Chapitre 11

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  Il fut ausculté par Choi Hokshi, le médecin de l’empereur en personne. Celui-ci se contenta d’une observation de surface, lui demandant de retirer seulement son haut et lui faisant faire quelques exercices simples. Il prit son pouls, nota son poids.

« Dans l’ensemble, tu es en très bonne condition physique, grâce à ton travail de danseur, expliqua le médecin une fois ses observations finies. Tu es souple, tonique et tes réflexes sont parfaits. »

Il jeta un coup d’œil à Resal, qui se tenait debout près du siège où Minchi était assis.

« Mais j’ai aussi constaté d’autres détails plus préoccupants, à commencer par la présence de nombreuses ecchymoses et morsures, en particulier sur le haut du corps. Tu t’es battu, récemment ?

-On peut dire ça comme ça, marmonna Minchi. »

La main de Resal, posée sur le dossier de son siège, commença à s’agiter, ses ongles grattant contre le bois.

« Je… je ne veux pas être indiscret, mais comment t’es-tu battu ? Avec les poings, une arme spécifique… ?

-Pourquoi cette question ? s’enquit le danseur.

-Tu as aussi des traces de ligature sur les bras, et vraisemblablement une autour du cou, lâcha Choi Hokshi. C’est assez inhabituel. »

  La main de Resal se crispa tant sur le dossier du siège que ses jointures devinrent blanches. Minchi sentait qu’elle contenait sa colère. Il avala bruyamment sa salive.

« Ce n’est pas en me battant que j’ai reçu ces marques, si c’est ce qui vous intéresse, répondit-il prudemment. »

  Le médecin cligna plusieurs fois des yeux, mais ne rajouta rien. La consultation prit rapidement fin, Choi Hokshi lui donna un onguent pour faire disparaître ses bleus. Minchi pensait en avoir fini, en sortant du laboratoire, mais Resal ne paraissait pas de cet avis. Elle insista pour qu’il la suive dans une pièce déserte du rez-de-chaussée.

« Minchi, je ne vais pas y aller par quatre chemins, déclara-t-elle. Je veux que tu intègres l’unité d’épéistes de l’armée. »

  Le jeune homme fut tellement étonné qu’il en perdit ses mots. Puis il soupira.

« Vous me l’avez déjà proposé, l’autre jour.

-C’était en effet une offre. A présent c’est un ordre. »

Elle n’avait pas l’air de plaisanter.

« Pourquoi ? finit-il par demander.

-C’est, il me semble, le seul moyen pour toi d’être protégé. Le seigneur Han ne pourra plus t’approcher ou te menacer, et tu apprendras par la même occasion à te défendre.

-Mais je n’aime pas me battre ! Je déteste la violence !

-Être soldat ne se résume pas à se battre en permanence, je te l’ai déjà dit. Si tu ne veux pas de violence, tu pourrais devenir garde, à terme. Ou bien travailler dans l’administration de l’armée.

-Génial, ironisa-t-il.

-Minchi, tu dois comprendre que ton travail de danseur est compromis, insista Resal. Tu ne peux plus te promener librement dans le palais, tu serais à la merci du seigneur Han. Tout redeviendrait comme avant. Est-ce cela que tu veux ? Ne pas être libre de tes mouvements ? Jouer les filles de joie tous les soirs ? Supporter les abus de Han sans broncher ?

-Comment savez-vous cela ? s’étonna le jeune homme.

-Tu me prends vraiment pour une imbécile, Minchi. »

Contrairement à la froideur de son ton, elle souriait.

« J’ai des oreilles partout, au palais, poursuivit-elle. Je sais à quoi s’adonnent les danseurs dans leur temps libre. Je connais également les pratiques du seigneur Han. »

Elle jeta un coup d’œil à l’une des clavicules du danseur qui n’était pas recouverte.

« Les marques que tu portes sur ton corps ne sont pas des moindres. Je suis certaine que même si tu y es habitué, elles te font beaucoup de mal, et pas seulement sur le plan physique. Tu ne peux pas continuer à vivre comme ça. Je sais que tu le sais. »

Minchi soupira tristement.

« Oui, je n’en peux plus de cette vie, avoua-t-il. Mais… »

Elle le laissa chercher ses mots.

« Vous êtes sûre qu’il n’y a pas d’autre solution ? Je n’ai vraiment pas envie d’apprendre à tuer.

-J’ai bien peur que non. »

Le danseur était désemparé.

« Comment vais-je faire ? continua-t-il. Danser, c’est toute ma vie. Si je n’ai plus ça je…

-J’imagine bien ta détresse. Mais nous n’avons pas d’autre choix. Il n’y a qu’au coeur de la caserne que tu sois en sécurité ici. »

Voyant l’air éploré du jeune homme, elle rajouta d’un air triste :

« Je ferai de mon mieux pour rendre cette situation temporaire, mais il va me falloir un peu de temps.

-Vous me promettez que je pourrai retrouver ma place de danseur ? implora Minchi, les yeux brillants de larmes.

-Je… »

Resal serra les dents.

« Je ne peux pas te promettre que tu retrouveras ta place exactement comme avant. Mais je te promets de te protéger de toute souffrance. Tu pourras danser de nouveau. »

Le danseur se sentit un peu rassuré. Cette situation serait seulement temporaire. Geom Resal était une très bonne soldate, elle avait même été le garde du corps personnel de l’empereur, dans sa jeunesse, avant de devenir le maître d’armes de Taejun. Sa place était importante dans l’armée impériale, et tout le monde la respectait. Des rumeurs disaient même qu’elle avait sauvé la vie de l’empereur à plusieurs reprises. Elle pouvait bien protéger celle de Minchi.

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