Chapitre 17

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Mytilène, Ile de Lesbos – Grèce.

Julie était en train de travailler, triant ses notes avant de commencer la rédaction de son dossier. Elle avait choisi un hôtel modeste dans les faubourgs de Mytilène, la principale ville de l’ile de Lesbos. Elle avait déjà passé trois jours à visiter les principaux camps accueillant des femmes migrantes. La plupart venaient de Syrie ou d’Irak, quelques une d’Afghanistan. La journaliste s’intéressait à celles qui avaient laissé derrière elles mari et enfants, le plus souvent du fait des combats violents qui avaient touché leurs villages d’origine. Comme à son habitude, Julie avait soigneusement préparé son travail, tissant à l’avance un réseau de correspondants avec les humanitaires présents sur place, qui avaient facilité ses contacts et servi d’interprètes.

Grace à cette anticipation, elle avait déjà pu réunir les témoignages d’une dizaine de femmes, les plus jeunes avaient à peine dix-huit ans, les plus âgées la quarantaine. Toutes racontaient les mêmes histoires, viols à répétition, travail forcé, absence de soins et d’hygiène, manque de nourriture. Toutes présentaient à leur arrivée sur l’ile un tableau sanitaire catastrophique que les dispensaires s’efforçaient de soigner avec compassion.

Loin de sombrer dans le misérabilisme latent, Julie voulait donner une image positive de ces parcours faits de volonté, de force et parfois de haine profonde. L’une de ces femmes lui avait révélé avoir poignardé l’homme qui se considérait comme son mari et la violait tous les soirs, avant de s’enfuir seule, sans eau ni nourriture. Une autre avait perdu ses deux enfants sur la route de l’exil, mais avait choisi de continuer à avancer pour vivre.

Elle repensa au reportage qui lui avait permis de faire la connaissance d’Ange Segafredi quelques années plus tôt (*). Ces femmes savaient-elles quel sort les attendait en Europe ? Oui, sans doute, mais l’une d’elle lui avait confié que rien ne pouvait être pire que sa vie dans un village conquis par Daesh.


L’icone de Skype se mit à clignoter dans le bas de son écran. Le visage du policier apparut sur l’écran.

— Salut ma belle, je te dérange ?

— Pas du tout, ça va me faire du bien de parler de choses agréables, au milieu de toute cette misère. Tu as l’air d’être mieux logé que moi. Tu es où ?

Ange fit un tour sur lui-même pour montrer l’ensemble de la chambre.

— Au château ! chez les Loubennes, les parents de Philippe.

— Ta chambre doit être trois fois plus grande que la mienne, mais je ne me plains pas, le lit est propre et confortable. C’est bien assez pour le temps que j’y passe.

— Je ne te manque pas trop ?

— Non, pas de problèmes, j’ai déjà trois amants ! ou plutôt trois amantes, je suis à Lesbos, je te le rappelle. Et toi ?

— Je ne suis pas jaloux, et puis je sais que ce n’est pas vrai.

— Ah bon, comment en es-tu si sûr, monsieur le Commissaire ?

— Oui, tu as raison, je devrais me méfier. Tiens, à ce propos, Philippe m’a parlé de ta soirée avec Brigitte.

— Le traitre, il avait promis de ne rien dire ! Il ne perd rien pour attendre. J’avoue, monsieur l’agent, mais nous n’avons rien fait de mal.

— Voila que tu me rétrogrades. Pour ta peine, tu dois tout me raconter.

— Tu as du temps devant toi mon bel amant ? Installe toi confortablement.

Julie s’éloigna de l’écran, afin que tout son buste soit dans le champ de la caméra.

— Regarde bien, c’est à peu près comme ça que ça a commencé. Brigitte et moi avions bu quelques coupes d'un excellent champagne tout en parlant de nos projets. Tu connais Brigitte, quand elle a bu, elle devient très amoureuse, alors elle m’a demandé d’ouvrir un peu mon corsage, comme ça.

La jeune femme ouvrit lentement sa chemise de jean, bouton après bouton, dévoilant un soutien-gorge de dentelle noire.

— J’imagine très bien la scène, répondit Ange, et ensuite ?

— Ensuite elle est passée derrière moi. Elle a fait glisser les bretelles sur mes épaules et fait descendre ses mains lentement sur ma poitrine. Elle a glissé les doigts sous la dentelle. Tu vois ?

— Oui, je vois bien. Et Brigitte, elle était habillée comment ?

— Elle ne portait qu’une robe d’été, très légère. Je sentais ses seins dans mon cou, c’était très bon. Puis elle est revenue face à moi, en ôtant sa robe. Alors j’ai enfoui mon visage dans sa poitrine et je l’ai attirée à moi. Nous étions allongées sur le tapis du salon quand Philippe est entré. Je lui ai montré le fauteuil. Il s’est assis et a commencé à se caresser pendant que Brigitte me donnait du plaisir. Puis j’ai fait jouir sa femme avec ma langue et il a éjaculé dans ses doigts, comme un étudiant devant un porno. Brigitte et moi avons bien ri en le voyant ainsi. Nous avons fini la bouteille de champagne et je suis rentrée. J’espère que Brigitte l’a consolé.

— Je n’en doute pas un instant.

— J’ai bien raconté ?

— Oui, c’était crédible, je vérifierai avec la version de Philippe.

— Et de ton côté ?

— Rien, ou plutôt si, une religieuse !

— Tu as baisé avec une nonne ?

— Oh non, pas moi, mais justement, je cherche à savoir qui l’a violée.

— Hum, c’est plus excitant que les cadavres au bord des étangs (*). Il n’y a pas d’autres femmes dans ton affaire ?

— La Mère Supérieure, mais elle doit avoir au moins quatre-vingts ans, la comtesse de Loubennes…

— La mère de Philippe ?

— Oui, une très séduisante vieille dame, mais c’est la mère de mon ami, et il y a aussi la procureure adjointe, je ne l’ai pas encore rencontrée, mais elle a une voix très agréable. Elle m’a donné un rencart pour demain.

(*) Lire « Affaire sous surveillance »

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