Chapitre 4.

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-Anastasie, relève toi ! S'écrie Javotte d'un ton paniqué.

Je sais que ma sœur ne veut que mon bien, mais si elle savait comme ca faisait mal. Se relever encore et encore après les chutes, quand d'autres n'ont qu'à marcher droit. Mais je n'ai pas le choix... Le rêve de ma vie se réalisera peut être ce soir, je doit être prête.

J'accepte son aide. Javotte me lave le visage en vitesse et retouche mon maquillage. Elle brosse mes cheveux devant la coiffeuse. Je la regarde faire, en silence. C'est bon, il n'y a plus aucune trace de ma crise. Tout est effacé, personne ne le saura jamais.

-Javotte, Anastasie !!! Retenti la voix énervé de Mère.

Il faut y aller, vite. Tout le monde sait que le prince ne fera pas attention aux jeunes filles en retard. Il sera déjà en train de danser.

Javotte me jette un regard plein de compassion et nous y allons.

***

Personne ne parle. Seule les secousses du carrosse comblent le silence qui règne. Mère se tient droite et regarde fixement devant elle. Javotte, quand à elle, rêve par la fenêtre. Ce soir, je devrais accomplir mon rôle. Seulement ainsi je serait reconnu à ma juste valeur. Etrangement, je ne ressens pas d'excitation, ni d'appréhension. Juste de la détermination.

Le valet nous ouvre la porte. Mère descend la première en tenant ses jupons, Javotte à sa suite. Nous avons surement l'air ridicule avec nos deux robes assorties, comme des jumelles qui aurait laissées leur mère les habiller.

-Waw ! s'écrie ma sœur.

C'est vrai que c'est magnifique. Le gigantesque château est éclairé par des millions de petites bougies dans la faible lueur du soir. Un tapis rouge nous mène à l'entrée. Là-bas, un domestique nous débarrasse de nos affaires.

-Merci bien, remercie ma mère avec un sourire aimable

Nous marchons jusqu'à la salle de réception. Soudain, Dame Cécilia nous arrête et nous regarde droit dans les yeux.

-C'est le moment, dit Mère d'un air grave.

Javotte et moi le savons toute les deux, une de nous doit gagner. On ne se tiendra pas rigueur si l'autre séduit le pince. Mais si une des jeunes filles présentes parvient à le faire avant nous, Mère de nous pardonneras jamais.

J'hésite. Je me sens si petite devant cette salles remplis de jeunes gens tourbillonnants. Tout est si beau devant moi, les grandes colonnes soutenant le plafond tapissé de doré, les demoiselles accrochées au bras de leur cavaliers. Les violons jouent si vite... Je prends mon courage à deux mains et avance, la tête haute.

Personne ne me regarde. Que fait donc mon prince ?

Evidemment Anastasie...

Je cherche Javotte du regard. Où est t-elle ? Non, elle ne peut pas m'avoir laissée là ! Je suis seule, perdu dans cet immense univers doré. Les couples tournent, tournent de plus en plus vite au rythme de la mélodie entêtante. J'ai l'air idiote, seule au milieux de la piste de danse. Il faut que je trouve quelque choses à faire... Soudain, j'aperçois le buffet. Quand on ne sait pas quoi faire, il reste toujours une solution : manger.

Je m'approche de la grande table foisonnant de plats tous plus appétissants les un que les autres. J'entreprends de gouter au plus de choses possibles.

-Puis-je vous aider ? Me surprends une voix charmeuse.

Je fais volte face et me retrouve devant un homme séduisant aux mèches brunes, habillé de blanc et doré. J'avale en vitesse les trois gougères qu'il me reste dans la bouche.

-Oh, Je bafouille, le visage teinté de rouge en reconnaissant mon prince. Son Altesse, quel honneur...

Le jeune homme souri légèrement en me regardant. Nos yeux se croisent et mon cœur rate un battement. Je réponds à son sourire, mais j'ai bien peur qu'il ne ressemble plus à une grimace.

Le regard d'Henri passe derrière mon épaule. Et puis je l'aperçois. Une jeune femme blonde comme le soleil, au nez délicat et à la peau de porcelaine. Son sourire est si étincelant qu'il rendrait instantanément heureux n'importe qui. A travers son masque de perles, j'aperçois des yeux bleus tel un clair de lune perdu dans un ciel trop grand pour lui. Sa robe azur reflète la lueur de chaque bougie, elle est absolument parfaite...

La jeune fille est en retard, tout le monde la regarde. Les couples ont arrêter leur danse, les violons se sont tus. Et puis les murmures commencent, chacun donnant son avis sur la belle demoiselle.

"Ce sera elle, j'en suis sur... La connaissez vous ? Ça ne fait aucun doute, vu comme le prince Henri la regarde"

Je fais volte face. Le prince observe la mystérieuse jeune fille d'un air rêveur.

Il passe devant moi, me bousculant légèrement, puis s'avance vers Miss Mystère et la tire délicatement vers le centre de la salle.

-Mademoiselle, m'accorderiez vous cette danse ?

Le prince avait murmuré, mais tout les convives avaient pu l'entendre.

La jeune fille acquiesce avec un sourire timide. Le futur roi la pri délicatement dans ses bras, et ils commencent à tournoyer au rythme de la douce mélodie. La robe bouffante de la demoiselle ondule à chaque pas, et ses mèches blondes scintillent dans la faible lueur des bougies. Ils ne se quittent pas du regard, leurs yeux brillent si fort qu'autour tout s'efface.

Et tout s'efface pour moi aussi.

La salle de bal se met à tournoyer presque aussi vite que les jeunes amoureux durant ma course effrénée. Je m'enfuis, sans savoir ou je vais. J'arrive dans un grand couloir sombre. La plume dressée sur ma tête se perd dans ma course, retombant doucement derrière moi. Je me laisse glisser à sa suite, seule dans dans cet immense couloir.

Je reste quelques temps ici, à écouter ma respiration, les yeux fixés sur cette plume déchue. La sensation du carrelage froid contre ma nuque est apaisante, comme si quelqu'un me serrait dans une emprise glacée. Le son de la fête me parvient assourdi, et cela me berce. Ma tête dodeline...

Des éclats de rire me réveillent en sursaut.

-Par là, nous serons tranquilles !

Par la fenêtre, j'aperçois le Prince Henri passer en flèche. Il tire par la main Miss Mystère, hilare.

Je m'approche.

Ils se posent sur un banc tout en s'esclaffant. Les éclats de rire baissent en intensité, et chacun se perd dans le regard de l'autre. Le prince passe doucement une main dans la chevelure de sa belle. Leurs lèvres s'approchent lentement l'une de l'autre, dans un geste si tendre que mon cœur se retourne de jalousie. J'aimerais tant de pas avoir à voir cela. Et pourtant je n'en détache pas mon regard.

Douze coups sonnent. La future princesse se relève d'un coup, affolée.

-Que se passe-t-il ? S'inquiète Henri. Si cela vous dérange, nous ne sommes pas obligés de nous embrasser...

Miss Mystère regarde anxieusement autours d'elle.

-Non, ce n'est pas cela. Je dois y aller, pardonnez-moi...

Un dernier regard passionné, et la jeune fille s'enfuit en courant, sa robe volant autours d'elle. Le prince reste là, un geste suspendue en l'air, regardant sa belle dévaler les escaliers. Semblant reprendre ses esprits, il se lance à sa poursuite.

-Attendez ! S'écrit-il désespérément. Je ne connais même pas votre nom !

La princesse se retourne un bref instant.

-Colombe. Appelez moi Colombe...

Dans sa course effrénée, une de ses pantoufle de vair se détache. La jeune fille ne se retourne plus cette fois. Elle est partie.

-Colombe, répète doucement le prince en attrapant la chaussure.

Je l'observe, toujours derrière ma fenêtre. Je ne comprends pas tellement ce qu'il se passe. J'ai souvent entendu dire que l'amour rend fou. Et c'est surement le cas, car quelle personne saine s'effondrerait au sol, serrant une pauvre chaussure ? Resterais seul dans le noir quand des millions de jeunes filles veulent de lui ? Guetterais désespérément le retour d'une petite silhouette vêtue de bleu dans le froid de la nuit ?

Le prince a passé le reste de la soirée ici, à attendre sa belle. Quand à moi, je l'ai regardé souffrir en silence, mêlant secrètement sa peine à la mienne.

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