Ce soir, rien ne va.

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Ce soir, Winona à vingt ans. Elle n’est plus une enfant mais reste une enfant, presque la mienne. Lui céder serait criminel deux fois, sinon plus.

Pourtant, je suis faible. Ce soir, Winona me rappelle celle qui a tout embardé. Rose. Qu’elle était belle, Rose. Elle était la meilleure de toute en plus d’être la pire. La seule, selon mes plus récentes définitions. Tout au moins la première. Plus de quinze ans se sont écoulés et elle reste ma créature de fantasme. Je suis toujours piégée dans son cercle de fumée.

— Je peux avoir un verre ? demande Winnie, aguicheuse.

— Tu n’attends pas quelqu’un ? demandé-je.

— Non, je retrouve quelqu’un.

— Adrien ? supposé-je.

Mais il s’est enfuit, le stagiaire. Son Virgin Mojito et lui ont trouvé bonheur ailleurs, plus loin, au fond du bar. Elle me corrige d’un regard enjôleur et mutin.

À sa demande, elle en a le droit, j’alcoolise Winnie. Raison de plus que je donne à ma conscience pour ne pas y toucher. Nous parlons. Habile, elle évoque les plus beaux moments de nos enfances, comme si nous les avions vécues en simultanée. Sans parler d’âge, elle me rappelle que j’ai souvent été assez petite pour lui tenir compagnie, elle assez grande pour me tenir tête.

Ce soir, je suis Rose et Winona est moi ; Peut-être l’inverse. Si j’écoutais la voix de ma raison, mieux encore que devant Reiner, je fuirais.

Imbibée, Winona veut danser. Elle m’entraine dans une ronde folle, loin de mon comptoir. Rajeunie, insouciante, je me joins à elle de gré, de toutes mes forces.

Ce soir, ma voisine a trop bu pour rentrer seule. Je confie la maison à mon suppléant et la remmène chez nous, chez moi. Juju la salue. Ils sont amis à toutes les heures. Lily dort, je crois. J’espère.

Je suis tentée d’abandonner Winona aux bras du canapé, mais elle résiste. Elle veut ma chambre. Elle veut s’étendre nue comme la muse qu’elle est sur mes draps, eux qui connaissent si bien le péché.

— Il fait chaud, prétexte-t-elle.

Ce soir, Winnie dort blottie contre moi, qui suis son premier amour. La seule. La meilleure et surtout la pire. Je l’adore et je me hais.

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