Retour

2 minutes de lecture

La neige recouvre le plateau d’Aubrac. Les congères grossissent, s’étalent. Le vent redouble. Une jeune femme au visage frigorifié, supplanté d’un bonnet de laine, cherche un abri pour la nuit, avant la tourmente. Elle lutte entre les rafales pour poursuivre sa progression, dans le crissement de la poudreuse. La neige à mi-cuisses freine son avancée mais elle poursuit, imperturbable, sa route, vers une ferme isolée en ligne de mire. Un carreau allumé au rez de chaussée indique une présence humaine. Elle frappe sur le verre avec son gant humide. Peu de temps après, une femme d’âge mûr, entrebâille la porte. En remarquant la silhouette frêle de l’intruse, elle ose :

  • Vous êtes folle d’être sortie par un temps pareil ? Que faites-vous ici ? Rentrez vite.

La chaleur du foyer fait fondre la glace sur le bonnet bleu et l’anorak rembourré. Des enfants jouent à l’étage.

  • J’ai eu peur quand vous avez frappé, je suis seule ici, en vacances, avec mes petits en bas âge. Mon mari est en voyage d’affaire.

Ada lui raconte son périple et la femme est impressionnée par son courage. Elle l’invite pour le souper sans hésitation, et lui propose une bonne douche chaude avant cela.

D’échanges en confidences, la soirée autour du vin chaud délie les langues.

  • Vous pensez ?
  • Vous avez du talent. Qu’est-ce qui vous retient à lui, après tout, si ce n’est la peur de l’inconnu ?
  • Mes enfants…
  • Et vous croyez qu’ils seront plus heureux de grandir auprès d’une mère malheureuse ? N’est-ce pas plutôt une excuse ?
  • Je n’avais pas vu les choses sous cet angle.

Une étincelle pétille dans ses yeux. L’infinité des possibles.

En rejoignant le village d’Aumont-Aubrac, Ada sent son cœur se serrer. Elle ne sait comment Lucas va l’accueillir. Elle remonte doucement la rue, le sentier, bercée par une nostalgie heureuse. Les souvenirs remontent sur ce trajet mille fois arpenté. Le gîte apparaît enfin, sous un voile de neige fondue. La cheminée fume. Des pattes de chat sur le muret. Elle frappe. Personne. C’est vrai qu’elle est un peu en avance, en ce milieu d’après-midi du seize décembre. Elle pose son sac à l’abri, contre le mur de pierre. Elle retourne au village, au café de la place, en attendant.

Ses fesses rebondissent sur la banquette en skaï. Le patron la reconnaît, la salue chaleureusement et lui offre sa boisson. Elle apprend que Lucas était au bois ce matin et qu’il est parti chercher quelqu’un à la gare de Rodez. Il n’en sait pas plus. C’est déjà beaucoup. Ada se demande qui peut être cet invité mystère, puis efface ses doutes de son esprit et reprend l’écriture de son journal de bord, sorti de sa poche.

Au bout d’une heure, elle retourne au gîte, et aperçoit le C15 garé non loin. Son ventre se noue. Elle s’apprête à toquer à la porte quand celle-ci s’ouvre sur le jeune homme, cheveux bouclés, mal rasé. Elle plonge immédiatement dans ses yeux verts, ses yeux si doux. L’émotion déferle. Elle pleure à chaudes larmes dans ses bras qui l’enserrent, la protègent, l’apaisent. Calmée, elle lève la tête et regarde par dessus son épaule, l’intérieur de la grande salle. Une femme aux cheveux gris est assise, le chat sur ses genoux.

Serait-ce ? Oui. C’est bien sa mère. Elle a traversé le globe pour revoir sa fille. Partager enfin, avec elle, les fêtes de Noël.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire bylud ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0