Les 5 étapes essentielles pour réussir la réécriture de votre roman

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« Le seul type d’écriture, c’est la réécriture. »

― Ernest Hemingway, Paris est une fête

Comme l’ont dit Ernest et de nombreux autres auteurs à succès, le nerf de la guerre pour un écrivain ou une écrivaine, c’est la réécriture. Peu d’auteurs sont capables d’écrire un premier jet dont ils sont satisfaits, et c’est normal !

L’écriture d’un roman est un processus de longue haleine, qui demande à l’auteur une endurance à toute épreuve. Même pour les auteurs qui aiment planifier les moindres détails de leur histoire avant de commencer l’écriture, le premier jet n’est qu’une ébauche qui demandera de nombreuses relectures et réécritures avant d’atteindre sa forme finale.

Ne cherchez pas à y échapper, même les plus grands auteurs doivent souvent passer par une dizaine de phases de réécriture avant de finaliser un roman. Pour citer encore une fois Hemingway, il aurait réécrit trente-neuf fois la première page de L’adieu aux armes avant d’en être satisfait.

Les conseils pour auteurs ont tendance à se concentrer sur la rédaction du premier jet, alors qu’en comparaison, cela ne représente que 10 à 20 % du travail à fournir pour créer un roman.

Avec ces fondements en tête, laissez-moi vous maintenant vous détailler les étapes les plus importantes de la réécriture.

Dans cet article, je considère que votre premier jet est terminé et qu’il est maintenant l’heure de vous consacrer à son amélioration. Que ce soit pour un roman complet ou une nouvelle, la même méthode s’applique.

La réécriture, qu’est ce que c’est ?

Commençons par le contexte : qu’est ce qu’on entend par réécriture ? La réécriture est l’étape qui succède au premier jet. Habituellement, les auteurs vont commencer par la rédaction d’un brouillon imparfait avant d’y apporter les corrections qui le rendront publiable (ou même simplement compréhensible).

Cette méthode assure ainsi à l’auteur d’éviter le phénomène de la page blanche. Lorsqu’on essaie de trop bien écrire, on est souvent bloqué par nos propres doutes. Il vaut donc mieux écrire un premier jet d’une traite, quitte à complètement le retravailler plus tard, afin que la structure générale du roman soit mise en place.

La réécriture est donc l’étape qui succède au premier jet et vient peaufiner les détails de votre roman. D’ailleurs, on dit souvent réécriture au singulier, mais c’est une erreur, car la plupart des auteurs passent par une dizaine de réécritures successives avant de finir leur manuscrit.

On utilise aussi souvent le terme de réécriture pour englober à la fois la relecture et la correction d’un manuscrit. La réécriture se déroule le plus souvent en vagues successives de relecture complète du manuscrit en y apportant des corrections au fur et à mesure. Comme il est conseillé pour le premier jet d’écrire d’une traite, il est aussi conseillé pour la réécriture de passer en revue la totalité du manuscrit avant d’entamer un nouveau passage en revue.

Une autre erreur courante est de penser que la réécriture n’est qu’une phase de correction du français. La correction de l’orthographe et de la grammaire sont importantes, mais ce n’est que la pointe de l’iceberg dans l’ensemble de la réécriture.

Les 5 étapes clefs de la réécriture

1. L’intrigue

Si comme de nombreux auteurs débutants vous avez réussi la rédaction de votre premier jet, vous devez maintenant vous retrouver avec une ébauche imparfaite entre les mains, qui vous fera peut-être même douter de vos talents d’auteurs.

Pas de panique ! C’est tout à fait normal et personne ne termine un premier jet qui soit publiable (je répète : personne !).

Votre première relecture doit se concentrer sur la structure du récit, l’intrigue et les incohérences, ou plus communément ce qu’on appelle le fond.

Il est courant lors du premier jet de modifier des parties de l’intrigue en cours de route. Bien que certains auteurs choisissent de retravailler chaque chapitre en détail avant de commencer le suivant, il est plus souvent conseillé de finir le premier jet en y laissant des incohérences. La relecture est là pour régler ça.

Votre première relecture doit se concentrer sur la résolution de ces incohérences.

Pour ce faire, commencer par une relecture complète de votre premier jet, que vous annoterez à chaque fois que quelque chose vous semble illogique.

Ne commencez pas par réécrire tout de suite ! C’est une erreur classique qui peut vous couter un temps fou. Si vous commencez la réécriture maintenant, il se peut que vous découvriez de gros problèmes de structure plus tard dans l’histoire, il faudra alors tout réécrire une nouvelle fois et la réécriture n’aura servi à rien.

Votre première relecture/réécriture est un travail sur la structure générale du récit, pas sur les détails. Les détails seront incorporés lors des prochaines étapes.

C’est aussi lors de cette étape qu’on a tendance à voir deux types d’écrivains : ceux qui écrivent un premier jet trop long, et ceux qui n’ont pas écrit assez.

Que vous soyez dans un cas ou l’autre, le premier jet a tendance à être réduit ou allongé d’environ 20 % lors de la réécriture. Votre première relecture vous aidera à identifier le problème.

Dans le premier cas, il se peut que certaines scènes ou même des chapitres entiers soient superflus et alourdissent la structure du récit. Dans ce cas, il va falloir couper !

Pour d’autres auteurs, ce sera l’inverse et la relecture leur permettra de remarquer des développements trop rapides de l’histoire, qui mériteraient d’être accompagnés de nouvelles scènes ou chapitres. Dans ce cas, prenez des notes détaillées sur les passages à ajouter, vous les écrirez plus tard.

Une fois satisfait avec la cohérence globale de votre récit, il est temps de s’attaquer aux détails.

2. Les détails

On considère généralement qu’il existe deux types d’écrivains : les Architectes, qui planifient tout le roman dans les moindres détails avant de s’attaquer à l’écriture, et les Jardiniers, qui eux ont tendance à se laisser « conter l’histoire » pendant l’écriture du premier jet.

Note : ce système est bien connu, mais reste tout de même un stéréotype qui ne colle pas à tout le monde. Beaucoup d’auteurs se trouvent entre les deux groupes ou changent de comportement suivant le projet sur lequel ils travaillent. Comme pour tous conseils, prenez ce qui vous semble judicieux et adapté le à votre propre façon de travailler.

Pour les Architectes, il se peut que l’étape des détails soit plus facile, car s’ils ont fait leur travail de préparation méthodiquement, le premier jet devrait déjà contenir une bonne quantité de descriptions pour les personnages et les lieux.

Pour les Jardiniers, cette étape est une des plus importantes, car c’est souvent pendant la relecture que leurs personnages vont se développer et leurs scènes devenir plus limpides. Il faudra donc y passer beaucoup de temps si, comme moi, vous êtes dans cette catégorie.

L’important, quel que soit votre mode d’écriture, c’est de donner vie à votre monde par les détails.

Pour les personnages, il faudra vous concentrer sur leurs vêtements, leurs expressions, leurs faciès ou même leurs traits physiques particuliers. N’oubliez pas aussi de vous attarder sur leurs sentiments, les lecteurs doivent comprendre ce que vos personnages ressentent pour pouvoir s’y attacher.

De même pour les décors de votre histoire, il est souvent bon de décrire les détails qui donnent vie aux lieux. Le type d’architecture, la vie sauvage qui peut s’y trouver ou encore le climat sont des éléments importants pour l’immersion du lecteur.

Tolkien est souvent cité comme l’un des meilleurs auteurs lorsqu’il s’agit des descriptions d’environnement. Cependant, cela ne plait pas à tout le monde, des descriptions trop longues peuvent aussi ennuyer le lecteur donc c’est à vous de déterminer ce qui s’adapte le mieux à votre style et votre lectorat.

3. Les dialogues

Un autre aspect important lors de la réécriture est l’amélioration des dialogues. Comme pour les descriptions, certains auteurs vont utiliser trop ou pas assez de dialogue.

En vous concentrant sur les dialogues lors d’une des phases de réécriture, vous pourrez identifier ces problèmes et donner vie à votre récit.

N’oubliez pas, l’utilisation du dialogue doit être justifiée. S’il ne sert que de moyen d’exposition, il est peut-être mieux d’éviter le dialogue (eh oui, on a tous vu ce film d’action où le personnage se lance dans un monologue bien lourdingue juste pour nous exposer l’intrigue — la spécialité d’Hollywood, dites-vous ?).

À l’inverse, certaines scènes peuvent prendre plus de relief si elles sont directement décrites par les personnages qui s’y trouvent. C’est à vous de voir quel cas s’adapte le mieux, mais garder en tête que l’utilisation d’un dialogue doit paraitre naturelle, sous peine qu’il soit perçu comme inutile par vos lecteurs.

Enfin, il faudra aussi rendre vos dialogues plus vivants grâce aux verbes de paroles (aussi appelés verbes introducteurs) comme dire, murmurer, crier, etc. L’utilisation répétitive de « il dit » est par exemple déconseillée. Des verbes plus riches peuvent facilement transmettre une quantité plus importante d’information sur l’état des personnages et leur façon de s’exprimer. Utilisez cette étape de réécriture pour renforcer ces verbes, sans en faire trop tout de fois !

4. Le thème

Avant de vous en dire plus sur cette étape, qu’entend-on par thème ? Le thème n’est pas à confondre avec le genre (par exemple, romance, science-fiction, roman noir, etc.). Le thème est un sujet, souvent implicite, qui l’on retrouve tout au long du récit.

Des thèmes courants sont par exemple la vengeance, l’amour, l’amitié, la trahison, etc. Le thème peut être très précis ou bien assez vague.

Il est courant pour les auteurs débutants de passer un temps fou sur la recherche d’un thème pour leur ouvrage. En effet, les maisons d’édition sont souvent preneuses de roman au thème prédominent, mais il faut savoir qu’un roman peut avoir un grand succès sans avoir un réel thème.

Comme l’a dit Stephen King dans Ecriture : Mémoires d’un métier : « Commencer par les questions et les préoccupations thématiques est une recette pour la mauvaise fiction. La bonne fiction commence toujours par une histoire et progresse vers le thème ».

Pour faire simple, il est donc mieux de se préoccuper d’abord de votre histoire avant de penser à sa thématique. C’est pour cela que je place le thème en quatrième position de la réécriture. Le thème peut souvent apparaitre tard dans le processus de création.

Si c’est le cas et que votre thème devient clair, utilisez donc cette étape de réécriture pour le renforcer tout au long de votre récit. Cela aidera le lecteur à s’imprégner de la thématique générale.

L’utilisation d’un champ lexical spécifique peut par exemple soutenir la présence d’un thème. Certaines métaphores, ou même des répétitions bien choisies peuvent aussi avoir cet effet. À vous de voir, mais encore une fois, cette étape est optionnelle.

5. La forme

Certains vont être surpris de voir cette étape en dernier, mais c’est pour moi un développement tout à fait logique.

Voici un secret qui va surement en soulager plus d’un : tant qu’il n’est pas publié, votre roman peut contenir des tonnes de fautes d’orthographes et de grammaire ! C’est même mieux.

Oubliez les sermons de votre prof de français, faire des fautes n’est pas un drame tant que votre roman n’est pas fini.

Pour ma part, j’écris mes premiers jets très rapidement (j’écris facilement plus de 1000 mots par heure quand je suis lancé). Mais en contrepartie, au moins une phrase sur deux contient une faute.

Et ça me va totalement, ma prof de français ne va pas se pointer pour me filer une note ! Lors de la réécriture, je peux corriger tranquillement le texte. Si je faisais cela pendant le premier jet, je perdrais surement un temps fou et mon récit prendrait beaucoup plus de temps à se développer (Rappel : je suis un « Jardinier » pur et dur et j’ai besoin du premier jet pour développer mon histoire).

Passez votre temps à corriger le texte avant d’avoir finalisé sa structure et ses détails est une perte de temps, car ce que vous corrigez maintenant peut changer une multitude de fois pendant la réécriture.

Cependant, une fois les étapes précédentes accomplies, il est impératif de faire un travail important sur la forme.

L’orthographe et la grammaire sont les étapes les plus simples, car il suffit de suivre les règles du français.

Cependant la forme à d’autres aspects qui prêtent souvent à débat.

L’utilisation de la voix passive par exemple est critiquée par de nombreux auteurs.

Stephen King, encore lui, en parle de cette façon :

« Les verbes sont de deux types, actifs et passifs. Avec un verbe actif, le sujet de la phrase fait quelque chose. Avec un verbe passif, on fait quelque chose au sujet. Le sujet laisse l’action se passer. Vous devez éviter le temps passif ».

Pour lui, c’est le sujet qui doit être au centre de l’action. L’utilisation abusive du passif ralentit la narration et aboutit à des phrases peu élégantes.

Lors de la réécriture, essayer d’identifier les phrases passives présentes dans votre texte. Transformez les en forme active et vous verrez que souvent la lecture devient plus fluide et l’action plus intéressante.

Un autre aspect de la forme concerne la concordance des temps. Ce sujet est vaste, mais sachez qu’il existe des règles plus ou moins strictes sur les temps qui peuvent être employés dans le récit.

La concordance des temps s’applique dans une phrase contenant une proposition principale et une proposition subordonnée. Si la proposition principale est au passé (le cas de la plupart des romans), on utilise les règles suivantes dans la subordonnée :

– on utilise l’imparfait de l’indicatif pour exprimer la simultanéité (exemple : je crus qu’elle arrivait).

– on utilise le plus-que-parfait de l’indicatif pour exprimer l’antériorité (exemple : il m’annonça qu’elle avait fugué).

– on utilise le passé simple de l’indicatif pour exprimer la brièveté (exemple : je courrais lorsqu’il m’arrêta).

– on utilise le conditionnel présent pour exprimer la postériorité (exemple : j’avais compris qu’il n’y échapperait pas).

Cette étape de réécriture doit aussi servir à identifier les répétitions qui s’insèrent souvent dans le récit. On utilise souvent des mots ou même des expressions à répétition sans s’en rendre compte et il vaut mieux l’éviter autant que possible.

Réduire les répétitions permet aussi de varier le vocabulaire et d’utiliser des mots plus riches. Réduire les verbes ternes (avoir, être, faire, etc.) permet aussi d’enrichir le récit avec des verbes plus élaborés.

Dernièrement, surveillez la ponctuation et assurez vous de bien respecter les règles qui s’y appliquent et votre manuscrit devrait alors être prêt à l’envoi !

Quelques conseils avant d’attaquer la réécriture

Plusieurs auteurs expérimentés recommandent de laisser reposer votre premier jet pendant une à plusieurs semaines avant de vous plonger dans la réécriture. Cela permet de prendre plus de recul sur ce que vous venez d’écrire et de sortir un peu de l’histoire. Pendant ce temps, concentrez-vous sur l’écriture d’un nouveau texte.

Comme je l’ai dit plus haut, la réécriture est en fait une succession de phases de correction. Il est judicieux de faire au moins la première étape de réécriture vous-même afin de rendre votre manuscrit présentable (même s’il reste imparfait). Cependant, rien ne vous empêche de trouver de l’aide pour les phases de réécriture suivantes.

Un concept très pratique (et gratuit) est de trouver des bêta-lecteurs. Un bêta-lecteur est un bénévole qui va relire votre roman et vous aider à identifier ses faiblesses. Vous pouvez trouver des bêta-lecteurs un peu partout avec plus ou moins d’expérience. Certaines plateformes comme Scribay, sont un point de rencontre pour les auteurs à la recherche de commentaires sur leurs textes. Mais attention, comme tout dans la vie, si vous voulez trouver de bons bêta-lecteurs, il vous faudra aussi donner de votre temps en retour et relire le manuscrit d’un autre auteur.

Si vous avez la chance d’être accepté par une maison d’édition, ils vous proposeront aussi sûrement de travailler avec leurs propres éditeurs pour finaliser votre manuscrit. Quant aux auteurs indépendants, il est courant d’engager des éditeurs professionnels pour aider lors de la réécriture.

Les points clefs de la réécriture

Pour conclure, voici un rappel des leçons contenues dans cet article :

  • le premier jet d’un roman n’est qu’une ébauche, c’est la réécriture qui transforme un manuscrit en roman de qualité
  • la réécriture est un processus long qui demandera plusieurs passages en revue de votre manuscrit. Compter au moins une dizaine d’étapes de réécriture avant d’achever votre manuscrit.
  • la correction de l’orthographe et de la grammaire n’est qu’une petite partie de la réécriture. Travailler l’intrigue, les détails, le thème et les dialogues de votre manuscrit prendra beaucoup plus de temps que la correction de la forme.

Voilà, j’espère que ces conseils vous aideront à terminer votre manuscrit. Encore une fois, la réécriture est longue et peut prendre des années donc ne vous découragez pas, chaque minute passée à améliorer votre manuscrit est du temps bien investi. Foncez !

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