Chute de tension

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 Mes jambes tremblent, certainement à cause de l’adrénaline. Mes idées, jusqu’ici si claires, paraissent complètement folles. Je me suis jeté sur un commando, une brute du MIB. Bon d’accord, je l’ai pris par surprise, mais quand même, qui aurait cru ça de la petite étudiante en info que je suis. La fierté se mélange à une nausée lancinante et la joie de voir la main d’Antarès tendue vers moi.

 Je la saisis. Il me soulève comme une plume, je suis désormais devant lui. Il me serre dans ses bras, me réconforte, la tête plongée dans mes cheveux, il susurre des mots apaisants. Je ne les comprends pas, mais le ton de sa voix me suffit. Nous restons ainsi pendant une éternité.

 Puis les bruits de conversation s’immiscent dans notre bulle, mais surtout de petits miaulements plaintifs, et des à-coups sur nos jambes, d’abord timides, puis de plus en plus insistants, accompagnés de bruyants ronrons.

 Notre regard se penche sur le matou qui demande notre attention, brisant l’instant de pure magie, certainement pour en réclamer une part.

 Nos bras se délient et nous nous regardons. Antarès affiche un air désolé, un peu hors du temps. D’un coup, sa figure passe par une série d’expressions allant de l’attendrissement à l’agacement jusqu’à celui d’une intense réflexion. Ses yeux courent des débris de l’appareil des MIB au chat, puis me reviennent.

 « Si t’allais voir comment se porte ton amoureux et sa copine, nous devons parler, ce monsieur et moi, dit-il en montrant le félin d’un geste. »

 J’observe un instant le maudit matou, puis je me retourne vers le groupe qui, plus loin, tente de se remettre de ses émotions. Lorsque je m’approche, je vois et j’entends que Claudia parle avec les deux vieilles personnes. Elle s’adresse à eux dans un bon Français, teinté d’un léger accent.Souriante et remplie de bienveillance, on est loin de la furie qui, quelques minutes plus tôt, pouttrait un gros balèze. Pierre, visiblement perdu, tente de comprendre ce que sa copine raconte. Son air sérieux et attentif ne suffit pas à voiler son inquiétude quand son regard glisse sur le visage et les bras tuméfiés de Claudia.

 Je jette un coup d’oeil en arrière, vers les deux aliens de service. Antarès se tient à quatre pattes, à quelques centimètres du chat, la bouche de chacun d’eux bouge par intermittence. Ils échangent certainement les bons plans du tourisme extra-terrestre.

 Lorsque j’arrive près d’eux, Pierre porte son attention sur moi. Scrutateur, il s’assure que je vais bien et lâche un sourire de soulagement. Un très beau sourire, rayonnant et bienveillant, auquel je réponds par une grimace par laquelle je tente de dire que tout va bien, merci.

 Claudia se poste devant moi et me tend la main.

 « Bonjour, je suis l’agent Gabriela Zafieri de la police municipale de Venise, et voici mon collègue, Silvio Lavoretti, j’espère que vous vous portez bien. »

 Son accent chantant et sa voix douce contrastent avec son regard rempli d’interrogation, elle zézaie légèrement, comme si son prof de français le lui avait appris en même temps que la prononciation des mots. C’est un pur canon italien, une tuerie latina avec des bleus sur la figure et le front. Même abîmée, c’est un top. La belle et la bête dans un même corps !

 « Nous aimerions vous poser quelques questions, il serait bon que vous et votre ami nous accompagniez, rajoute-t-elle, en jetant un coup d’œil sur l’étrange conférence que mènent Antarès et le chat derrière moi.

 — Bien sûr, cela semble naturel, réponds-je, réfléchissant aux implications de l’information qu’elle vient de me donner : Pierre et Claudia (ou plutôt, Gabriela et Silvio) sont des flics et ne nous laisseront pas tranquile avant d'avoir des réponses à leurs questions.

 — Est-ce que vous savez qui sont les personnes qui ont agressé madame et monsieur Dumonteil ?

 — Pas la moindre idée, réponds-je hâtivement »

 Difficile d’avouer à une bomba latina de la police qu’on est persuadé d’être poursuivi par une organisation gouvernementale dont le but est le contrôle des extraterrestres vivant sur terre. En fait, rien que le formuler dans ma tête me paraît complètement dingue. Alors, le dire à une inconnue, trop peu pour moi !

 Elle ne semble pas dupe, elle fronce les sourcils et me dévisage d’un regard suspicieux.

 Cette situation embarrassante prend fin lorsque le chat revient parmi les humains. Il se frotte langoureusement contre les jambes de Silvio (ah, j’ai du mal à l’appeler comme ça !) avant de sauter sur les genoux de sa maîtresse.

 « Nous allons accompagner madame et monsieur Dumonteil à l’Ospedale, pour contrôler leur état, nous aimerions que vous nous accompagniez pour relever vos témoignages, continue Gabriela. »

 Une brume épaisse commence à assaillir mon cerveau, je crois que j’ai besoin de m’asseoir. Je choisis une tombe pas trop encombrée et écoute la policière sans trop comprendre ce qu’elle me dit. Je vois Silvio accroché à son téléphone, en pleine conversation. La tête me tourne.

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