Chapitre 6

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Je su tout de suite que j’étais arrivé à destination. De nombreuses personnes venant de toutes les directions s’agglutinaient devant un bâtiment perdu au milieu de la masse humaine. Il n’était pas petit pourtant… Cette vision me rappela la situation que nous avions vécu lorsque nous étions allés aux Etats-Unis pour la Sélection. La sensation que tous les hommes c’étaient donné rendez-vous au même point.

Je remarquais que la plupart étaient des hommes entre 15 et 40 ans, il y avait beaucoup de femmes également mais comparé à la masse imposante de la foule, elles étaient insignifiantes.

Pour patienter et surement, inconsciemment pour évaluer mes prochains rivaux, je les dévisageais. Je constatais alors que la majorité avait un visage impassible, mais leur regard exprimait toute la peur qu’ils ressentaient et qu’ils tentaient de masquer derrière un masque inexpressif. Le reste ne cachait soit pas sa peur soit pas sa joie. Lorsque je vis pour la première fois un visage joyeux j’en vins à me demander comment on pouvait être heureux dans un moment comme le nôtre. Quelles étaient ses motivations pour participer à cette course ? Pour lui ? Pour un membre de sa famille comme moi ? Quelle était son histoire pour que la perspective d’une mort prochaine le réjouisse à ce point ? Parce que ça ne faisait aucun doute dans mon esprit, beaucoup de personnes autour de moi ne rentreraient surement jamais chez elles ou alors les pieds devant. Moi y compris. Puis j’en vis un second, un autre et encore un autre et je finis par arrêter de chercher à comprendre. J’arrêtais aussi de tenter de m’imaginer sur le départ avec la foule qui m’entourait.

Nous avons encore attendu un moment puis une voix a raisonné, se répandant dans l’air autour de nous à l’aide des haut-parleurs fixés sur le bâtiment.

« Votre attention s’il vous plait, nous allons bientôt commencer l’accueil. Nous vous ferons rentrer par groupe de dix pour vous fournir l’implant. Mais au vu du nombre faramineux d’inscriptions, le gouvernement à ajouter une petite étape intermédiaire pour filtrer les futurs participants. Pour votre bien, pour éviter des morts inutiles vous allez passer un examen médical. Seul le médecin sera habilité à vous autoriser ou non. Si vous pouvez le faire il vous implantera votre plaque sinon vous devrez partir. Merci de votre compréhension. Cela commencera d’ici trois minutes. »

La foule s’agita comme un animal blessé, certains paniquaient. Ils étaient sûr qu’ils ne seraient pas acceptés et tentaient d’élaborer dans les trois minutes un moyen de tricher. C’était le cas de mon voisin de gauche qui après avoir retourné le problème dans tous les sens à voix haute, s’était tourné vers moi, quémandant mon aide, me suppliant d’avoir pitié de lui, il me fit la liste des membres de sa famille, cherchant à m’attendrir.

Malheureusement pour lui les trois minutes étaient écoulées et on commença bientôt à nous faire entrer. Il paniqua complètement et hurla comme un fou furieux. Avant même que je n’ai pu ouvrir la bouche, il était parti en courant, traversant la foule en se cognant à peu près contre tout le monde. Beaucoup d’autres fuirent comme lui mais ils étaient trop peu nombreux pour diminuer notre nombre significativement.

De mon côté même si je pensais être capable de franchir ce test j’étais furieux. Le gouvernement nous avait menti, une fois de plus. Pour la Sélection ils avaient bien insisté sur le fait que tout le monde avait une chance, or avec Clio nous avions été déclaré « trop jeune ». Pas « ne correspondent à aucun profil » mais trop jeune. Ce qui signifiait qu’ils avaient bien quelque chose en tête mais qu’ils s’étaient contenté de nous dire que tout le monde pouvait participer pour ne pas se mettre la population à dos. Ils voulaient garder le beau rôle et faire passer les médecins et employé qui nous refusaient pour les méchants, pour que nous rejetions la faute sur eux et non sur notre cher gouvernement tout puissant. Lors de cette première chance n’était donc accepté que des hommes et des femmes avec un certain profil et un âge particulier, voilà pourquoi Clio et moi n’avions pu réussir, nous étions trop jeunes.

En plongeant plus profondément dans mes pensées j’en revins à une réflexion que j’avais eu sur le bateau. Ils voulaient des gens parfaits pour une descendance parfaite. Sur le moment j’avais juste pensée que les enfants comme nous grandirions et que les personnes plus âgées élèveraient les jeunes que nous étions. Mais non, j’avais faux sur toute la ligne. Ce qu’ils voulaient c’était des hommes et femmes parfaits capables de procréer, donc ni trop jeune, ni trop vieux. Ce qui collait parfaitement aux tranches d’âges accepté que nous avions remarqué lors de l’attente de notre passage, sur la place. Nous avions été manipulés. Une fois. Et là, alors que c’était notre dernière chance, notre dernier espoir, ils recommençaient. Ils annonçaient d’abord à tout le monde que nous pouvions tous participer, puis sous prétexte d’éviter des « morts inutiles » ils refaisaient un tri pour n’autoriser que certaines personnes à participer. Comme si nous n’allions de toute façon pas tous mourir en fin de compte. Nous étions tous condamner, alors mourir durant la course ou mourir un an voire trois-quatre ans plus tard quelle différence ?

En pensant à cela je me remémorais ma conversation avec Clio, elle n’avait pas tort, je pensais la même chose qu’elle, sauf que je ne pouvais me permettre de la laisser prendre de tel risque, et de toute façon elle aurait surement été recalé à leur pseudo test imprévu.

En fait, seul un nombre réduit de personnes sur cette planète avaient eu une véritable chance de se sauver la vie, les autres étaient condamner depuis le départ. Trop vieux. Trop jeune. Trop faible. La loi du plus fort, on en revenait encore à ça. Comme quoi nous étions bien des animaux pour ceux qui en doutaient encore, un animal qui, placé dans un danger de mort immédiate ce débarrasse de tous les obstacles, y compris ses congénères trop faibles pour le suivre, seul les plus forts survivent, seul les meilleurs ont une véritable chance. Les autres ne sont que des poids morts dont il faut se débarrasser au plus vite.

Perdu dans mes pensées je ne fis pas attention à ce qui se passait autour de moi. Je m’étais rapproché de la porte du complexe et je n’allais pas tarder à rentrer. Les gens autour de moi me regardaient en coin légèrement inquiet. Je ne compris pourquoi que lorsque je vis mon reflet dans l’une des vitres du bâtiment. Toute la colère qui bouillonnait en moi m’avait giclé au visage, me donnant une allure dangereuse et effrayante. Je réalisais que je n’avais jamais été en colère à ce point, jamais je n’avais exprimé de tels émotions sur mon visage avec cette intensité.

En découvrant ça, mes traits s’adoucir légèrement, mais pas suffisamment pour rassurer mes voisins. Je me dis que c’était une bonne chose, si parmi quelques personnes j’inspirais la peur, j’aurais peut-être des adversaires en moins, des personnes qui préfèreront me contourner plutôt que m’attaquer. Enfin, à condition qu’ils parviennent jusque-là.

Un jeune homme vêtu de blanc des pieds à la tête vint chercher un groupe de dix personnes. Je ferais partis du prochain. Après une petite dizaine de minutes je vis ressortir deux des dix personnes précédentes. Encore quelques minutes et deux de plus apparurent. Les traits défaits, ils respiraient le désespoir par tous les ports de leur peau. Finalement sur les dix précédents, seulement quatre restèrent.

Avec les neuf autres personnes qui devaient rentrer avec moi, nous nous sommes regardés, nous scrutant mutuellement pour savoir qui de nous pourrait rester et qui devrait partir. Le jeune homme en blanc réapparut et avec un regard impassible nous conduisit à l’intérieur.

Nous pénétrâmes alors dans un grand hall tout aussi blanc et étincelant que sa tenue. Je du cligner des yeux pour m’habituer à cette luminosité qu’il n’y avait plus à l’extérieur depuis un moment. Depuis que le nuage de pollution avait recouvert la planète comme un chaud manteau d’hiver, nous étouffant au passage. L’hiver, une saison que nous ne connaissions plus d’ailleurs, avec ce nuage était venu un réchauffement climatique, maintenant la neige était une légende dans nos esprits et rare étaient ceux qui pouvait encore en parler, ils étaient tous mort ou cela n’allait pas tarder.

Il nous dit que nous pouvions retirer nos respirateurs sans crainte. Ce que nous fîmes. Puis il nous guida vers la droite le long d’un couloir éclairé avec des néons qui dispensaient une lumière crue sur les murs, sols et plafond blanc. Le couloir était parsemé de portes closes avec un clavier à côté signifiant que seul ceux ayant les bons codes pouvaient franchir ces portes. Que pouvait-il bien y avoir derrière ces portes ? Des salles de contrôle ? Des mini bloc opératoire pour nous implanter les puces ? Des studios de télévisions pour découper et monter l’émission de la course ? Allez savoir. Pourquoi étaient-elles protégé par des codes ? C’était surtout ça qui me perturbait, car visiblement nous ne pouvions pas nous déplacer dans ce bâtiment sans être accompagné et sans être espionné par les nombreuses caméras de surveillance qui étaient disséminées tout au long du couloir, donc pourquoi craindre qu’une personne n’ayant rien à faire là pénètre dans l’une de ces pièces ? Je ne pus pousser d’avantage la question car nous venions d’arriver.

Au bout du couloir se trouvait une sorte de salle d’attente avec de vulgaires chaises en plastique répartis contre les murs. Il nous demanda de nous assoir le temps que nous soyons appelé par nos numéros. J’allais lui demander de quels numéros il parlait mais il avait déjà tourné les talons et disparaissait derrière une porte battante sans clavier. Je me tournais vers le reste du groupe.

-          Vous avez une idée de quel numéro il parle ?

Ils me regardèrent tous sans comprendre. Ils ne savaient pas plus que moi. Soudain une voix retentie derrière nous.

-          Moi oui.

Je réalisais à ce moment-là que l’un de nous était déjà allé s’asseoir sur l’une des chaises. C’était un jeune homme surement du même âge que moi, blond aux yeux gris clair, le regard sûr et le menton volontaire. Ses cheveux avaient l’air d’être décoiffé et négligé mais n’importe qui en y faisant plus attention se serait rendu compte qu’en réalité chaque mèche avait été savamment placé pour donner l’illusion d’une coupe négligée. Il avait un air arrogant peint sur le visage et un je ne sais quoi qui émanait de lui me donnait envie de lui enfoncer mon point dans la figure. Il souriait fier de nos expressions d’incompréhension.

-          C’est tout bête en fait, dit-il pour ménager son petit effet, par exemple moi je suis le numéro un. Tout simplement parce que je suis assis sur la chaise numéro un. Conclu-t-il ravi et suffisant.

Nous nous approchâmes des chaises pour constater qu’effectivement elles avaient toutes un numéro de un à dix.

Je m’assis sur la trois pour ne pas être à côté de lui. Entre nous s’installa une jeune fille d’environ vingt ans, avec une somptueuse chevelure rousse qui lui faisait comme une crinière autour de la tête lui donnant un air féroce.

Ce fut ses yeux qui me permirent de la reconnaitre. Une nuance unique au monde, un mélange de brun doux et de doré éclatant. Je la connaissais, il s’agissait de la jeune femme qui nous avait accueillis aux Etats-Unis et nous avais annoncée, désolée, que nous étions refusés. Il s’agissait de Gabrielle. Mais que faisait-elle là ? Pourquoi ne s’était-elle pas inscrite aux Etats-Unis ? Je me penchais légèrement vers elle.

-          Excuse-moi, lui dis-je sans trop savoir comment commencer, tu ne te souviens surement pas de moi mais… est-ce que tu es Gabrielle ?

Elle haussa un sourcil en me détaillant pour essayer de se souvenir de l’endroit où elle m’avait vu. Mais je vis à son regard perdu qu’elle ne trouvait pas. Je décidais de l’aider un peu.

-          Tu étais la jeune femme de l’un des guichets d’accueil aux Etats-Unis pour la Sélection…

Plus je parlais plus je me rendais compte à quel point j’étais stupide de m’entêter, elle avait surement vu des centaines de millier de personne par jours et ce n’était pas les quelques minutes que j’avais passé à son guichet avec Clio qui allait changer quelque chose. J’étais sur le point de lui dire de laisser tomber quand elle hocha la tête.

-          Oui c’est bien moi, je ne me souviens pas de toi par contre, il y avait trop de monde… dit-elle comme pour s’excuser. Comment t’appelles-tu toi ? Me demanda-t-elle dans un nouveau froncement de sourcil.

-          Lucien, mais tu peux m’appeler Luc.

-          Enchantée Luc ! Me dit-elle avec un sourire.

-          De même, lui répondis-je. Je voulais te demander, pourquoi t’es-tu inscrite à la Course en France ? Je veux dire… enfin… tu n’es pas américaine ?

-          Et bien non en fait, je suis française, mais par rapport à mon travail j’ai dû aller vivre quelques années en Amérique, c’est pourquoi ils ont fait appel à moi pour enregistrer tout… disons pour ce travail. Après ils m’ont fait comprendre qu’ils n’avaient plus besoin de moi et je suis rentré en France pour retrouver ma famille ou en tout cas ce qu’il en reste… en disant cela son visage s’assombrit et ses yeux brillèrent de tristesse. De toute façon s’ils ne m’avaient pas renvoyé je serais partit quand même, il est hors de question que je meure chez eux, comme une étrangère. Je voulais rentrer et puisque j’étais là, autant participer à la Course, on ne sait jamais. Une lueur de défis anima son regard lorsqu’elle prononça ces mots.

-          Je comprends… lui répondis-je. Que vont-ils faire de toutes les identités que vous avez rentré dans les ordinateurs ? Des statistiques ? Mais pour qui ? Dans quelques années il n’y aura plus aucun humain vivant à la surface de la planète.

-          Je n’en sais rien, ils ne m’ont rien dit. Je suppose que tu as raison mais…

-          Eh les deux tourtereaux il va falloir arrêter vos messes basses, nous sommes appelés. La coupa une voix détestable.

Je relevais la tête et constatais que le blond arrogant nous regardait avec un sourire narquois, du menton il désigna un petit écran accroché au-dessus de nos têtes sur le mur d’en face. On y lisait « Numéros 1 et 2 ».

Gabrielle me regarda et me salua d’un hochement de tête avant de se lever et de se diriger vers la seule porte de la pièce. La porte battante sans clavier que l’homme en blanc avait emprunté un peu plus tôt. Le blond la précédait, fier d’être le numéro un. Ils disparurent tous les deux et la salle se trouva de nouveau plongé dans le silence.

Je repensais au moment où j’avais reconnus Gabrielle. Pourquoi l’avais-je reconnue ? Pourquoi ne l’avais-je tout simplement pas oublié depuis notre déception aux Etats-Unis ? Je ne pensais pas me rappeler d’elle jusqu’à ce que je la voie, ici, en France. Une chance sur combien que ce soit elle ? Et pourtant ses yeux, cette couleur si particulière, ce ne pouvait être que les siens. Je me rendis compte que ce qui m’avait le plus marqué lorsque je l’avais rencontré, c’était sa magnifique chevelure d’abord remonter en chignon puis laisser à la sauvage reposer dans son dos et sur ses épaules, et ses yeux, ses yeux fatigués qui avaient retrouvé toute leur vigueur aujourd’hui.

Cinq minutes environ après qu’ils soient partit l’écran s’anima de nouveau. « Numéros 3 et 4 ». L’homme assis à ma gauche se leva et me suivis à travers la porte battante.

De l’autre côté nous découvrîmes une sorte de grande salle qui me faisait penser à un gymnase pour de grandes compétitions, à la différence près que sur le terrain il n’y avait pas d’équipes mais des médecins et des infirmières ainsi que des prétendants à la Course comme nous, il n’y avait pas non plus de gradins mais de grands draps blancs tiré sur un câble pour séparer cette immense salle en deux. Je pouvais voir tout ça car nous étions en haut d’un escalier qui surplombait la pièce gigantesque. D’un côté des draps blancs, il y avait des tapis de courses, des tables d’examens et de nombreux appareil de mesures. De l’autre côté tout ça avait disparu pour laisser la place à des lits de camps pratiquement tous occupé. Certain, un bandage leur enserrant le poignet étaient laissé ainsi, pour d’autres un médecin s’occupait d’eux.

Je compris que la partie où l’escalier nous faisait arrivé était l’endroit des examens, c’était ici que les médecins allaient nous tester pour savoir si nous pouvions ou non participer puis si c’était le cas nous passion de l’autre côté où ils nous implantaient la puce.

En descendant l’escalier je me mis en quête de la chevelure flamboyante de Gabrielle, mais je ne la vis nulle part. Avait-elle échoué ? J’espérais que non, je ne savais pas pourquoi mais je voulais qu’elle réussisse. C’était tout à fait illogique car si elle échouait ça me ferait une personne de moins à battre durant le Course.

Je jetais un dernier coup d’œil en cherchant cette fois-ci la coupe millimétrée du blond mais lui aussi restait introuvable.

Nous étions en bas de l’escalier, et à peine avions-nous retiré le pied de la dernière marche qu’un homme à l’air revêche nous appela pour que nous le rejoignons à son bureau. Un bureau qui était en réalité une petite table avec des piles de papiers encadrant un ordinateur. Il nous demanda nos noms et prénoms ce qui lui permis de retrouver nos dossiers. Ou plutôt le lieu de rangement, il alla fouiller dans une des nombreuses caisses qui s’entassaient contre le mur derrière nous et en émergea avec deux dossiers en main. Nos dossiers d’inscription.

Il les donna à un médecin qui nous entraina vers deux appareils de mesures. Il prit notre tension, notre pou et tout un tas d’autres chiffres qu’il nota consciencieusement sur deux feuilles séparées qu’il ajouterait certainement à nos dossiers plus tard. Il nous demanda de courir sur le tapis, là aussi il récolta plusieurs chiffres qui allèrent s’ajouter aux précédents.

Puis il nous fit des prises de sang et rechercha différentes maladies, il fit une radio de nos poumons et de notre squelette entier, examina nos yeux, nos oreilles, nos parties intimes à la suite et nota toutes ses observations.

Puis il prit un tampon de couleur bleu et estampilla ma feuille d’un grand « Accepté » ainsi que le dessus de ma main. Pour l’homme qui m’accompagnait ce fut une autre histoire. Il lui tamponna la main et la feuille avec un tampon rouge « Rejeté » et lui montra la sortie tandis qu’une infirmière m’entrainait dans une petite pièce que je n’avais pas vu du haut de l’escalier.

L’homme qui y était assis me demanda mon dossier, que le médecin m’avait remis après m’avoir choisi. Il le rangea dans une caisse et sortie d’une autre cinq capsules d’oxygène grand format. Au moins le gouvernement ne nous avait pas menti sur ça.

Puis l’infirmière me conduisit, après que j’ai rangé les capsules dans mon sac à dos, dans la seconde partie que j’avais vu du haut des escaliers. Celle avec les lits de camps. Elle m’arrêta devant l’un des lits vides et me demanda de m’y allonger.

Un médecin s’approcha de moi, il vérifia rapidement la couleur sur le dos de ma main, puis il me demanda mon poignet gauche. Je le lui tandis. Il le posa sur une petite planche incrustée au lit et m’ordonna de ne plus bouger.

-          Ça risque de faire mal. Dit-il avant d’enfoncer la lame de son scalpel dans mon poignet.

Nous n’avions apparemment pas le droit à un anesthésiant pour l’opération et une douleur fulgurante me scia le poignet et me cloua sur le lit. Je serais mon poing droit ainsi que mes mâchoires.

Il avait évité les vaisseaux sanguins important mais cela n’empêcha pas le liquide poisseux de dégouliner. Avec des gestes précis il prit une compresse et épongea de façon sommaire le sang. De ses doigts gantés, il joua de la pince pour récupérer la puce qui était dans une petite coupelle sur la planche où reposait mon bras. Je ne l’avais pas vu avant, d’où venait-elle ? Du coin de l’œil j’aperçu ma réponse, une infirmière s’éloignait en poussant un chariot recouvert de coupelle comme la mienne. Il inséra l’extrémité de la pince dans la plaie sanglante avec la puce et l’y laissa. Satisfait de lui, il ressorti la pince, attrapa du fil et une aiguille et recousu ensemble les deux bords de la plaie. Puis il fit signe à une infirmière qui s’approcha pour finir le travail.

Elle avait un air avenant.

-          Vous êtes tout pâle, me dit-elle, ça va aller ?

Les mâchoires encore serré je me contentais d’hocher légèrement la tête. Peu convaincu elle s’approcha quand même de mon bras et observa la blessure. Elle me regarda puis reporta son attention sur mon poignet.

-          Ecoutez, commença-t-elle, la coupure doit faire deux centimètres de long, mais le docteur ne s’est pas trop appliqué pour la recoudre et vous aurez une vilaine cicatrice. Voulez-vous que je la refasse ? Vous n’aurez toujours pas d’antidouleurs et il va d’abord falloir que je défasse ce qu’il a fait pour recommencer ensuite. J’en profiterais également pour désinfecter…

Je la regardais, essayant de déterminer si elle se moquait de moi ou si elle était sérieuse.

-          Pourquoi ? Parvins-je à articuler.

-          Pourquoi quoi ? Me demanda-t-elle surprise. Pourquoi je vous propose de vous la refaire ?

J’hochais la tête, c’était plus simple que de parler et mon bras m’élançait toujours atrocement.

-          Oh et bien, dit-elle une lueur d’amusement dans le regard, j’ai toujours aimé la couture.

J’haussais un sourcil. Elle se moquait réellement de moi.

-          Et je le propose à tous ceux dont je m’occupe, vous n’êtes pas une exception, certains acceptent d’autres s’en fichent. Me répondit-elle plus sérieusement. Alors vous voulez ou pas ?

Je ne pris qu’une demi seconde pour réfléchir, je m’en fichais bien de la cicatrice mais ce qui m’inquiétait davantage était qu’elle m’avait proposé de désinfecté. Sur le coup je n’y avais pas pensé mais le médecin ne m’avait pas enduit la peau de désinfectant avant de l’entamer avec son scalpel. J’acceptais donc pour pouvoir en bénéficier.

Elle me conseilla de regarder ailleurs, ce que je fis. Je n’avais pas particulièrement peur du sang mais peut-être qu’en évitant de regarder la plaie, la douleur se ferait moins intense. Je la sentais effleurer ma peau, je sentais le relâchement de la plaie après qu’elle eut défait les points, puis les tiraillements lorsqu’elle commença à la recoudre. Mais elle y allait tout en douceur et j’avais presque plus la sensation d’un papillon butinant ma peau que d’une aiguille la torturant.

-          C’est fini. Me dit-elle. Je vais faire votre pansement maintenant.

Je tournais la tête pour voir à quoi cela ressemblait. La blessure était bien plus propre et soignée, si cicatrice il y avait, elle aurait au moins l’avantage d’être discrète. Reconnaissant je marmonnais un merci. Elle attrapa un petit rectangle de gaze qu’elle appliqua délicatement sur la coupure, puis elle enroula mon poignet dans un bandage serré et fixa le tout avec du sparadrap. Je fis mine de me lever mais elle me retint.

-          Vous feriez mieux de rester quelques minutes allongées, votre corps viens de subir un choc et en plus vous n’avez pas été anesthésié, laisser lui le temps de s’en remettre. Je viendrais vous chercher.

Je me rallongeais en hochant légèrement la tête, à croire que c’était devenu mon seul moyen de communiquer. Elle sourit et se dirigea vers un autre patient. Je dus m’endormir car je fus réveillé par l’infirmière qui me secouait légèrement.

-          C’est l’heure, je vais vous conduire dans votre dortoir.

-          Mon dortoir ? Répétais-je d’une voix ensommeillée.

-          Oui, l’endroit où vous dormirez en attendant le début de la course.

Je me redressais, et constatais que la même effervescence animait cette espèce de grande salle semblable à un gymnase, qu’au moment où j’étais arrivé. Je n’avais pas dû dormir longtemps. Je me levais et ce faisant pris appuie sur mes bras pour descendre du lit. Une violente douleur remonta le long de mon bras gauche m’arrachant un gémissement. L’infirmière me regarda et me sermonna.

-          Faites un peu attention vous allez rouvrir votre plaie.

Je ne répondis pas, tenant mon poignet meurtri dans ma main droite. Elle me conduisit en dehors de la salle où je rejoignis un autre groupe qui comme moi venait de subir cette opération barbare.

Un homme habillé de blanc des pieds à la tête vint nous chercher et nous guida à travers un dédale de couloir jusqu’à une autre salle encore plus grande que celle que je venais de quitter. Celle-ci avait été rempli de lit de camps. Une bonne centaine d’hommes étaient déjà installés sur des lits mais il en restait tant de vaquant que je commençais à prendre la mesure du nombre de personnes que j’allais devoir vaincre pour sauver ma sœur.

Je commençais à me trouver ridicule avec mes grands airs de « je te sauverais » et de « je remporterais cette Course Clio ». Ça me paraissait déjà exceptionnelle qu’ils aient réussis à mettre en place une telle structure, une telle organisation, en si peu de temps. A croire qu’ils étaient au courant et qu’ils préparaient tout ça depuis des années.

Je choisi un lit un peu à l’écart histoire d’être tranquille. Je regardais ma montre et constatais que la journée entière c’était presque écoulé entre le moment où j’étais arrivé ce matin et maintenant quand je m’asseyais sur mon lit.

Plongé dans mes pensées, je fus surpris par le craquement de la couche d’à côté. Quelqu’un venait visiblement de s’installer à la droite de mon lit. Je n’aurais pas été tranquille longtemps. Je relevais la tête pour voir qui m’importunait et me retrouvais face à face avec le blond.

-          Hey salut ! Alors comme ça toi aussi tu as réussi à passer le test ?

-          Visiblement.

-          Tu ne dois pas être si nul alors.

-          Toi non plus, rétorquais-je, essayant de m’empêcher de lui enfoncer mon point dans la figure.

Décidément ce type n’avait pas de chance, je ne sais pas ce qu’il dégageait comme aura mais à chaque fois que je l’entendais me parler je n’avais qu’une envie et c’était de le gifler jusqu’à ce qu’il perde son arrogance et son air narquois. Il rit de ma réponse, il devait trouver ça « cool » que j’ai de la répartie.

-          Bon, nous en avons encore pour un moment à être ensemble, dehors il y a un monde fou, ils vont continuer jusqu’à ce qu’ils aient terminé.

-          Comment tu sais tout ça ?

Depuis que nous étions arrivés je n’avais pas revu l’extérieur ni entendu personne en parler. Je ne savais donc absolument pas comment les choses évoluaient.

-          Ba j’ai demandé pauv’tâche ! dit-il en éclatant de rire.

Comme je voulais en savoir plus je pris sur moi pour ignorer son insulte puérile.

-          Tu as demandé à qui ?

-          Au type en blanc, dit-il en prenant un air sérieux que je ne lui avais jamais vu, il a fallu que je revienne plusieurs fois à la charge mais il a fini par cracher le morceau. Autre chose… je peux te faire confiance ? Me demanda-t-il en plissant les yeux.

J’avais l’impression de me retrouver devant une personne différente, le type arrogant et détestable avait laissé place à un jeune homme sérieux et respectueux, enfin en tout cas pour l’instant.

-          Oui, enfin ça dépend de ce que tu vas me dire, je pense…

-          Logique après tout… bon, écoute, j’ai décidé de te faire confiance et de toute façon faut que je partage ça et tu es le seul type dans la salle qui ne m’est pas totalement inconnue. J’ai discuté avec une infirmière et elle m’a révélé un truc assez choquant. M’expliqua-t-il sur un ton de conspirateur en baissant la voix.

J’étais tout ouïe. Et surtout très curieux de savoir ce qu’il avait entendu.

-          Tu vois le nombre de lit qu’il y a dans cette salle ? Continua-t-il

J’hochais la tête pour ne pas l’interrompre.

-          Ça limite les places « Homme » pour la course. En gros plus il se rapproche de la limite plus le test devient infranchissable et pour finir ils n’accepteront plus personne. Pour les femmes c’est la même chose. Ils ont fait croire à tout le monde qu’on pouvait tous participer mais en fait ils avaient déjà déterminé un certain nombre de concurrents…

La colère qui m’avait ébranlé ce matin me reprit de nouveau. Je n’en croyais pas mes oreilles, c’était pire que ce que j’avais imaginé ! Comment pouvaient-ils se permettre de nous mentir à ce point ? Nous mentaient-ils sur autre chose ?

-          Tu n’as pas intérêt à l’ouvrir par contre, c’est clair ! M’agressa-t-il en m’attrapant par le col.

-          T’inquiète. Ce matin j’avais déjà compris une partie de l’histoire mais c’était pire que ce que je croyais en fait…

Il hocha la tête. J’avais finalement décidé de lui accorder ma confiance mais je restais quand même un peu méfiant. Allez savoir si ce n’était pas une ruse du gouvernement pour repérer les opposants au 5 puissances même dans cette situation particulière. Il se recula légèrement et c’est là que je réalisais que pour avoir notre conversation « top secrète » on s’était rapproché. Il me tendit sa main pour que je la serre.

-          Enchanté, dit-il, je m’appelle Tom et toi c’est Luc non ?

-          Non c’est Luci… oui c’est ça, Luc. Enchanté.

Finalement pourquoi ne pourrait-il pas m’appeler par mon diminutif ? Nous nous serrâmes la main. Durant les heures qui suivirent nous fîmes connaissance.

J’appris alors qu’il avait deux grandes sœurs, des jumelles, et un aîné. L’une de ses sœurs était morte ainsi que sa mère, il me décrivit son quotidien avec sa sœur mais ne me parla pas de son frère ou de son père. Il restait très flou à leur propos lorsque je lui posais des questions à leur sujet.

De mon côté je lui racontais ma propre vie, mes parents, ma sœur et même mon voisin Phyl. On se livrait à l’autre comme si c’était notre dernière chance de le faire – ce qui était surement le cas – comme si on ne venait pas juste de se rencontrer.

Cela faisait longtemps que je n’avais pas éprouvé ce sentiment donc je n’étais pas sûr, mais il me semblait que plus on parlait plus nous devenions « amis ». Quand je pense qu’au début de la journée je ne le supportais pas, et là nous discutions calmement de nos vies respectives, de nos secrets, enfin pas tous même si je n’avais pas grand-chose à cacher.

A nous entendre on aurait été bien en peine d’imaginer que d’ici quelques jours, nous serions rivaux, car il n’y avait qu’une seule place à gagner et il était hors de question de la céder à l’autre. Mais pour l’instant nous oublions la misère de nos vies pour découvrir quelqu’un de nouveau.

Du coin de l’œil nous surveillions les entrées et nous remarquions que chaque groupe était de plus en plus petit, jusqu’à ce qu’il n’y en ait plus que deux ou trois à chaque fois.

-          Dis-moi, Luc, il y a quelque chose entre cette rouquine et toi ?

Je mis du temps à comprendre de qui il me parlait.

-          Non pas vraiment mais tu devrais le savoir puisque visiblement tu as écouté toute la discussion, lançais-je avec un petit sourire moqueur.

Il éclata de rire avant de me répondre.

-          C’est vrai tu n’as pas tort.

-          Au fait, tu sais si elle a réussi le test ?

-          Non, nous avons été séparés, elle a été emmenée ailleurs avant que je ne commence le test. Il ne mélange pas les filles et les garçons… dommage, ajouta-t-il après une petite pause calculée, parce que je suis sûr que j’aurais apprécié passé la partie « à poils » du test avec elle.

-          Fais pas ton malin, lui rétorquais-je en riant et en lui donnant un petit coup de poing dans l’épaule.

Il rit et moi aussi. Tous deux nous dérivâmes vers le fou rire. Ça faisait tellement du bien de se lâcher ne serait-ce quelques secondes. Retirer le poids de toutes les responsabilités de ses épaules et se comporter comme les grands ados de 18 ans que nous étions. Mais les regards tantôt flamboyant de colère tantôt glacial et méprisant de nos voisins de couches nous obligèrent à nous calmer.

Même si les lumières était resté allumé, même s’il y avait toujours des groupes de trois personnes maximums qui entraient et provoquaient un mouvement constant dans ce gigantesque dortoir, ma montre indiquait qu’il était tard et nous décidâmes d’un commun accord de nous coucher pour être en forme le lendemain. Avant de fermer les yeux et de m’endormir la tête sur mon sac à dos pour m’assurer qu’on ne me volait rien, l’image de Clio au moment où je partais apparut devant mes yeux et dans ma tête résonna la promesse qu’on c’était fait avec Tom. Peu importe ce qui se passait avant l’épreuve, mais durant la Course c’était du chacun pour soi.

Le lendemain j’ouvris les yeux tôt. Tout le monde dormait mais j’avais entendu un bruit et c’était ce qui m’avait réveillé. C’était le bruit de quelqu’un qui ne veux pas être entendu et c’était tout proche. Doucement, tout doucement, pour ne pas attirer l’attention de cette mystérieuse personne je tournais la tête vers la source du bruit, dans mon dos.

Je découvris un homme en train de farfouiller discrètement dans un sac. Pas le mien il n’avait pas bougé de sous ma tête. En regardant mieux je reconnue les couleurs vives du sac de Tom. Et la personne qui fouillait dedans n’était visiblement pas Tom. Même dans la pénombre j’arrivais à discerner ses cheveux sombre et bouclé. Tom avait les cheveux blonds et en pétard. Je me levais et tentais de le dominer de toute ma hauteur.

-          Qu’est-ce que tu fais, lui dis-je en essayant d’être le plus menaçant possible sans non plus réveiller tout le dortoir.

Il sursauta et se tourna vers moi. La peur brilla dans ses yeux avant d’être remplacé par une lueur de défis.

-          Ça a l’air de quoi d’après toi, hein ! Tu vas m’en empêcher ? Me provoqua-t-il.

Je fis un pas en avant et il sembla hésité, mais il ne bougea pas. Seulement, le bruit de notre discussion avait réveillé Tom qui en ouvrant les yeux constata d’abord que son sac avait disparu puis que j’étais debout à côté de son lit et enfin que je fixais avec colère le type bouclé qui avait toujours le sac à la main. Il se leva d’un bon et arracha ses affaires des mains du voleur. Il avait l’air beaucoup plus terrifiant que moi quand il était en colère. Le voleur partit en courant et Tom voulu le poursuivre mais je le retins. Il se tourna vers moi, furieux mais je ne me démontais pas.

-          Laisse tomber, ça serait inutile de toute façon, contente toi de vérifier que tu as toute tes affaires.

Sa colère descendit d’un cran, il hocha la tête et s’assit sur son lit pour faire l’inventaire de son sac. Il fut soulagé lorsqu’il constata qu’il ne lui manquait rien.

D’autres furent moins chanceux. Environ une heure plus tard lorsque tout le monde se réveilla, plusieurs cris de désespoir résonnèrent dans la salle, leurs capsules d’oxygène avait disparu, il ne leur en restait qu’une ou deux, ce qui était peut-être suffisant pour rentrer chez eux mais pas pour participer à la course.

L’épreuve n’avait pas encore commencé que certains étaient déjà éliminés. Je cherchais du regard le Bouclé de cette nuit mais je ne le trouvais nulle part.

Environ un quart d’heure après le réveil de tout le monde un des hommes en blanc d’hier vint nous voir et nous annonça que comme nous avions tous été sélectionné entre hier et cette nuit, la Course pourrait avoir lieu le lendemain matin. Pour que nous puissions nous préparer psychologiquement et nous laisser plus de temps pour nous reposer. Il était sur le point de partir lorsqu’il se retourna et ajouta d’une voix sûre.

-          Que tous ceux qui souhaitent abandonner maintenant soient près à partir d’ici une heure, un collègue viendra vous chercher pour vous escorter jusqu’à la sortie.

Puis il tourna les tourna les talons et disparut. Des groupes se formèrent par affinité, sensiblement les mêmes que la veille et tous discutèrent de cette dernière déclaration. Nous y compris. Tous les deux étions d’accord pour dire que c’était très étrange une tel déclaration après la découverte des larcins nocturne. On aurait presque dit que c’était voulue. Mais nous n’avions aucune preuve pour étayer nos soupçons.

Une heure plus tard il y eut une bonne trentaine d’abandons et pas uniquement des personnes n’ayant plus suffisamment d’oxygène mais également d’autres hommes qui au vu des résultats de leur test se sentaient trop faible finalement et ne voulait pas mourir seul au milieu d’une épreuve télévisé mais entouré de leur famille. C’est en tout cas ce qui ressortait de la majorité des discussions.

Un homme habillé de blanc vint les chercher. Même de loin et dans d’autres vêtements je le reconnue. Il était en train de partir suivis du groupe des abandons quand je fis signe à Tom de le regarder. Il se tourna et lui aussi reconnu cette chevelure sombre et bouclé. Celle de son voleur de cette nuit. Il fronça les sourcils. Mais il était trop tard pour intervenir et rejoindre le Bouclé pour lui demander des explications. Il se tourna vers moi.

-          Qu’est-ce que ça signifie à ton avis ?

-          Ça signifie que quelque chose d’important doit se cacher là-dessous. Mais quoi ? Pourquoi un membre du staff irait voler les capsules d’oxygènes qu’ils nous ont eux-mêmes remis ? Il y a quelque chose d’illogique…

-          Peut-être, ou alors il a préféré ça plutôt que de voler directement dans les réserves gouvernementales. Il s’est peut-être dit qu’ainsi ses patrons penseraient que le coupable est l’un des participants et non quelqu’un du staff, et lui il y gagnait un bon stock de capsules d’oxygène grand format pour lui tout seul.

-          Mais alors pourquoi le type en blanc de ce matin avait l’air de savoir qu’il y aurait des abandons ? Je veux dire, on a tous fait la démarche et franchis les étapes pour venir jusqu’ici, alors pourquoi certains auraient abandonné si près du but…

-          On cherche peut-être un complot là où il n’y en pas, si ça se trouve le type de ce matin est le complice du voleur, voilà pourquoi il savait qu’il y aurait des abandons…

-          Si tu le dis…

La conversation fut close. On se reposa toute la journée, pour éviter de gaspiller nos ressources. Plus on bougeait plus on avait faim, et comme il ne nous avait donné que deux barres de céréales pour la journée, alors que la veille nous n’avions rien eu à nous mettre sous la dent, nous les économisions. J’en avais glissé une dans mon sac, je préférais la garder pour la Course au cas où, et l’autre je la grignotais lentement de temps en temps pour la faire durer le plus longtemps possible, allongé sur mon lit les paupières à demi-clause.

Je me demandais pourquoi ils nous faisaient patienter toute une journée. Officiellement c’était parce qu’ils avaient fini le tri plus rapidement que prévu et que dans leur programme la course devait du coup débuter le lendemain. Officiellement. Mais officieusement ? N’y avait-il pas une autre raison qui les poussait à nous faire attendre ainsi ? Qu’espéraient-ils ? D’autres abandons en fin de journée ? Je l’ignorais. A force de me remuer les méninges je commençais à avoir faim, alors je décidais d’arrêter de me la jouer parano et d’attendre calmement que la course ne débute.

Finalement, après une journée interminable, la nuit arriva, mais pas le sommeil. Entre la peur et l’excitation dû au départ de l’épreuve le lendemain, ainsi que ma non-activité de la journée, j’étais incapable de fermer l’œil. Je regardais ma montre pour constater à chaque fois qu’environ une heure s’était écoulé et que l’aube approchait. Mais je ne dormais toujours pas. Ça m’inquiétait parce que je ne serais pas dans de bonnes conditions pour le départ d’ici quelques heures. Finalement je m’endormis entre trois et quatre heures du matin.

La cloche résonna à six heures trente précise, ne m’offrant que deux à trois heure de sommeil environ. Ce qui était peu. Lorsque la cloche retentie ce fut le branle-bas de combat dans le dortoir. Tout le monde sauta au bas de sa couchette comme électrifié par une onde de choc. Le temps de rassembler nos affaires et de s’habiller pour ceux qui c’étaient couché torse nu, et un homme en blanc entra dans notre dortoir.

-          Très bien, la Course va commencer. Je vais vous mener au point de départ.

Il nous entraîna tous dans un gigantesque dédale de couloirs. Surement le même qu’il y a quelques jours mais j’étais incapable de le reconnaître. Toutefois cela me paraissait plus long. De l’extérieur je n’avais pas remarqué que le bâtiment était aussi grand. Mais il y avait eu tellement de monde que je n’avais peut-être pas fait attention…

Soudain on s’arrêta, le temps que l’homme en blanc déverrouille une large porte. Une fois le code validé, la porte s’enfonça dans le mur en coulissant vers la gauche. Derrière la porte un escalier s’enfonçait dans les profondeurs souterraines. Notre groupe de plusieurs centaines d’hommes entama la descente, plus nous descendions plus je me demandais pourquoi nous allions ici, pourquoi devions-nous allez sous terre ? Nous n’étions pas morts, pas encore, nous n’avions donc pas à nous enterrer.

Finalement après quelques minutes l’escalier se transforma en un couloir, plus étroit et moins éclairé que ceux de la surface. Ce couloir s’étirait paresseusement sur plusieurs kilomètres, nous entrainant loin de la ville et du centre où nous étions entrées il y a deux jours. Je ne comprenais pas pourquoi nous devions faire ce chemin sous la terre, puis je réalisais que si nous le faisions à la surface nous aurions eu un contact avec l’extérieur, avec la population avant le début de la course et que cela pouvait entraîner différentes triches. C’était donc pour éviter cela que nous devions subir l’oppression de la terre au-dessus de nous, de la terre, de la ville, de ses bâtiments. Nous étions descendus suffisamment profondément pour éviter les fondations de la ville.

Et heureusement pour moi je ne souffrais pas de claustrophobie. Ce qui n’était pas le cas de tout le monde, et certains étouffaient pendant que nous avancions sans les attendre, ils chancelaient avant de se laisser glisser contre le mur et finir assis sur le sol pour tenter de se calmer. Et nous les laissions là. C’est ainsi qu’une bonne demi douzaines de nos rivaux quittèrent le groupe pour ne jamais y revenir.

Nous débouchâmes dans une autre salle immense, tout en longueur et s’étendant sur notre droite et notre gauche. A environ une centaine de mètres de nous, sur notre gauche se trouvait le groupe de femme. Un homme en blanc était en train de les faire monter dans des sortes de cages en verre. Une cage par personne. Elles étaient suffisamment grandes pour que l’on puisse se tenir debout mais pas assez large pour nous asseoir et elles formaient une longue ligne qui remplissait toute la salle.

Avant de les faire monter il leur demandait leur nom et prénom pour les rentrer dans une sorte de télécommande qu’il avait dans la main, après ça il scannait leur poignet gauche pour transférer les informations dans la puce et permettre la connexion entre la puce dans notre poignet et notre dossier numérique. Ensuite elles devaient entrer dans l’une des boîtes. Je le regardais faire puis ramenais mon attention sur mon propre groupe et remarquait que notre guide avait lui aussi commencé à le faire.

Mais à eux deux ils n’auraient pas fini de tous nous enregistrer avant ce soir, alors comment comptaient-ils nous faire courir dès ce matin ? Au moment où cette réflexion me traversait l’esprit, une armée d’homme en blanc débarqua par une autre porte brandissant tous une télécommande. Ils se divisèrent en deux groupes pour aller aider leurs deux collègues. Ainsi en à peine une heure nous étions tous enfermé dans nos boites en verre.

Je ne comprenais pas le principe. Je ne savais pas ce qui allait se passer et ne pas avoir la maîtrise des choses me terrifiais. Enfermé comme je l’étais je ne pourrais pas me défendre en cas de problèmes. Jusque-là, j’avais toujours pu me convaincre que j’avais une possible porte de sortie quelque part, une sorte de solution de repli mais là je ne voyais pas ce que je pouvais faire.

Les hommes en blanc nous regardèrent un moment puis l’un d’eux parla. Il devait avoir un micro parce que sa voix résonna dans la boite en verre, comme s’il me parlait de l’intérieur et non de l’extérieur, j’en conclus donc qu’une sorte de haut-parleur planqué je ne sais où me transmettait ses paroles.

-          Dans quelques minutes il sera huit heures, heure locale, début de la course. Lorsqu’il ne restera plus que trente secondes les boites dans lesquelles vous êtes monteront à la surface et se déverrouilleront à huit heure précise. L’émission a déjà commencé, laissant la possibilité à vos familles de vous choisir dans le menu déroulant, elles pourront donc vous suivre dès l’ouverture des boites. Bonne chance et bonne Course !

Sur ces dernières paroles d’encouragements ma boite se mis en mouvement. Tel un ascenseur elle monta d’abord doucement puis crescendo. J’arrivais à la surface en quelques secondes seulement, juste le temps d’enfiler mon respirateur avec l’une de mes capsules d’oxygène dans le réservoir. La boite se stabilisa à la surface comme celles de tous mes rivaux. J’imaginais que vu du ciel nous devions former une ligne lumineuse qui parcourait toute la plaine, avec le reflet dans nos cages de verre du peu de lumière naturel qui arrivait à passer à travers l’épais nuage de pollution.

Un bip sonore raisonna dans ce grands espace vide et les cages s’ouvrirent. J’allais me précipiter dehors lorsque je remarquais que quelque chose clochait. Oui les cages s’ouvrirent. Mais pas toute. Pas la mienne en tout cas.

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