Reflets de l'âme

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Punaise, que je suis épuisée. Ce matin, comme tous les matins, le réveil a de nouveau sonné et j’ai bien failli ne pas l’écouter. Aucune envie d’entamer une journée à courir en tous sens pour avoir l’idée que l’on puisse exister. Après une longue marche, j’ai déposé les enfants à l’école. Je vais peut-être pouvoir commencer, en rentrant à la maison, à travailler sur mes textes que j’ai, sur le bureau, abandonnés.

Mes pas sont rapides. Mon regard ne se fixe pas réellement, du moins jusqu’à cet instant. La vitrine d’un magasin me renvoie l’image de la femme que je semble être.

Des cheveux mi-long, roux, bouclés encadrent mon visage. J’y vois sur mes tempes la marque du temps qui passe. Des fils d’argent prennent place et font naître sur mes lèvres roses un petit sourire narquois. Je ne suis pas grande et mes grossesses ont donné à mon corps plus de volupté que je ne l’aurais souhaité. Ahh ! Que puis-je contre la génétique ? La Bretagne et l’Italie se sont invitées dans mes chromosomes et mon physique.

Je reste là. Je me fixe, me contemple, moi qui déteste cela. Un jean noir, un manteau fuchsia, des tennis blanches à petites fleurs bleues, les cheveux dans tous les sens… c’est l’image que l’on a de cette femme sans artifice, sans maquillage dans ce grand miroir improvisé dans les rues d’Angoulême. 48 ans fort bien acceptés, une vie totalement assumée, des douleurs si profondément cachées. Je suis elle, mais bien plus en réalité.

Mon regard vert/noisette intrigue ceux qui me rencontrent et cela me fait rire, je dois bien l’avouer. Je ne montre de moi que ce que je leur laisse le droit de regarder. Je ne suis qu’un reflet aux yeux de ces autres qui ne savent pas aller plus loin que la surface exposée.

Que je déteste les miroirs, les vitrines qui mentent si bien. Ils ne vous montrent jamais la vérité et pourtant, la société a décidé de se mirer dans ces mensonges pour en faire des valeurs tronquées. Le paraître… mon cœur se serre. Rien dans mon image n’a changé… pas même mon regard, miroir de mon âme abîmée. Je le connais par cœur, il est celui qui m’a toujours accompagné. Il est mes mensonges pour ne jamais rien dévoiler, ne jamais montrer mes faiblesses que l’on utilise pour me faire tomber, pour me faire croire qu’aimer, c’est tout accepter. Chaque coup, chaque humiliation, chaque atrocité qui fut portée n’ont jamais su le changer ce regard si particulier. Enfant ou adulte, fière, je défiais ceux qui voulaient me plier à leur volonté, ceux qui voulaient m’anéantir, éteindre la lumière de ma personnalité. Malgré les années, rien ne me fit abandonner. Je tenais et ma force en moi grandissait.

Je n’ai pas envie de me rappeler, je n’ai pas envie de me victimiser.

Des bras puissants m’entourent. Un parfum masculin que je connais bien m’enveloppe. Un menton se pose sur le haut de mon crâne. Mon Autre vient de me rejoindre… et mon regard vient de changer. Cet homme a vu qui je suis au plus profond de mon être, derrière mes remparts. Le clown l’intriguait, il sentait un être différent de ce que je montrais sur la toile du net. L’humour ne cache-t-il pas souvent les pires blessures qu’un homme ou une femme puissent avoir. Avec lui sont nées les étoiles qui brillent dans le vert de mes prunelles de mon âme marquée. Pas de jugement, pas de honte sur celle que je fus et la liberté d'exister en femme affirmée.

Je suis née dans un miroir lorsque j’ai vu ce qu’était aimer et que je me suis libérée des reflets qu’ont laissé mon passé.

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