26.

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Les deux garçons sont dans le jardin. Gabriel est allongé sur une chaise longue, un livre posé sur son torse. Son frère est en train de lui montrer plein de fierté qu’il peut changer ses ongles en griffes. Gabriel le regarde amusé puis le laisse à ses expériences. Leur parrain les observe discrètement depuis la cuisine. Le soleil l’éblouit et l’oblige à fermer l’œil droit. De son œil encore ouvert, couleur d’encre, il surveille les progrès de son filleul. Ils seront bientôt prêts et ensemble ils vengeront Ambre.

***

La voix monstrueuse de Marko résonnait encore dans chaque cellule du corps de Gabriel. L'homme qui se tenait devant lui n'avait plus rien d'humain. Un fou, une bête, un monstre. Le sang du garçon se figea et ses jambes flageollantes lui firent perdre l'équilibre. Son inconscient reconnaissait cette sensation, il l'avait déjà ressentit autrefois, il n'y a pas si longtemps. Cette haine, cette incompréhension, cette envie de meurtre. Des flashs douloureux lui martelaient le cerveau. Des images, des sons, mais aucune cohérence. Il voyait du carrelage, une cage, la lune. Etait-ce ses souvenirs ou ceux de son frère ? Puis, il se vit allongé sur une table d'autopsie : ces visions venaient de Nikita, il en était certain désormais. Loin de se réjouir du rétablissement de leur lien télépathique, il en fut anéantit. Il aurait voulu ne jamais avoir vu ça, ne jamais avoir ressentit ça, mais la vérité prenait forme. Ainsi tétanisé, il assista muet à la scène surréaliste qui suivit.

L'homme aux yeux rouges fut soudain renversé et atterit violement à terre, un os sortit de son épaule dans une explosion de chair. Il lui était impossible de se relever car il se débattait avec une chose invisible qui le maintenait au sol. Parfois, un éclair de poils verts apparaissait pour disparaitre aussitot. Le sang giclait à grands flots : la carotide, le fémur, l'aine. Peu à peu, une forme se matérialisa de rouge à force d'être aspergée du liquide poisseux, puis le loup devint complètement visible. Il était d'un vert sale autrefois pomme, couvert de l'hémoglobine de la victime qu'il était en train de déchiquetter. Puis, il tourna la tête vers la cellule de laquelle il était sorti et fit un bond en arrière, laissant de Marko qu'un tas de muscles et de peau sanguinolents de forme vaguement humaine.

Luciole sortit alors de la cellule, regardant l'homme baigner dans une marre sombre que des flots rouges ne cessaient d'agrandir, jaillissant par d'inombrables blessures. Elle ricana et se pencha vers ce qu'il restait du visage de Marko. Elle lui murmura quelque chose à l'oreille, déposa un baiser sur sa joue souillée de vermeil et plaça ses paumes de part et d'autre de sa tête inerte. Le corps de la jeune femme commença à luire, d'abord ses mains, puis ses bras et enfin l'ensemble de son être ne fut plus que lumière et chaleur. Le sol de la pièce commença à fondre tout comme les éléments métalliques alentours. L'air devint suffoquant et Gabriel eut les yeux imbibés de larmes. Dans une grosse explosion, la lumière s'éteignit, laissant comme seule preuve de ce qu'il venait de se passer, un profond cratère de matériaux fondus, dont s'en échappait de la fumée et une odeur désagréable de chair brûlée.

Soulagée, Lou s'écroula sur le sol, épuisée. Vainquant sa tétanie, Gabriel s'approcha du trou, hésitant. Un corps en partie calciné y gisait dans le fond, une de ces mains serrant le cou de Luciole. La jeune femme était inconsciente. Resserrant sa prise, l'homme lui brisa la nuque. Puis, les cellules carbonisées de l'homme furent remplacées sous les yeux ébahis de son filleul, par des cellules intactes. La survie et la vitesse de guérison de Marko ne signifiait qu'une chose. Confirmant ses craintes, l'homme qui haïssait les loups se métamorphosa en un fauve gigantesque de couleur gris-bleu.

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