#6 Derrière la vitre- Lola

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— NAN !

— Si ! Lola, tu viens avec moi ! m'ordonne ma mère.

— Merde mais il m'intéresse pas ton taf ! J'ai pas envie j'te dis !

Elle comprend rien aujourd'hui ou quoi ? J'ai un rencard, à dix heures, avec la meuf de mes rêves. Elle le sait très bien en plus ! Et elle veut m'emmener dans son espèce de bâtiment chelou qui pue la mort à des kilomètres, juste pour un compte-rendu à la con ? Je rêve là...

— Écoute ma chérie, me dit doucement maman. Je sais que c'est pénible, que t'es en vacances, et que t'as envie d'être belle pour Sarah tout à l'heure... mais là il est sept heure !

Je soupire... me réveiller si tôt pour une chasse au psychopathe. Comme si le criminel était juste au-dessus de leur tête, tiens !

— Et puis, enchérit-elle avec un petit sourire, on ne va pas s'attarder. Tu peux prendre des vêtements de rechange et je te laisse te maquiller un peu pour être belle. Je te dépose au ciné après, ok ?

De toute façon, j'ai pas le choix...

— Bon ok... J'ai déjà tout ça, grommelé-je en passant devant elle pour gagner la voiture.

Elle rit (je ne vois pas ce qu'il peut y avoir de drôle), et s'assoit juste après moi dans la coccinelle.
Le trajet met à peine un quart d'heure. On n'est pas si loin que ça du quartier industriel, mais comme il n'y a là-bas que des cassos, des mafieux et, aux dernières nouvelles, des kidnappeurs, je n'ai pas spécialement envie de mettre un pied dans cette fourmilière d'emmerdes.

Mais bon, quand il n'y a pas le choix...

-Bon, tu restes dans la voiture, ok ? Si il y a un problème, la police est juste derrière ce bâtiment. Je me suis garée de ce côté pour avoir une bonne place.

J'ai envie de lui dire que je m'en fiche, mais pas sûr que ça lui plaise, alors autant la fermer et hocher gentiment la tête.

Elle s'éloigne vite et je m'enfonce dans mon siège. Si je pouvais éviter de me faire remarquer par le pédophile ou le psychopathe du coin, ce serait déjà ça de gagné...

Laisser une gamine de quatorze ans seule dans une vieille voiture rouge flambant neuve, et en plus dans un endroit particulièrement désert. Bravo maman, mais je crois que t'as déjà pris des décisions plus responsables dans ta vie...

Un peu curieuse quand même, je repère un peu les lieux. On est entre deux bâtiments, justement ceux qui n'arrêtent pas de passer à la télé : " une jeune fille aurait donc disparu à proximité du douzième bâtiment... des traces de sang ont été retrouvées à l'intérieur, mais..."... Ils parlaient aussi du numéro Treize, comme quoi deux ados auraient entendu "un coup de feu" à l'intérieur.

Enfin bref, un concentré de bonheur rempli d'amour et d'arc-en-ciel fleuris...

C'est moche, en plus. Enfin, il n'y a pas non plus de sang séché sur les murs ou de traces de balles, comme je l'imaginais, mais ces grands trucs gris silencieux remplis de tags, ça me file des frissons...

La bagnole est garée juste devant la façade arrière, et on peut même voir la petite fenêtre tout en haut du bâtiment Douze.

Le grand luxe, quoi.

Enfin... C'était quoi ça ?

Ou plutôt, c'est quoi ça ?

Juste derrière la vitre remplie de poussière, il n'est pas difficile de distinguer ce corps évanescent et ce sinistre visage effroyablement pâle.

Il y a une espèce de fantôme qui me regarde, les yeux remplis d'un désespoir sans fond.
Et le pire, c'est que ce fantôme, je le reconnais.

L'amie de ma sœur, la fille qui a disparu...

Cléa.

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