Renaissance

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Le mois de mai défile dans cet écrin de quiétude, rythmé par un calendrier journalier à la fois dense mais prévisible. Désormais familier.

Ada profite de ses bulles de liberté quotidiennes avec délectation, son attention accaparée par la découverte approfondie de cette nature sauvage qu’elle apprivoise un peu plus à chacune de ses promenades.

Les boucles de ses ballades s’allongent progressivement.

Tous les matins, elle se tient sur la colline prête au départ. Sous son regard : champs, vallées, forêts et pas un humain alentour. Le plus souvent, elle marche vers l’Ouest, le soleil levant réchauffant son dos.

Pas à pas, son chemin se trace, sans véritable but au départ, son vagabondage se transforme peu à peu en quête. Imbibée de nature, elle se fond dans le décor du vivant. Isolée des autres, son être se développe, enfin. Il occupe toute sa place.

Comme les oiseaux migrateurs, elle suit son instinct, son rythme. Ses pas résonnent sur la terre, les cailloux sur le sentier roulent sous ses pieds. Des noirs, des blancs puis des rouges. Les kilomètres défilent. Parfois, elle a soif. Elle cherche alors le murmure d’un ruisseau qui caresse son oreille. Elle plonge les mains dans l’eau glacée et s’en abreuve. Tout semble couler de source. Elle ne pense à rien, absorbée dans l’instant, dans le silence bienveillant de cette nature harmonieuse. Un tiret entre ciel et Terre. Nul besoin, nulle envie. Un simple marcheur en pleine nature. Un bipède dans son environnement primaire. Mais parfois, la monotonie du paysage la surprend à penser. Son être réclame un but, un sens. Personne n’est là pour répondre à ses doutes, calmer ses craintes, ses angoisses. Cette fuite du monde ne lui permet que de réfléchir plus profondément à sa propre situation. L’élan de vie la propulse à nouveau, mais nécessite un carburant pour l’entretenir. Elle sent qu’elle doit trouver sa voie pour continuer sa route sur le chemin de la vie.

Chaque fois, ses pas la ramènent finalement au port, au gîte, où elle se repose, étudie, travaille, se lie. Elle s’y ressource, renaît.

Un matin, alors qu’elle s’apprête à partir en promenade, la voiture jaune du postier l’arrête et à sa grande surprise un colis lui est adressé. Le carton est assez volumineux et elle peine à le transporter jusqu’à sa chambre. Ne pouvant se retenir, elle l’ouvre sur le champ : ses affaires du pensionnat lui sont renvoyées avec un mot succinct de la directrice de l’établissement. Là, sous ses yeux défilent les reliques du passé : des vêtements tous plus provocants les uns que les autres, les flacons de couleur bleue pour raviver sa mèche, des livres déprimants et noirs, quelques affaires de toilettes, et son album photos. Elle examine ses propres clichés, des détails glauques pris dans un environnement urbain : des bris de verre, des préservatifs usagers, une tache de sang, des cannettes concassées. Aucun humain sur les photos, aucune trace d’un lien quelconque. Le néant, le chaos d’un univers sans vie.

Le choc frontal avec l’ancienne Ada lui fait repousser en bloc le contenu du carton. Elle s’empresse d’aller tout jeter à la benne à ordures, marquant ainsi sa détermination à se reconstruire sur d’autres bases.

Les nuits suivantes, des cauchemars viennent entacher son sommeil, signe que son inconscient, à l’œuvre, tente lui aussi d’évacuer ce passé devenu trop lourd désormais.

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