Incipit(s) 3 - Le retour !

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Joséphine, sept ans, rentra de l’école, la mine renfrognée et les lèvres tremblantes, sa petite sœur Amélie sur les talons.

Elle se dirigea directement vers sa mère, occupée à éplucher des pommes de terre en vue de la préparation du dîner.

–      Maman, mes camarades se sont moquées de moi aujourd’hui ! Elles sont méchantes !

–      Ah oui, pourquoi donc ?

–      Elles ont dit que mes chaussures n’étaient pas belles !

Alors, les larmes qu’elle s’efforçait de contenir depuis la sortie de l’école jaillirent sans qu’elle puisse les retenir. Tout son petit corps fut secoué de spasmes tandis qu’elle hoquetait.

Sa maman posa son couteau sur la table, s’essuya les mains sur son tablier, puis les posa sur ses hanches.

–      Mais bon sang ! Qu’est-ce que c’est que cette histoire ! Et cesse immédiatement de pleurer ! On ne pleure pas à ton âge ! Tu n’as pas honte ?

La petite fille baissa la tête sans mot dire.

Joséphine était une petite fille avec des cheveux ondulés, d’un noir de jais, qui contrastaient avec son teint pâle. Son visage était plutôt fin mais elle était un peu boulotte et surtout timide, trait de caractère qui insupportait sa mère.  Cette dernière avait toujours désiré des garçons, mais Dieu n’avait pas exaucé son vœu puisqu’elle avait eu deux filles. Et les filles, ça ne servait à rien qu’à être malheureuses avec un homme rustre –dont elles étaient amoureuses- qui ne leur donnerait que des enfants et pour lequel il faudrait être aux petits soins ! Et Joséphine, trop naïve et gentille, était vouée selon elle à une petite vie, comme la sienne.

–      Qu’est-ce qu’elles ont tes chaussures, dis-moi ! Hein ?

–      Je ne sais pas maman !

–      Tu n’as pas à écouter ce qu’elles te disent, elles le font pour te rendre jalouse ! Ecoute-moi, tes chaussures sont très bien, et je ne veux plus t’entendre te lamenter, c'est clair ?

–      Oui, maman !

–      Bien, va donc faire tes devoirs !

–      Oui, maman !

La fillette s’installa donc dans la cuisine, près de sa mère et ouvrit son cartable d’où elle en sortit un livre. Elle adorait son livre de lecture avec ses belles illustrations. Elle l’ouvrit et s’attarda dans la contemplation d’une image.

C’était la représentation d’une famille : il y avait là le papa, la maman et deux enfants, un garçon et une fille, souriants et heureux d’être ensemble, dans un salon magnifiquement meublé et chaleureux ; ils devisaient tranquillement.

Joséphine demeura un moment, fascinée, à contempler cette scène pendant que sa mère terminait de préparer le repas. La petite Amélie, âgée de cinq ans, essayait vainement d’attirer l'attention de sa maman en tirant sur son tablier.

–      Tu n’as pas de devoir ni de leçon ? Tu dois travailler Joséphine, tu as déjà redoublé ta première année !

–      Si, je dois lire ce texte, mais je n’y arrive pas trop !

–      Eh bien, ma fille, je n’ai pas trop de temps pour toi, là ! Range ton cartable et prépare la table pour le dîner, ton père ne va pas tarder à arriver !

–      Oui, m'man !

A peine ces mots furent-ils prononcés qu’elles entendirent la porte d’entrée s’ouvrir brusquement et un homme pénétra dans la pièce. Il était plutôt beau, mince, des cheveux brun clair un peu trop longs, des yeux bleus. Il avait l’air harassé. Son épouse se précipita vers lui et lui dit :

–      Mon chéri, te voilà enfin ! Viens, assieds-toi, je t’apporte ta bière tout de suite ! Joséphine, va chercher un verre pour ton père, dépêche-toi !

La fillette s’exécuta et revint avec un verre qu’elle posa sur la table basse près de son père. Celui-ci venait de se débarrasser de son vieux blouson et en tendant le bras, il dévoila un tatouage représentant une tête de mort.

L’homme marmonna dans sa barbe et sans un regard pour quiconque, se laissa tomber lourdement dans un fauteuil, les yeux mi-clos. Sa femme lui apporta sa bière et voulut la verser dans le verre, mais il lui saisit la boisson des mains et but directement plusieurs gorgées au goulot. Puis il posa la bouteille en rotant bruyamment, s'essuya la bouche avec sa manche et leva enfin la tête vers les trois regards féminins.

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