Secousse

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  • Oh non ! Ce n’est pas vrai !
  • Si, je l’ai retrouvée tout à l’heure, inanimée dans l’appentis.

Un coup de massue s’abat sur la jeune fille, qui rentrait de sa virée du soir. Elle regarde en l’air, puis s’effondre littéralement sous le choc de la nouvelle. Le jeune homme s’avance et la soulève tendrement pour la remettre sur pieds.

  • Ada, reprends-toi, elle est à l’hôpital. Elle a seulement perdu connaissance. Ils s’occupent bien d’elle. Les pompiers me l’ont assuré.
  • Je veux la voir.

Lucas soupire. Il sait qu’elle ne lâchera pas avant de vérifier, par elle-même, l’état de santé de la vieille propriétaire.

  • D’accord, on y va. Mais prévenons d’abord les pèlerins que ce soir c’est buffet gratuit en auto-gestion.

Il rentre dans le gîte pour prévenir les randonneurs, avant de ressortir en trombe, rejoindre l’automobile dans laquelle Ada est déjà installée.

Le gros chat, Oscar, les observe du muret, décidément dérangé dans ses habitudes par l’agitation de cette fin d’après-midi.

Un silence de plomb règne dans l’habitacle du véhicule. Tout en roulant vers la bretelle d’autoroute, il enchaîne :

  • Écoute, calme-toi. Elle va bien.

Ada se ronge les ongles. Elle regarde le vide poche.

Il lui touche l’épaule, elle sursaute. Puis lorsque son regard croise le sien, elle plonge dans l’océan de gentillesse émané par le jeune homme. Il esquisse un sourire.

Sans rien dire, cet échange la réconforte. Parfois les mots ne servent à rien qu’à produire des sons, un geste, lui, peut déplacer les montagnes.

Le trajet se poursuit sans un bruit, mais la complicité s’est installée, rendant le silence moins gênant.

Garés devant l’hôpital, Ada court vers la réception :

  • Je viens voir Thérèse, une vieille dame qui a eu un accident vasculaire aujourd’hui.
  • Bonjour mademoiselle. Thérèse comment ?

Ada reste pantoise.

  • Vous êtes de la famille ?
  • Non, une amie.
  • Les visites ne sont plus permises à cette heure.

Ada se retourne vers Lucas, qui débarque à temps pour lui venir en aide.

  • Thérèse Ravajols, complète-t-il alors.
  • C’est son neveu, intervient Ada.
  • Euh, non, je dis « tante Thérèse » par habitude mais nous ne sommes pas de la même famille.

Ada fronce les sourcils, voyant déjà l’occasion rêvée pour la secrétaire de leur refuser l'entrée.

  • Navrée jeunes gens, mais seule la famille est autorisée, et en plus les horaires sont passés, revenez demain après-midi ou téléphonez, ce sera plus pratique.

Ils ressortent dans l’entrée, devant les portes automatiques.

  • On n’est quand même pas venus ici pour rien. On peut rentrer par une porte de service et rejoindre les urgences ou le service cardio-vasculaire.
  • Ada, t’es vraiment têtue comme fille toi.
  • On n’a rien sans rien, conclut-elle avant de se diriger vers l’arrière de l’établissement.

Ils se faufilent furtivement par une porte, suivant des soignants revenus de leur pause cigarette. Dans le dédale des couloirs, ils s’orientent avec difficulté mais parviennent finalement à rejoindre le bon étage. L’odeur de détergeant est prégnante et désagréable. Ils sont mal à l’aise dans cette fourmilière désinfectée.

Le bureau des entrées est désert et Ada en profite pour repérer le numéro de chambre de Thérèse sur les listings du jour : 469.

Elle court jusqu’au bon numéro, retient son souffle, puis place sa main sur la poignée en plastique. La porte s’ouvre au même moment et un médecin en sort. D’un ton autoritaire :

  • Pardon mademoiselle, mais les visites sont strictement interdites. La patiente est fatiguée, elle ne doit être dérangée, ni soumise à des émotions fortes, sous aucun prétexte. C’est pour son bien.

Ada ferme les yeux de consentement. Elle regarde fixement les écailles jaunies sur la porte. Elle sent la main de Lucas sur son omoplate. Elle se retourne et finit par fondre en larmes dans ses bras.

Ce lien tissé avec Thérèse, ce lien d’amour fait souffrir. Terriblement. Elle l’avait presque oublié.

Ils retournent au gîte, sonnés par ces émotions.

La nuit est tombée à leur arrivée. Lucas propose à Ada de l’aider pour le lendemain, celle-ci accepte, ne sachant pas trop comment s’organiser. Il s’installe donc pour la nuit dans le dortoir, sans un bruit, au milieu des marcheurs ronflants déjà de leur journée harassante.

Ada s’enfouit sous l’édredon, assommée par les évènements du jour.

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