Chapitre 35

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Ils l’avaient fait. Ça avait été un peu long et laborieux, mais ils y étaient arrivés. Et cet air si frais, si pur, accouplé à cette vue magnifique, lui faisait l’effet d’une récompense pour l’effort accompli. La béatitude étirait ses lèvres de la jeune femme. Pour la première fois depuis des semaines.

– Alors ? Ça t’a plu ?

Solène se tourna vers Pascal qui lui servait un sourire radieux. Après la longue marche qu’ils avaient faite, il ne semblait pas plus fatigué qu’elle.

– Carrément que ça m’a plu. En plus, ça faisait longtemps que je n’étais plus allée voir la Bonne Mère. C’est une idée géniale que t’as eue là, Pascal !

Accoudée sur le muret, elle ne pouvait que se perdre dans l’admiration de l’édifice érigé devant elle.

– Merci. Pas trop fatiguée, ça va ? Normalement, si t’as bien suivi mes conseils, ça devrait rouler.

– Oui, c’était parfait. Je suis même surprise que ça ait marché pour de bon ! La marche afghane, t’as aussi trouvé ça en te perdant sur Internet ?

« Tu respires pendant deux pas, fais une pause pendant un pas, expires pendant deux pas, pause pendant un pas, et rebelote », lui avait-il expliqué. Tel était le principe de la marche afghane. Ainsi, elle avait pu marcher longtemps, à ses côtés, sans se sentir exténuée.

– Non, c’est quelqu’un qui me l’a apprise. Depuis, je l’utilise à chaque fois que je pars en balade quelque part et c’est le pied ! On profite encore plus du monde extérieur !

Elle approuva et dressa la tête pour exposer son visage et son cou à la brise qui circulait au sommet du rocher calcaire. Elle sentait une vague chaleur la caresser au sein de ce vent léger. Février s’essoufflait ; l’hiver s’inclinait face au printemps. Les bourgeons ne tarderaient plus à éclore, la flore allait renaître.

Une renaissance qui lui faisait presque oublier toutes ses inquiétudes.

– En tout cas, je suis content de te voir comme ça. T’avais l’air au bout de ta vie, quand je t’ai vue arriver. T’as des soucis, en ce moment ?

La psychologue baissa légèrement le chef. Son sourire se dissipa, emportant celui de Pascal dans son sillage.

– Oh, pardon… Ça me regarde pas, c’est vrai… Désolé, des fois, je parle beaucoup trop.

– Non, ce n’est pas grave, le rassura-t-elle. J’ai quelques soucis, oui. Un peu trop personnels, je pense. Je doute que ça t’intéresse…

– Ça m’intéresse, bien sûr. Mais, si t’as pas envie d’en parler, ne te force pas. On est là avant tout pour passer un bon moment, toi et moi.

Elle le remercia en souriant et se retourna pour contempler le panorama, appuyée sur le muret, le bras croisés.

– Je me sens totalement incomprise, en ce moment… se plaignit-elle. Que ce soit Padraeg, Éléonore, mes copines de psycho… tout le monde. Je me sens un peu seule.

– Heureusement que je suis là pour t’emmener voir la Bonne Mère en marche afghane, alors !

– Tout à fait ! s’esclaffa-t-elle. Tu tombes à pic !

Il lui frictionna le dos et passa son bras autour de ses épaules.

– T’es pas seule, Solène. Je suis toujours là en dernier recours, si t’as besoin de quelqu’un pour t’écouter. À toute heure de la journée, en plus ! Sauf entre 2h et 6h du matin.

Elle pouffa en lui faisant remarquer qu’il devrait travailler comme confident téléphonique plutôt qu’ingénieur de la police scientifique.

– Tu veux dire, comme S.O.S Détresse Amitié ? Pas bête. Tu serais ma cliente privilégiée, alors.

– Merci.

Il continua de lui passer la main sur le dos en contemplant le panorama à ses côtés.

– Au passage, ma proposition pour le Brésil tient toujours, pour info.

– Toi, tu ne perds pas le Nord, hein ! s’amusa-t-elle.

– Jamais.

Lorsqu’elle se tourna vers lui, il plongea son regard dans le sien sans se départir de son sourire.

La visite de la basilique Notre-Dame de la Garde tint les soucis de Solène à l’écart et les espiègleries de Pascal contribuèrent à égayer sa journée. Leur rencontre se déroula dans une bonne humeur qu’elle n’avait pas savourée depuis un moment.

Pour terminer l’après-midi en beauté, il lui suggéra même de la raccompagner à sa résidence en marche afghane. Ce qu’elle accepta avec joie.

– Bon, fit-elle une fois arrivés. Merci pour ce bon moment, Pascal. C’était génial.

– Le plaisir est partagé.

Ils se firent une accolade et, après deux bises, Pascal marqua un arrêt devant sa bouche. Solène, hésitante, sentit son cœur accélérer. Ses yeux commencèrent à se fermer, ses lèvres à vibrer…

Derrière ses paupières se dessina le visage de Nicolas. Son cœur se serra, sa gorge se tordit, sa respiration se coupa.

Alors que le lusophone approchait, elle le stoppa en posant ses doigts sur ses lèvres et tourna légèrement la tête.

– Pardon… articula-t-elle. Je ne peux pas. Ce n’est pas contre toi, t’es super gentil. Mais, je ne me sens pas prête.

Pascal s’éloigna de quelques centimètres.

– Non, ne t’excuse pas, je comprends. C’est moi qui suis trop pressé. Va te reposer, t’en as besoin.

– T’es sûr… ? T’es pas vexé ?

– Pourquoi ? Pas du tout. C’est pas grave : je t’embrasserai une autre fois. Sois en forme d’ici-là, ma Brésilienne !

Elle le regarda s’éloigner avec un petit rire et s’engouffra dans sa résidence.

Heureuse.

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