Chapitre 31

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Castres, Tarn

Il était plus de dix-huit heures quand Claire Parayre annonça à Ange Segafredi qu’elle en avait assez vu et qu’elle souhaitait rentrer.

— Saada et Massart me semblent tout à fait capables de finir le boulot ici. On va faire le point sur le chemin du retour.

— À vos ordres, Madame, répondit le commissaire, sur un ton légèrement sarcastique.

Du coin de l’œil, il perçut le regard réprobateur de Sam, dans le dos de la magistrate.

— Passe par Sorèze pour parler au jardinier, ajouta-t-il à l'attention de sa collègue.

Dans la voiture, la synthèse de l’enquête fût rapidement bouclée. L’essentiel tournait autour de Charles Van Den Brouck.

— Mets-le paquet pour découvrir qui se cache derrière l’association propriétaire du château. Va à Jersey s’il le faut.

Claire avait annoncé à Ange qu’en « privé », elle allait dorénavant le tutoyer puisqu’ils avaient une relation en commun.

— Je doute que l’Intérieur m’accorde un budget pour ça, répondit le policier.

— On doit bien pouvoir retrouver quand cette association a été enregistrée et par qui. C’est nécessairement sur un serveur quelque part.

— Holà, Madame la Procureure, vous me demandez d’enfreindre la loi ?

— Non, ce n’est pas ce que je veux dire, mais vous avez des petits génies de l’informatique dans la police.

— Je ne suis pas certain que cette affaire représente une menace assez sérieuse pour la société pour que l’on obtienne ces moyens.

— Démerde-toi, conclut Claire boudeuse.

— OK, ok, je vais voir ce qu’on a chez nous ou chez les financiers.

— Je préfère ça.

Ils firent encore quelques kilomètres en silence.

— Tu peux aller directement chez moi, je me débrouillerai pour aller au Palais demain matin. Je n’ai pas eu le temps de faire la cuisine, on va s’improviser une soirée Tapas.

— Tu sais que j’ai une heure de route pour rentrer à Toulouse.

— Je te ferai un mot pour tes parents. Je te rappelle que tu es sous serment !

— Et si les gendarmes me font souffler dans le ballon ?

— J’ai un éthylomètre pour te tester et si nécessaire, il y a une chambre d’amis et une brosse à dents neuve pour les « invités » !

— Je vois que tu as réponse à tout.

Sitôt arrivée, Claire désigna le salon et suggéra à Ange de se servir un verre.

— Je vais me changer, je n’en ai pas pour longtemps. Prépare-moi un Mojito. Tu trouveras ce qu’il faut dans le bar et le frigo.

Ange prit le temps d’examiner un peu plus en détail les éléments de décor. Lors de sa première visite, il avait surtout remarqué le côté africain. Cette fois, il découvrit de nombreuses photos. La plupart montraient un homme, le plus souvent en uniforme, apparat ou tenue de combat. Remises de médailles, photos devant des blindés ou des hélicoptères ; sur les plus récentes, il distingua les cinq galons or et argent. Lieutenant-Colonel, pas mal se dit-il.

— Commissaire et Lieutenant-Colonel, ça correspond, non ? dit Claire derrière lui.

— Si on veut, dans les deux cas ça vient après Commandant.

— Tu connais l’Afrique ?

— Non, je n’y suis jamais allé, à part le Maroc.

— C’est sa maîtresse, il ne peut pas s’en passer ! se lamenta Claire. Il pourrait demander un poste d’Etat-Major, mais il préfère l’action et le terrain.

— Je peux le comprendre, j’ai eu la même réaction quand j’ai du choisir mon affectation.

— Tu es marié ? Tu n’as pas d’alliance.

— Non, je ne suis pas marié, mais ça ne veut pas dire que je suis célibataire !

— De toute façon, ça n’a pas d’importance. Je ne cherche pas un autre mari.

Ange lui tendit un grand verre rempli d’une boisson où flottait quelques feuilles de menthe.

— Il faudra me pardonner s’il n’est pas à ton goût. Je ne suis pas un spécialiste des cocktails. Je préfère les boissons distillées et je vois que tu as quelques beaux whiskies. Je me suis permis de m’en servir un.

— Tu as bien fait, c’est Jeff, mon mari qui est amateur. Moi je n’en bois pas. Je préfère les boissons latines. Mojito, Margaritas…

— Sangria ?

— Pouah, non, ça c’est pour les touristes.

— Tu es d’origine espagnole ?

— Ça se voit tant que ça ?

— Ma foi, oui ! tu peux difficilement renier tes ancêtres.

— Mes grands-parents paternels ont fui Franco pendant la guerre civile. Ils se sont installés près de Perpignan, pour ne pas être trop dépaysés. Ils étaient Catalans, de Barcelone. Mon père a épousé la fille d’immigrés andalous qui vivaient dans le même village et voila ce que ça a donné. Un pur produit de la République Française. La Justice et l’Armée réunies.

— Attention, tu sais ce que l’on dit ? La Justice militaire est à la Justice, ce que la musique militaire est à la musique !

— Je ne mélange pas les genres. Bon, allez, assez parlé. Cette fois tu n’échapperas pas au bain, même si ta pudeur doit en souffrir.

Claire avait troqué ses jeans et débardeur pour une robe d’intérieur à grands décors colorés, serrée sur le devant par une large ceinture. Elle était pieds nus. Elle se dirigea vers le jardin, son verre à la main.

— Tu ne vas rester comme ça, mets-toi à l’aise et viens me rejoindre.

Ange entreprit de se déshabiller, ne gardant que son boxer noir. Comme il se retournait vers la baie vitrée, il n’eut que le temps d’apercevoir son hôte plongeant nue dans la piscine.

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