurissante, trouvant refuge dans la manche de l’homme au costume. Désorientée, la jeune femme murmure :

— Qui êtes-vous ?

Il se penche sur son esclave, lui saisit brusquement la mâchoire, plantant ses prunelles sombres au plus profond de son âme. Le souvenir de leurs ébats la submerge.

Qui es-tu ?

— Je suis Abaddon, l’Ange exterminateur, dieu de l’abîme. Et toi, vile créature, tu vas perpétrer un massacre en mon nom. Quand ce sera fait, tu rejoindras tes victimes et reposeras à jamais en moi.

La promesse de rester auprès de lui pour l’éternité lui suffit. Comme toujours, Abigail Bowen a obtenu ce qu’elle voulait… comme toujours, elle est prête à en payer le prix.

Les chroniques de l'Apocalypse - « L'armée de l'Apocalpse »

Emma L. ARCHER pour TROLL MAG INFINI-TEA

*

— Nous en avons oublié notre thé, chère Janette.

— Hmmmm... oui... pensez-vous qu'il reste une part de Forêt-noire ?

— Si nous allions voir ça ensemble, Janette ? À la semaine prochaine chers Troll-spectateurs et ne trollez pas trop devant l'écran !

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