Douces heures

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Samedi, 8h du matin, sortant de chez lui, André un bouquet de lys blanches dans une main, son café, froid, dans l'autre, se dépêchait avec la lenteur de son âge avancé pour retrouver son épouse. Pas qu'elle pouvait s'impatienter, mais les grilles du cimetière ferment à midi le samedi, et impossible pour lui de rater leur rendez-vous quotidien.

Une heure plus tard, et enfin arrivé au coin de sa rue. Il reprit son souffle, but une gorgée de café réchauffé par le soleil de juillet. Il était prêt pour s'attaquer à la deuxième avenue, heureusement sa femme n'était plus qu'à deux rues de là.

10h30, les portes du cimetière grandes ouvertes lui faisaient face, prêtent à l'accueillir un jour de plus. Il jeta son gobelet de café dans la poubelle à l'entrée et se lança dans l'allée principale, Marguerite n'était plus très loin. Seul dans ce dortoir immense, ses pas lents sur le gravier resonnaient parmi tous ces lits de marbre. Les noms défilaient autour de lui, telle une haie d'honneur, dont il connaissait maintenant chacun des soldats endormis, l'accompagnant jusqu'à sa bien-aimée.

Il s'approcha et lui donna le bouquet, il l'imagina, le sourire aux lèvres à la vue de ses fleurs préférées.

Son banc de pierre l'attendait, là, face à elle...

Il se réveilla, les aiguilles de sa montre lui indiquaient 11h30. Le soleil tapait fort sur son crâne dégarni, il sortit de la poche intérieure de son veston grisé par le temps, sa vieille casquette à carreaux blancs et gris et la posa sur sa tête.

Dans toute cette lumière éblouissante, une ombre vint le rejoindre:

  • Bonjour Monsieur André, comment va Madame aujourd'hui?

La question n'avait rien de cynique, bien au contraire, après bientôt dix ans, un lien très fort s'était tissé entre le vieil homme et le fossoyeur.

  • Bonjour Henri, mieux qu'hier et moins bien que demain, je l'espère.

Ce court échange était désormais leur petit rituel, le jeune homme vint s'asseoir à ses côtés. Il sortit de son sac deux petites bouteilles d'eau et deux sandwiches emballés dans une feuille d'aluminium.

  • Jambon-beurre aujourd'hui, Monsieur André, bon appétit

Ils mangèrent en silence. Le vieil homme fixant la photo de sa femme sur la stèle, de multiples souvenirs en tête. Le fossoyeur l'observait rajeunir à mesure que sa mémoire remontait dans le temps.

12h30, Henri se leva.

  • Allez Monsieur André, il est l'heure... venez, je vous dépose chez vous.

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