Chapitre Troisième : L'ascension

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 Mes pas jusqu'à la citadelle furent éprouvants, car je ne sais plus si je vous l'ai déjà dit, mais nous ne connaissions que l'Eté et sa chaleur étouffante sur mon île. Ce n'est que très tard dans ma vie que j'ai connu les autres saisons, et cette aberration que l'on nomme « la neige ».

Bref, je parvins au sommet de l'île, tout proche du lac dont je vous ai parlé au tout début de mon récit, pour trouver un sanctuaire constitué de pierre, le seul sur Tortuga, masqué par des arbres en périphérie. À ma vue, les deux gardes à l'entrée changèrent leur position menaçante, pour une posture plus engageante.

Les lances dirigées à mon encontre glissèrent le long de leur bouclier, pour se dresser vers le firmament, et me dégager un accès. Une fois dans l'enceinte de la structure, je remarquai des fontaines en abondance, et le fracas d'épées un peu plus loin. Je décidai d'aller voir par moi-même, et tombai sur Gilgamesh, encerclé par trois gardes-tempêtes, réalisant une chorégraphie spectaculaire.

Mon héroïque mentor – car oui vous l'aurez compris, c'est de lui que j'allais recevoir une bonne partie des meilleurs enseignements – les para tous avec une aisance insultante. Je discernai des sourires sur tous ces visages simulant le combat, et je savais dès lors que je me sentirais ici chez-moi.

Lorsqu'il me vit, il éleva sa main pour me signifier de patienter là où je me trouvais. Il fit un détour vers une des fontaines, essuya la sueur de son corps, et vint me saluer.

 « Ainsi donc tu es venu, petit Gallen. C'est une joie de voir ici quelqu'un de si jeune, mais aussi de si convaincu.

  • Pourquoi m'avez-vous fait demander, grand Gilgamesh ?

  • Allons, nous t'avons étudié. Nous avons bien vu combien de temps tu passes à imiter nos mouvements, à courir dans les arbres, à agir au nom de l'intérêt de tous. Nous pensons que tu es assez mature pour suivre la formation, et assez fort pour y survivre. Cependant je dois te mettre en garde. Ne crois pas que ce sont des flatteries qui sortent de ma bouche, loin de là. C'est une voie infiniment périlleuse qui s'offre à toi, et si tu décides de l'emprunter, tu devras la suivre jusqu'au bout, quoi qu'il en coûte. Qui plus est, tu devras dédier ta vie à la cause, en tout temps, à chaque danger, et abandonner tout ce à quoi tu tiens dès que l'appel du devoir résonnera...

  • J'en suis conscient, grand Gilgamesh, et je suis sûr de vouloir être formé. J'en rêve depuis si longtemps que je ne peux pas me permettre de passer à côté de cette occasion, maintenant qu'elle m'est présentée.

  • Alors soit, suis-moi, je vais te faire visiter ton nouveau foyer. »

 Nous cheminâmes dans la cour, et mon seigneur devenu maître m'expliqua l'origine de ce lieu, qui fut en réalité le premier village à être bâti, par ceux qui vivaient ici il y a des centaines d'années. Il fut abandonné en raison des nombreux prédateurs qui rôdaient, et des intempéries. Ce n'est que lorsque les habitants décidèrent qu'il était temps que le génocide cesse, qu'ils se lancèrent dans la confection de demeures dans les hauteurs, ainsi que d'armes, pour se défendre. Le sanctuaire est en réalité un cadeau, réservé aux individus qui ont repris ce territoire à la faune locale, et l'ont défendu dès lors sans jamais le reperdre.

 Nous continuâmes jusqu'à une sorte de couloir, de nouveau gardé par deux hommes, que nous empruntâmes, pour tomber sur une structure de pierre circulaire, néanmoins tapissée de feuilles et de fil de fer, comme les cabanes dans les arbres. Là, mon mentor m'expliqua qu'il s'agissait des dortoirs des membres de l'ordre, et que ma couche était située dans la partie nord du bâtiment, celle composée des nouvelles recrues. Quand nous arrivâmes au lieu mentionné, je fus subjugué de voir tous ces gens plus vieux que moi d'au moins sept âges. Vous savez, je n'ai pas toujours eu l'assurance qui me caractérise aujourd'hui, et je dois bien l'admettre, en cette époque, j'ai eu du mal à me faire une place parmi l'élite des gardes-tempêtes.

Ces nouvelles recrues, elles me prenaient toutes pour un enfant, et la majorité d'entre elles pensaient tout simplement que je n'avais pas ma place avec eux, qu'il s'agissait là d'une folie pure et simple, mais j'y reviendrai.

En ressortant du dédale de pierre, nous arrivâmes de nouveau dans une cour, habillée de mannequins, de cibles d'entraînement, de marques étranges au sol...

 « Tu vois, c'est ici que s'entraînent les nouveaux arrivants, comme toi. Cet endroit assure tout le confort et la sécurité nécessaire pour rendre optimale la concentration. Ici tu mettras à l'épreuve ton corps et ton esprit, pour assimiler les bases de notre profession.

  • Profession ?
  • Il ne s'agit pas ici du mot au sens de travail, mais de prestige. C'est une position peu enviée sur cette île, en raison des dangers auxquels on s'expose, mais tout le monde s'accorde sur l'importance de notre présence.
  • Je vois. Et vous alors, je vous ai vu vous entraîner tout à l'heure, pourtant vous n'êtes plus un novice depuis bien longtemps...
  • Veux-tu dire par là que je suis vieux ?
  • La vieillesse est gage de noblesse, n'est-ce pas ? Voudriez-vous me faire dire ce que je ne pense pas ?

Gilgamesh m'a regardé avec des yeux amusés, et j'ai même cru voir se creuser les commissures de ses lèvres, comme pour amorcer un sourire, quoi que nébuleux.

  • Tu as de l'esprit, jeune Gallen, c'est indéniable. J'espère vraiment que tu parviendras au bout du chemin. Maintenant, pour te répondre, même les plus puissants de nos membres continuent de s'entraîner, régulièrement, mais à l'extérieur de ces murs, dans la forêt sauvage. Ce que tu as vu est en réalité la préparation de la commémoration de nos ancêtres. Nous exécuterons une danse guerrière, pour leur faire honneur, et leur montrer que le combat continue, pour la défense de nos terres.

  • Pourrai-je y participer ?

  • Si tu es assez talentueux, bien sûr. Elle aura lieu dans deux mois. Tu auras déjà appris beaucoup d'ici là, même si nous avons convenu avec ta mère et ta professeure que tu n'irais à l'école qu'un jour sur deux, pour équilibrer tes apprentissages.

  • Et les jours sacrés ?

  • Les dangers ne s'arrêtent pas aux jours sacrés, tu sais. Néanmoins, vu ton jeune âge, tu pourras échapper à la fois à l'école et à ta formation, uniquement la première année.

  • Et quand commencera ma formation ?

  • Si tu n'as pas de question particulière, elle peut commencer dès à présent. Je vois arriver Hallena, là-bas. Elle est pressentie pour devenir la meilleure recrue des trente soleils. C'est un bon moyen de jauger tes capacités.

  • Alors soit, commençons ! »

 Je remis mes effets personnels à Gilgamesh, puis m'avançai dans un cercle à la circonférence tracée à l'aide de peinture rouge. Je saluai mon opposante, mais je ressentis quelque chose d'étrange à son sujet, une impression malsaine... et les secondes qui suivirent me donnèrent raison. Dès l'instant où mon mentor frappa dans ses mains pour annoncer le début du combat, Hallena s'élança contre moi en m'assénant un puissant coup, porté de toute son allonge, dans la joue. En conséquence ma tête partit sur la droite, ce qui lui laissa le champs libre pour enchaîner une série de coups de poings dans mon abdomen, avant de finir par un terrible coup de pied qui me renversa.

Alors, moi qui ne comprenais rien à la scène qui se jouait, j'abandonnai la conscience après avoir reçu deux puissantes frappes sur le front, l'adolescente furieuse à genoux sur moi. Je me réveillai dans la dernière partie des lieux que je n'avais pas encore visités : l'infirmerie et le réfectoire, tous deux très proches. Je passai ma main sur mon front, pour me rendre compte de la taille affolante des bosses présentes, puis je me penchai au dessus d'une bassine d'eau, pour voir les poches gonflées sous mes yeux.

 « Je suis vraiment navré, Gallen. J'avais pourtant demandé à Hallena de retenir ses coups.

  • Je ne savais pas que la peau pouvait avoir cette couleur... il faut dire que je ne me suis jamais pris une raclée comme celle-là pour le découvrir... Et si je passais par un adversaire débutant la prochaine fois ?

  • Effectivement, c'est ce qui arrivera. Mais vois ceci comme une leçon. Que cela te fait-il d'être à ce point brisé par quelqu'un de bien supérieur à toi ? Que ressens-tu ?

  • Supérieur ? Elle est surtout entraînée !

  • Et s'est-elle montrée condescendante, ou juste prétentieuse ?

  • Pas le moins du monde, non.

  • Peut-être qu'à l'avenir tu ferras plus attention...

  • Attention ?

  • J'ai entendu dire que tu n'étais pas le plus modeste des petits garçons, et que tu jouais beaucoup de ton avance... Peut-être qu'à présent tu te montreras plus humble...

  • Nous verrons... Quelle est la prochaine leçon ?

  • C'est tout pour aujourd'hui. Tu reviendras après demain. Et là les choses sérieuses commenceront. D'ici là prends soin de toi, et réfléchis aux conséquences de tes actes. Tes blessures sont superficielles, tu connaîtras bien pire, crois-moi. »

 Je me souviens du ton de la voix de Gilgamesh. Il incarnait un mélange dérangeant de rigueur et de laxisme, comme si tous les dangers les plus mortels n'étaient que des jeux, mortels certes, mais ni plus ni moins que des jeux aux allures de leçons.

Je repartis en direction de mon foyer, passai devant la place des fêtes, et tombai alors sur Edwanna. Je tentai d'éviter son regard, pour ne pas avoir à bégayer de honte suite à la défaite si fraîchement essuyée. Je me faufilai entre les groupes de personnes présentes, prenant soin de ne pas croiser non plus leur regard, et finis fatalement par tomber sur celle que j'esquivais en vain.

 « Gallen ! Tu vas bien ?

  • Edwanna ! Parfaitement bien, et toi ?

Je ne me risquai pas au contact de ses yeux, non seulement par peur de sa réaction, mais parce que je connais son caractère avenant, sa volonté irrépressible de me venir en aide, et je ne voulais pas ,qu'elle réveille en moi le frisson de ses caresses, bien qu'inconscientes ; le volcan sommeillant dans mon âme.

  • Gallen ? Tu es sûr que tout va bien ?

  • Oui pourquoi ?

  • Nom d'un éclair ! Mais tu es blessé !

  • Non, je te jure que ce n'est rien, ma formation est juste un peu plus... passionnée que prévu !

  • Laisse-moi voir ça !

Comme je le redoutai, ses doigts allèrent trouver un peu d'eau fraîche, imbibant un chiffon, pour venir glisser le long de mes difformités. Je ne laissai rien transparaître, que ce soit la douleur intense qui hurlait sous ma peau, ou le paradoxal plaisir que je ressentais à me faire cajoler de la sorte.

  • Je n'imagine pas ce que tu as dû ressentir ! Tu dois souffrir le martyre ! Mais que s'est-il passé ?

  • Je... et bien ce n'est pas si terrible que ça en a l'air en fait. Il suffit de ne pas y penser ! Je me suis battu avec quelqu'un de bien plus familier que moi aux techniques de combat...

  • Techniques de combat ? Mais il doit être boucher pour infliger de pareilles blessures dans un combat amical !

Je ne pus m'empêcher de laisser éclater un rire, aujourd'hui encore, mes côtes s'en souviennent, et tressaillent toutes seules. Mais elle reprit :

  • Tu as mal ?

  • Ne t'inquiète pas, ça passera.

  • J'ai quelque chose à t'annoncer. Farhen souhaite s'engager avec moi.

A l'annonce de cette phrase, j'oubliai tout de ma condition, la douleur saisissante de mes muscles, de mes os ; je ne me focalisai que sur le tambour qui me servait de cœur, et dont les coups portés sonnaient à l'unisson des mots parvenus à mes oreilles.

  • S'engager avec toi ? répondis-je pourtant avec aplomb.
  • C'est bien cela. Et j'ai dit oui !
  • Mais c'est une excellente nouvelle ! »

 J'étais très fort pour masquer mes sentiments vous savez, et les larmes qui embuèrent mes sens, elles n'étaient pas faites de joie, comme Edwanna l'avait supposé, mais bien de peine. Brutalement, je remis tout en question. M'étais-je fourvoyé en interprétant ce que j'avais vu, ces manières si douces et délicates, ce côté pétillant et somptueux, cet éclat si précieux tapissant les perles que je nommais « ses yeux » ? M'étais-je laissé emporter par mes propres désirs, ou jouait-elle simplement avec mon cœur ? Toutes ces questions se bousculaient en moi, si bien que je manquai de me trahir.

 « Tu es sûr que tu es ravi ?

  • Bien sûr ? Pourquoi ne le serai-je pas ? Tu as tellement de chance !

  • N'est-ce pas ? Je suis si heureuse !

  • Si tu veux bien m'excuser, il faut que je vois ma famille à présent, et surtout que je reprenne des forces.

  • Bien sûr, je te libère. »

 Je ne cherchai nulle étreinte, nulle parole ou nul contact avec elle. Je fis quelques pas, mais cette fois-ci il ne m'importait plus que l'on appose sur moi les jugements les plus fous, et les railleries, je n'en avais cure. La douleur habitant mon corps me sembla plus terrible encore qu'à mon réveil, et je fus pris du désir de me rendormir, pour oublier ce que je venais d'entendre. Le petit garçon si fier et si fanfaron, il venait de se prendre deux déconvenues si puissantes, que même ses amis les plus proches, croisés sur la route, ne lui adressèrent pas la parole, mais constatèrent avec une attention particulière que la joie avait déserté son visage.

Une fois éloigné de la civilisation, juste avant d'entamer l'ascension jusqu'à ma demeure, je laissai éclater toute ma haine et mon incompréhension en frappant l'écorce de mon arbre. Les larmes coulèrent sans que je ne puisse les retenir, et des pensées que je n'avais pas l'habitude d'avoir, des pensées d'échec, alimentèrent ma furie. Après une bonne dizaine de minutes, Assalice arriva.

 « Pourquoi pleures-tu mon garçon ?

  • Pour rien, ce n'est pas grave.

  • Allons, je connais bien ces réactions. Tu t'emportes au sujet d'une fille...

  • C'est... oui, comment le sais-tu ?

  • L'expérience mon garçon. Ce sont des êtres doués d'une grande beauté, d'une sensibilité déconcertante, mais pour celui qui se laisse abuser, elles représentent aussi un des pires dangers de l'existence. L'on se laisse vite séduire par leur démarche, la profondeur de leur regard, le ton de leur voix... mais au final ce n'est là qu'une illusion.

  • Tu le crois vraiment ?

  • J'en suis certain ! Mais cela n'explique pas tes larmes. Pourquoi exactement te mets-tu dans un état pareil ? demanda-t-il en s'agenouillant devant moi.

  • Elle est engagée à un autre.

  • Elle est engagée dans quel sens ? Vous n'avez que onze ans, on ne peut pas s'engager... enfin...

  • J'oublie parfois que tu n'es pas originaire de Tortuga. Quand on dit que l'on est « engagé », cela signifie que les membres de deux familles se sont mis d'accord pour accorder mutuellement les mains de leurs enfants, quand ces mêmes enfants se sont préalablement promis fidélité. L'union est célébrée à partir de seize ans, lors d'une cérémonie officielle.

  • Et je gage donc que tu aimais cette fille...

  • Effectivement, et je suis déchiré de savoir qu'elle ne sera jamais mienne. J'ai pourtant cru que j'avais une chance... mais c'est peut-être ma faute, j'aurais dû agir plutôt que de la laisser m'échapper. Tous les signes me pointaient du doigt, et moi je les ai ignorés, pour le bien d'un individu que je n'apprécie même pas, cet idiot de Farhen !

  • Et te sens-tu vertueux ?

  • Je me sens misérable.

  • Sais-tu seulement pourquoi ?

  • Non, pas du tout.

  • Parce que la vertu n'apporte aucune satisfaction, on ne la ressent pas comme la douleur, le bonheur ou même la tristesse. Plus encore, je dirais qu'à chaque fois, elle conduit irrémédiablement à un état de regret.

  • Tu as peut-être raison... Je ne ressens pas de joie, si ce n'est la maigre satisfaction d'avoir agi dans l'intérêt d'Edwanna...

  • Edwanna ? Serait-elle assez grande avec des cheveux ténébreux ?

  • C'est cela.

  • Et ses yeux, sont-ils aux couleurs de la terre ?

  • Ils le sont.

  • Alors je vois bien de qui il s'agit. Elle habite près de l'école non ?

  • Non, elle vit un peu plus loin, là où le sentier s'arrête, et que la forêt s'interrompt pour laisser place à une étendue de cendre.

  • Intéressant. Pourquoi cette étendue de cendre ?

  • Il paraît qu'en des temps reculés, il y a eu une maladie qui tuait les grands arbres. Sans eux, notre peuple aurait été voué à disparaître. Pour sauver les géants encore sains, les gardes-tempêtes ont décidé de purifier une partie de la forêt par le feu.

  • Et j'imagine que cela a marché ?

  • Tu imagines bien.

  • Pourrais-tu me conter d'autres histoires comme celle-ci ?

  •  _ Un autre jour, avec plaisir ! Pour l'heure je dois retrouver mes parents. Au fait, ne me demandes-tu pas ce que sont ces blessures sur mon visage ?

  •  _ Mon garçon, j'ai été jeune avant toi, je sais très bien ce qu'elles sont. Prépare-toi à en avoir beaucoup d'autres, la voie que tu as choisie est particulièrement éprouvante. lâcha-t-il en m'adressant un clin d'œil.

  • Porte-toi bien Assalice.

  • Et fais de même, petit Gallen. »

 Je ne me souviens pas de la conversation que j'ai eue avec mes parents. Je suis juste monté, et ils m'ont accueilli avec une tarte dans les mains, pour fêter cette première journée d'humiliation cuisante. Ma mère m'a adressé la parole, avant de se précipiter dans la cuisine, et de faire la même chose que la petite fille de mes songes avant elle. En revanche, je me souviens très bien de ce sentiment, celui d'être vu comme une petite chose frêle et fragile. Aussi décidai-je à partir du lendemain, de m'endurcir, et de refuser que l'on ne soit à ce point aux petits soins pour moi.

La nuit fut éprouvante.

 Je me tournai et retournai dans mon lit, et la première décision que je pris pour aller dans le sens de mes convictions nouvelles, fut de ne rien prendre pour apaiser ce mal qui me refusait le sommeil. Je décidai de lutter par moi-même, sans recours à la médecine ou aux artifices. Je jugeai que mon corps pouvait s'en remettre tout seul, dès lors que j'étais assez fort dans ma tête. En plus de la douleur, je crois bien que l'insomnie jetait elle aussi sur moi son spectre insidieux, aussi fus-je sujet à des pensées pénibles.

 Je me remémorais les mots d'Edwanna, ceux de Gilgamesh, mais aussi ceux d'Assalice. Deux d'entre eux m'incitaient à devenir quelqu'un que je n'étais pas encore, en des sens opposés, et la troisième, la plus importante, me refusait brutalement la perspective de devenir celui que je désirais de toutes mes forces. Ce n'est que bien plus tard, quand il me semblait voir blanchir la nuit, que je trouvai le sommeil.

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