Le Conseil (1/4)

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Je serpentai pendant un bon quart d'heure, seulement accompagné de la lueur de ma torche et de la mélodie de mes pas.

J'arrivai non sans un certain soulagement à ce qui semblait être une vaste salle. Deux gardes m'attendaient à son entrée, dos à moi.

Je tendis ma torche à l'un d'eux tout en fixant le halo de lumière au centre de la pièce. Il provenait d'un trou béant situé à plusieurs dizaines de mètres au dessus de nous. Ils n'allaient pas me faire croire que cette lumière provenait du soleil. Il était bien trop tôt. Mon sixième sens me confirma mes doutes. Ce halo transpirait la magie.

– Avancez, kalatorn, lança une voix dans l'obscurité.

Elle venait de droite, lointaine, comme à l'autre bout de la pièce.

J'avançai lentement jusqu'à cette clarté magique et m'arrêtai devant.

– Pénétrez dans le cercle lumineux.

Faisant fi de ces ordres, je me concentrai plus fortement sur ma perception. Le cercle ne semblait pas être dangereux. Cependant, avec l'état dans lequel était ma magie, je préférai être prudent. J'étendis mon sens à toute la pièce et perçu cinq traces de magie disposées en demi-cercle devant moi. La voix qui avait parlé, une femme, était la plus à droite.

– Je vous ai dit d'avancer dans le cercle, répéta-t-elle.

Bon... j'avais affaire au Conseil semblait-il. Bien que je souhaitais rester dans cet endroit, je n'allais pas pour autant jouer les gentils invités.

Je fixai volontairement là où je savais que la femme se tenait alors que je n'aurais pas dû connaître sa position dans le noir qui nous entourait.

– Soit... fis-je. Je franchis le cercle et attendis.

– Êtes-vous guéris, kalatorn ? me questionna une voix d'homme sur ma gauche.

– Non, répondis-je.

– Vous guérissez pourtant très vite.

– Si vous le dîtes. Silence. Avaient-ils le moyen de discuter entre eux sans que je l'entende ?

– Qui êtes-vous ?

Je pouvais répondre sincèrement à cette question.

– Je suis un vagabond à la recherche d'un ancien artefact.

– Il y a de nombreux artefacts de part le monde, ricana une troisième voix.

Je me tournai vers l'endroit exact où je savais que je regardais l'homme dans les yeux.

– Et il y a de nombreuses raisons de les chercher.

Nouveau silence.

– Parlons plutôt de vos vêtements.

Enfin, ils arrêtaient de tourner autour du pot.

– Ils sont magiques. Êtes-vous magicien ?

– Non.

Mensonge. Bien que dans l'immédiat, cela relevait plus de la vérité.

– Vous guérissez vite, et vos vêtements sont magiques. Bien que vous n'ayez pas de traces sur vous, il est quand même difficile de croire que vous n'êtes pas magicien.

– Nul ne peut cacher sa trace. C'est impossible.

Exception faite des démons et des dieux.

Énième silence. Cela commençait à m'irriter.

– Quelles sont vos intentions, kalatorn ?

Enfin une question intelligente.

– J'ai une dette envers cette femme qui m'a soigné. Je me dois de rembourser cette dette avant de poursuivre mon chemin.

– Ah oui... cette femme...

Quatrième voix. Beaucoup trop mielleuse à mon goût.

– Garde, allez la chercher.

J'entendis du mouvement derrière moi.

Voilà qui allait prendre un petit moment. Je décidai de m'asseoir posément. Je suivis le garde grâce à mon sixième sens, mais il alla trop loin. Je n'avais pas l'habitude de recourir à ma perception si longtemps, ni sur une telle distance. Au moins, chacun ici avait une trace et donc était un magicien. Cela facilitait les choses.

Après ce qui me parut une éternité, j'entendis des pas derrière moi. Beaucoup trop proche à mon goût pour que je ne les perçoive que maintenant. Ma doctoresse était d'une rare discrétion.

Elle vint se mettre dans le cercle, à ma droite. Je restai assis.

– Je sens comme une certaine tension, remarqua-t-elle avant même que le Conseil ne prenne la parole.

Elle darda ensuite sur moi un regard lourd de reproches.

– J'ai été aussi courtois que mon caractère me le permet, me défendis-je.

Ses lèvres frémirent et son visage s'adoucit. Pendant une fraction de seconde, nous partageâmes un moment d'étrange complicité. Comme si l'évocation de mon caractère faussement poli nous était familier à tous les deux.

– Lucilia.

Ce moment magique s'envola à l'instant même où j'apprenais son nom.

Lucilia ?

Je restai à la fixer tandis qu'elle faisait face au Conseil.

Ce nom ne m'était pas inconnu mais impossible de me souvenir où je l'avais entendu, ni même si c'était moi qui l'avait entendu.

– Cet homme prétend avoir une dette envers toi. Nous savons que tu t'en es occupé pendant quelques jours. Il souhaite rester pour rembourser cette dette. Qu'as-tu à dire là dessus ?

– Rien.

Hivernal. C'est l'adjectif le plus froid qui me vint à l'esprit quant au ton qu'elle avait employé. Était-ce habituel qu'elle s'adresse ainsi au Conseil ? Alors même que je la sentais chaleureuse une demie seconde avant de répondre.

– Le Conseil a donc pris sa décision.

Je me relevai lentement.

Une décision ? Si rapidement ? J'avais comme l'impression qu'ils avaient décidé depuis longtemps. Lucilia avait dû leur parler de mon étonnante récupération et ils en avaient tiré des conclusions dont je sentais qu'elles n'allaient pas me plaire.

– Dans une heure, sur la place du Sinda, lança la première voix. Nous jugerons si vous êtes digne de rester parmi nous.

Après un léger hochement de tête, ma doctoresse sortit du cercle en me faisant signe de la suivre. Je sentis que les membres du Conseil ne bougeaient pas, eux.

– Venez, insista-t-elle.

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